Les 90 vaches de Pieter Koonstra bénéficient chacune de 15 m². Ce confort répond à l’orientation qu’il veut donner à sa ferme : ouverte au consommateur.
Pieter Koonstra a mis en service en 2014 une stabulation avec deux aires de couchage compostées-malaxées, composées de copeaux de bois, l’une de 1 350 m2 pour les vaches traites, l’autre de 450 m2 pour les génisses. Les couloirs d’alimentation des vaches et des génisses sont sur caillebottis. Celui des vaches est raclé au robot. Le troupeau était logé avant en logettes-caillebottis.
Pieter fait partie de la cinquantaine d’éleveurs néerlandais qui ont investi dans ce type de stabulations. Elles dénotent dans le paysage laitier batave dominé par les logettes. C’est ce qu’il avait avant. « L’investissement est plus élevé, mais il doit être compensé par une longévité plus importante des vaches. Avec plus d’espace par vache et plus de lumière, favorable à la sécrétion de vitamine D, je fais le pari que le confort des animaux est rentable. »
Autre avantage : le compost que cette stabulation produit et qui contribue à l’amélioration du sol sableux. « Ce produit libère progressivement l’azote, ce qui évite son lessivage. Sa teneur en matière organique favorise la vie du sol. C’est de l’or noir », assure-t-il. Selon l’analyse faite en février 2017, avant l’épandage, sa valeur est de 12,9 kg d’azote par tonne de produit et 7,3 kg de phosphore (deux fois plus qu’un compost de fumier).
400 t de copeaux de bois pour une couche de 70 cm
Pour compenser la libération lente de l’azote, il a malgré tout implanté 24 ha de trèfles violet et blanc, avec du RGA. Ce bâtiment répond au sens qu’il veut donner à sa ferme : ouverte au consommateur et durable.
Sa stabulation applique le concept néerlandais des aires compostées : un curage annuel qu’il vient d’effectuer, une surface de 13,5 à 15 m²/VL pour 90 à 100 vaches, un malaxage quotidien des quinze à vingt premiers centimètres, un système d’aération sous les 70 cm de copeaux de bois pour aider au processus de compostage et un bâtiment ventilé par de larges ouvertures. « Dans les conditions climatiques néerlandaises, cette aération-ventilation et 12 à 15 m² par vache sont l’équilibre trouvé pour maintenir la couche supérieure sèche », indique Paul Galama, de l’université de Wageningen (Pays-Bas).
Deux systèmes d’aération existent : air pulsé et air extrait. Paul Galama estime le premier plus efficace sur le processus de compostage. Pieter a choisi le second qu’il juge plus sain pour les animaux (voir photos). « Il permet aussi de récupérer la chaleur. Avant de couler la dalle du bâtiment, j’ai posé, à côté des tuyaux d’extraction d’air, des tuyaux dans lesquels passe l’eau. Réchauffée, elle alimente en eau chaude la maison et le bâtiment. »
Il faut maintenir la couche supérieure sèche
L’éleveur commande une fois l’an 400 tonnes de copeaux à une entreprise située à 60 km de sa ferme. Le prix varie entre 23 € à 30 €/t(1) cette année, à 37 € au lancement en 2014. « Je préfère les copeaux de bois dur. Leur compostage est plus long qu’avec du bois tendre. Je les achète frais pour bénéficier de la totalité du processus de compostage. Je les mélange avec un peu du produit précédent pour les ensemencer des bactéries de dégradation. » Il en apporte 80 % juste après le curage annuel de l’aire de vie. Les 20 % restants sont apportés à partir de janvier, une fois par semaine ou toutes les deux semaines, selon la météo. Environ 20 m3 sont répandus par un petit épandeur à fumier à deux vis verticales. « Mieux vaut parfois épandre un peu plus de copeaux plutôt qu’attendre que le couchage devienne trop humide. Il se refroidit, ce qui accroît son humidité. Il faut éviter cette spirale en essayant d’anticiper. » Deux énormes ventilateurs au-dessus des vaches contribuent également à maintenir la couche supérieure sèche, ce qui évite entre autres que les jambes s’enfoncent. « C’est un élément important, dit Paul Galama. L’hiver, il est plus difficile de conserver un couchage sec. »
L’autre astuce pour préserver le bon état de la litière concerne son accès. « Les poteaux de support de la toiture multichapelle sont au bord du couloir d’alimentation. Le matin, une travée sur deux est fermée par un fil. L’après-midi, elles sont ouvertes et inversement. Cela fait varier les zones de passage des vaches. »
Pieter Koonstra est conscient que sa stabulation engendre des coûts plus élevés qu’en logettes. « Ce type de bâtiment est 25 % plus cher », indique Paul Galama. Pieter a investi 686 000 €, hors panneaux photovoltaïques et récupération de la chaleur (lire détail p. 41). Il ne sait pas à quoi cela correspond exactement en termes d’annuités. « En 2016, j’ai payé 95 €/1 000 kg d’annuités remboursées sur vingt à vingt-cinq ans, mais ce montant intègre tous les investissements faits sur le site, construction de la maison incluse. »
Le troupeau est en bonne santé
Il retrouve dans sa marge brute lait le coût annuel en plus lié aux copeaux identifié par le chercheur (ci-dessus). Ils triplent le coût du paillage par rapport à celui des collègues en logettes (15,60 €/1000 kg contre 4,60 € dans les 50 % meilleures marges brutes). En revanche, les frais vétérinaires sont un peu plus bas : 8,40 € contre 9,70 €. « Cette année, les cellules oscillent entre 192 000 et 270 000 à 292 000 par ml. Les vaches ont été un peu fragilisées par un mauvais mélange des concentrés dans la ration. Les résultats des germes sont stables : entre 5 000 et 7 000. » Juste après le renouvellement des copeaux, il enregistre un pic de streptocoques et coliformes et, au printemps, de staphylocoques dorés. Ils reviennent ensuite à la normale. Du côté de la santé du pied, là aussi les résultats sont bons. Depuis trois ans, le troupeau a la note maximale. Enfin, le lait a augmenté de 725 kg/vache (taux similaires) par rapport à la dernière campagne en logettes. Quant à l’amélioration de la longévité, il est trop tôt pour s’avancer. Il a réduit en 2017 le cheptel de dix vaches, phosphates obligent.
(1) Prix donnés en m3 et convertis en kg. 1 m3 = 325 kg.
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