Avec la betterave, les apports en énergie dans la ration sont diversifiés et ce supplément d’autonomie énergétique est source d’économies importantes. Si l’on ajoute le bénéfice des taux, aucune raison de s’en passer.
Coût alimentaire diminué, prix du lait dopé et vaches en bonne santé ! Trois bonnes raisons pour adopter la betterave fourragère dans les rations des laitières. « Sur notre zone de Bretagne, j’observe un net regain pour la betterave depuis quelques années. Son intérêt vaut pour tous les systèmes de production, même en traite robotisée. J’oserai dire que tout éleveur laitier devrait se poser la question d’introduire ce tubercule dans la ration hivernale. Nous ne faisons que redécouvrir ce que faisaient nos anciens », avance Johann Cariou, responsable nutrition à BCEL Ouest. Et les éleveurs lui donnent raison. Aucun de ceux qui se sont convertis récemment à la betterave souhaite faire machine arrière, malgré quelques contraintes de culture ou de distribution.
Pour Johann, la première qualité de la betterave est de diversifier la ration des vaches en apportant une autre source d’énergie, en l’occurrence le sucre, en complément de l’amidon et de la cellulose des autres aliments. En effet, la matière sèche de la betterave est composée de 65 % de sucres solubles, aucun amidon et peu de cellulose. Une propriété qui lui vaut un très faible encombrement : 0,55 unité d’encombrement lait alors qu’un ensilage maïs se situe à 1,03 UEL.
1,12 UFL/kg de matière sèche à base de sucres
Les éleveurs constatent donc que distribuer de la betterave ne diminue pas la consommation de l’ensilage qui lui est associé. Avec une valeur UFL à 1,12, l’apport de betteraves densifie sensiblement la ration en énergie.
Les sucres de la betterave sont une source d’énergie fermentescible qui stimule la flore du rumen. Un élément particulièrement intéressant en complément du maïs fraîchement ensilé. Pendant les deux premiers mois, l’amidon de l’ensilage de maïs est peu dégradable, surtout avec des grains mal éclatés et des variétés cornées-dentées à l’amidon vitreux. Avec la betterave, on peut se passer d’un apport d’énergie fermentescible.
L’apport de betterave stimule la salivation et la rumination. Elle possède donc un certain pouvoir tampon. Mais sa richesse en sucre peut être acidogène si l’apport n’est pas raisonné. Le conseil est de ne pas excéder 3 à 4 kg de MS/vache/jour avec une transition de trois semaines afin que la flore microbienne du rumen puisse s’adapter. Des rations à base de foin peuvent accepter jusqu’à 5 kg de betteraves mais impérativement en deux repas. « Avec la betterave, une place à l’auge pour chaque vache est indispensable et il est préférable de les bloquer au cornadis. Sinon, l’appétence est telle que les animaux dominants sont capables d’en consommer de grande quantité en très peu de temps avec un risque métabolique très fort », avertit Johann.
Idéale avec un ensilage maïs un peu sec
Mais cette forte appétence est un atout pour doper l’ingestion, notamment quand on repousse le fourrage devant l’auge. « Il faut également assurer la fibrosité de la ration avec un minimum de 17 % de cellulose brute par kilo de MS par un apport de fibres grossières. Enfin, l’énergie fermentescible de la betterave doit être accompagnée de suffisamment d’azote soluble, donc ne pas hésiter à apporter de l’urée. »
Avec un taux de matière sèche moyen entre 17 et 19 %, la betterave doit être associée à un maïs suffisamment sec (32 à 35 % de MS). Avec un maïs plus humide (28-29 % de MS), la distribution de 3 kg de betteraves rendrait la ration totale trop humide, pénalisant ainsi l’ingestion et la rumination. Mais reconnaissons que les maïs trop humides sont rares. Sur le terrain, nous observons plutôt l’inverse. « Dans une ration classique combinant trois quarts d’ensilage maïs et un quart d’ensilage d’herbe, l’apport de 2,5 à 3 kg de MS de betteraves permet de récupérer toute la plus-value attendue, sans risque métabolique », assure Johann Cariou.
La première qualité de la betterave est d’augmenter les taux. Les éleveurs utilisateurs annoncent souvent 2 à 3 points de TB et 1,5 à 2 points de TP supplémentaires, soit 15 à 20 €/1 000 litres gagnés sur la paie de lait.
« À ce bénéfice, il faut ajouter la baisse du coût alimentaire. L’apport d’énergie supplémentaire et la digestibilité de la ration améliorée permettent souvent de supprimer l’aliment de production. Dans les rations avec betteraves, j’estime ce gain à 15 €/1 000 litres. En outre, les éleveurs qui avaient pris l’habitude de distribuer du propylène glycol pendant les premières semaines peuvent s’en passer : une économie supplémentaire qui peut s’évaluer à 45 €/vache », déclare Johann.
C’est souvent l’UFL la moins chère à produire
15 €/1 000 l gagnés avec les taux, 15 €/1 000 l d’économie de concentré, l’addition sur les quatre à cinq mois de l’année où la betterave est distribuée n’est pas négligeable sur le résultat économique final. Bien sûr, la betterave est un fourrage relativement cher à produire mais son rendement et sa densité énergétique compensent le surcoût : pour 20 tonnes de MS par hectare, la récolte est de 22 000 UFL/ha. Le maïs est largement battu. « Si la culture est réussie et les charges opérationnelles maîtrisées, on peut dire que c’est l’UFL la moins chère. Je l’estime à 4 centimes d’euro, contre 5 centimes pour un ensilage maïs à 15 t de MS/ha », précise Johann.
Les effets de la betterave sur les performances de reproduction et la santé générale des animaux sont souvent cités, mais ils sont difficiles à évaluer. La densité énergétique, l’appétence, la stimulation de la flore du rumen ne peuvent avoir qu’un rôle positif.
Aucun risque butyrique
La culture demande un certain savoir-faire, et beaucoup d’éleveurs bretons délèguent le semis et la récolte à une Cuma ou une ETA qui possède les équipements appropriés. « Je n’ai vu quasiment aucun échec majeur dans mon groupe. Il faut seulement être attentif au moment du désherbage. Contrairement au maïs la période de récolte est très souple. Elle se fait souvent en deux temps, ce qui simplifie le stockage et permet d’étaler la distribution d’octobre à avril. Même si je conseille de diminuer fortement la part de betterave pendant le pâturage de printemps », explique Johann.
La betterave elle-même peut se pâturer au fil, surtout en début de saison quand le sol est portant. Gare cependant aux vaches qui se salissent par temps de pluie. Le plus courant est une distribution avec la mélangeuse ou à l’aide d’un godet dessileur équipé ou non d’un système de hachage. « La présence d’un peu de terre sur les tubercules n’augmente pas le risque de contaminations butyriques. Il suffit d’enlever les refus et de nettoyer l’auge régulièrement. Les problèmes de butyriques viennent toujours d’un ensilage mal conservé », affirme Johann Cariou.
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