
Préparation au vêlage, suivi post-vêlage, les associés de la SCL Prioux-Landais, en Mayenne, pilotent le déficit énergétique pour une mise rapide à la reproduction et une répartition homogène des vêlages au robot de traite.
Depuis dix ans, Antoine Prioux et Sébastien Landais, associés au sein d’une SCL, ont souscrit un forfait global de suivi du troupeau auprès de leur vétérinaire Olivier Crenn, vétérinaire à la clinique Sud-Mayenne. Ce dernier, au sein de la société Canevas, est associé avec un conseiller nutritionniste, Maxime Ménard, qui intervient en parallèle tous les trois mois pour la partie technico-économique. « Sur tous les aspects de notre métier, nous nous efforçons d’être dans l’anticipation, explique Antoine Prioux. Dès lors, investir dans la prévention avec un vétérinaire passionné est un moyen de ne pas subir les problèmes de santé. »
La centaine de holsteins de l’élevage affichent un niveau de production supérieur à 11 000 litres de lait. Elles sont traites par deux robots dans une stabulation de 120 places, et ont accès, en saison de pâturage, à une surface en herbe équivalente à 0,15 are/VL.
« Plus que les UF, l’ingestion est déterminante »
L’alimentation vise à favoriser la pleine expression du pic de lactation, tout en assurant une mise à la reproduction le plus tôt possible. La clé : la prévention de la cétose ou acétonémie, principale maladie métabolique pouvant expliquer les difficultés de mise à la reproduction, mais aussi l’apparition de mammites, retournement de caillette, métrite, endométrite… Pour mémoire, la cétose est associée à un déficit énergétique important en début de lactation, ou à un excès d’engraissement au vêlage. « Lorsque l’aspect sanitaire est maîtrisé (fièvre Q, BVD…) et la ration bien calée, l’enjeu principal est le pilotage du déficit énergétique en début de lactation, rappelle Olivier Crenn. Il est inévitable, mais il faut veiller à ce qu’il ne s’emballe pas. D’où l’importance de la phase de préparation au vêlage pour stimuler l’ingestion et la valorisation de la ration. »
En effet, le sujet est aujourd’hui bien connu : l’ingestion post-vêlage est proportionnelle à celle avant vêlage. À la SCL, la préparation au vêlage dure quatre semaines, avec une ration composée de 18 kg brut de maïs et 2,5 kg de paille broyée, complétés par 1,5 kg de soja, 500 g de colza, 500 g d’Amyplus (coproduit de blé en bouchons dosant 1,02 UFL) et 200 g de minéral ; soit une concentration de 0,85 UFL et 14 % de MAT/kgMS. Par ailleurs, les taries ont accès à de la paille en libre-service, via les bottes disposées entre les rangés de logettes, et à un parcours herbager. « Cette ration mériterait sans doute d’être légèrement plus concentrée en énergie (0,9 UF), précise Maxime Ménard. Mais plus que les UF, c’est l’ingestion qui est déterminante. »
« L’acétonémie ne se traite pas en urgence, elle se prévient »
Le conseiller rappelle les trois critères d’une ration de préparation au vêlage de qualité :
L’encombrement. Afin d’entretenir le volume du rumen. La paille broyée mélangée à la ration est particulièrement bien adaptée à cet enjeu – « plus il y en a à disposition mieux c’est ! » –, sans oublier le sel pour l’appétence et bien sûr un accès à l’auge et à l’eau à volonté. En période de fortes chaleurs, les éleveurs ajoutent dans la mélangeuse l’équivalent de 3 litres d’eau par vache, afin de préserver la fraîcheur et l’appétence de la ration. D’une manière générale, les principales erreurs évoquées portent sur des apports excessifs de maïs ensilage (jusqu’à 40 kg brut) et un manque d’ingestion de la fibre distribuée à part.
La teneur en protéines. C’est le carburant de la flore du rumen. Viser 14 % de MAT.
La gestion de la BACA. Les éleveurs distribuent le même CMV enrichi en oligo-élément que celui des laitières, et 100 à 130 g de chlorure de calcium pour abaisser la BACA. Le dosage de l’acidifiant est ajusté en fonction des mesures de pH urinaires (objectif 6,5 à 7). « Dès que l’on acidifie avec des chlorures ou des sulfates, il faut veiller à respecter un apport de calcium suffisant. Il n’y a donc pas de contre-indication à apporter le même minéral qu’en lactation (sauf s’il contient du bicarbonate). Dans tous les cas, la vache a besoin de calcium pour son fœtus, les formules minérales sans calcium sont donc à bannir. » Le repère est un apport journalier de 100 g de calcium, ou de 0,6 à 0,7 % de la MSI (et davantage si l’acidification est plus poussée). D’où l’importance des analyses de fourrages.
« La réponse à ces pratiques peut être différente selon les troupeaux. Afin de prévenir les dérapages, il est donc important de les valider par des analyses. Car la cétose n’est pas une maladie qui se traite en urgence, c’est une maladie qui se prévient. »
« Un gros repas dans les premières heures après la mise bas est primordial »
Pendant la préparation au vêlage, en plus du pH urinaire, le conseiller et les éleveurs réalisent des dosages d’AGNE dans le sang (acide gras non estérifié, un indicateur de satisfaction des besoins énergétiques avant le vêlage), tout en étant attentif à l’état corporel ou au score de remplissage du rumen. Ce dernier est un indicateur important pour évaluer le bon niveau d’ingestion : une note de 4 à 5 est un minimum à respecter en début de lactation, comme au tarissement. Si la note est inférieure, cela signifie que les vaches ne mangent pas assez.
Après le vêlage, la vache a de l’appétit et doit manger rapidement. Au-delà du calage de ration, des problèmes peuvent être liés au comportement social des animaux : « Des primipares ou des vaches dominées restent parfois 48 heures sans manger, avertit Olivier Crenn. Or, il est primordial qu’une fraîche vêlée prenne un gros repas dès la mise bas. » Ici, la stabulation prévoit plus d’une place par vache au cornadis, et les éleveurs n’hésitent pas, après le vêlage, à laisser la vache dans son box pendant au moins 3 heures, avec un premier repas mis à disposition à volonté.
La ration semi-complète se compose de 35 kg brut de maïs ensilage irrigué, 1,7 kg de luzerne en brin long déshydratée, 1 kg de bouchon de luzerne, 3 kg de bouchon de RGI déshydraté, 6 kg de maïs grain humide et 2,7 kg de colza. Au robot, la complémentation soutient fortement la production en début de lactation : elle est progressive et identique quel que soit le niveau de production de 0 à 30 jours, soit un maximum de 2,7 kg d’Amyplus et de 2,10 kg de soja. Puis, de 30 à 75 jours, elle est liée au niveau de production, tout en continuant de soutenir les faibles productrices, avec un plafond de 4 kg d’Amyplus et de 2,8 kg de soja pour les vaches à 55 litres de lait et plus.
« Le déficit énergétique pénalise la qualité des follicules »
En début de lactation, le suivi vétérinaire mensuel comprend bien sûr l’échographie, l’analyse de l’activité ovarienne et le contrôle de l’involution utérine, mais aussi un diagnostic plus large des fraîches vêlées afin, là encore, de valider les pratiques.
Le dosage des corps cétoniques (BOH) dans le sang. C’est un révélateur précoce de cétose subclinique. Une teneur supérieure à 1,2 mmol/l justifie un apport curatif de propylène, par voie orale si la prise en charge est suffisamment précoce, et de niacine. « Attention, les solutions végétales riches en isomaltulose, un dérivé de sucre, ne sont pas glucoformatrices et n’ont pas démontré leur efficacité. »
Le dosage de la calcémie sanguine , afin de vérifier l’absence d’hypocalcémie subclinique (< à 2,2 mmol/l ou 88 mg/l).
Sur le volet de l’ingestion, les éleveurs peuvent aussi s’appuyer sur la mesure de la rumination permise par le collier du robot, et contacter le praticien dès les premiers signes de dérapage, en profitant d’un forfait de suivi qui inclue toutes les interventions d’urgence.
Le déficit énergétique pénalise la qualité des follicules, mais lorsque l’alimentation autour du péripartum est bien gérée, la mise à la reproduction doit permettre entre 45 et 70 jours de profiter de follicules de qualité, maturés pendant le tarissement pour faire prendre la vache plus rapidement. « Mais pas avant 45 jours, pour une question de santé utérine. » La reproduction est gérée 100 % par insémination : 50 % de doses sexées sur génisses et des doses sexées mâles en croisement industriel sur multipares.
L’absence de chaleurs visible au-delà de 60 à 70 jours entraîne la mise en place d’un traitement hormonal. « Chaque jour de cycle perdu coûte cher, et un cycle perdu coûte plus cher qu’un protocole hormonal. Idéalement, il s’agit de maintenir un jour moyen de lactation entre 155 et 170 jours afin d’obtenir une bonne valorisation de la ration de base ». Si la vache n’a toujours pas pris après 200 jours, c’est la réforme, un moyen de sélectionner à long terme un critère transmissible : la fertilité.
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