Voie solide : les connaissances et les technologies progressent

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Méthaniseurs silos. Les méthaniseurs silos sont adaptés aux petites installations de moins de 100 kWe. Une bâche vient recouvrir le silo dès qu’il est chargé. Sa manipulation peut s’avérer fastidieuse. Le remplissage est frontal ou se fait par le haut. Les digesteurs sont chauffés par le sol.Anne Bréhier
Méthaniseurs silos. Les méthaniseurs silos sont adaptés aux petites installations de moins de 100 kWe. Une bâche vient recouvrir le silo dès qu’il est chargé. Sa manipulation peut s’avérer fastidieuse. Le remplissage est frontal ou se fait par le haut. Les digesteurs sont chauffés par le sol.Anne Bréhier (©Anne Bréhier)

La méthanisation par voie solide­ discontinue a connu des difficultés à ses débuts. Mais elles ne sont pas insurmontables­.

En l’absence de liquide disponible (lisier ou autre) et en présence de matières assez fibreuses (fumier pailleux, paille…), des agriculteurs se tournent vers la voie solide. D’autant plus facilement qu’ils ne souhaitent pas modifier leurs pratiques d’épandage calées sur le fumier. Même s’il est difficile de fixer une limite précise en termes de matière sèche pour passer de l’une à l’autre, on peut considérer que la méthanisation par voie solide s’impose à partir de 20 % de MS, mais surtout avec des matières premières assez fibreuses. En effet, un fumier assez mou entre 15 et 20 % de MS ne convient pas seul en voie sèche (mauvaise aération des tas). Il faudra alors le mélanger avec un substrat plus fibreux.

Depuis deux ans se développe une voie intermédiaire entre le liquide et le solide : la voie pâteuse. Outre le manque de recul pour juger de son efficacité, elle présente certaines contraintes techniques : broyage nécessaire des matières gourmand en énergie, apparition de croûte en surface des digesteurs, agitation importante nécessaire dans le digesteur, risque de bouchage des canalisations.

Recherche et développement sont indispensables

Comme la voie liquide il y a quelques années, la méthanisation par voie solide discontinue a connu des problèmes de jeunesse. Des start-up trop pressées n’ont pas maîtrisé suffisamment leurs installations. Certaines ont tiré sur les coûts. Une partie d’entre elles a disparu, telle que la société Erigène, porteur du concept Eribox (caissons mobiles).

Les entreprises encore présentes sur le marché (moins d’une dizaine) ont amélioré leurs installations de type garage ou silo. Mais il reste encore beaucoup à faire pour mieux connaître cette technologie récente. « Il faut aujourd’hui trouver les bons modèles techniques et économiques, en investissant dans la recherche et le développement », estime Bertrand Aucordonnier, de l’Ademe BFC, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie de Bourgogne Franche-Comté, très impliquée dans le développement de la filière.

C’est le but de Méthanov, la plate-forme technologique de recherche et de développement en cours de déploiement près de Dijon, au cœur d’une région d’élevage riche en substrats solides méthanisables tels que le fumier. Créée dans le cadre d’un vaste partenariat associant les universités du Grand Est, l’Ademe, les chambres d’agriculture et des industriels locaux, Méthanov doit aider à développer des technologies simples, efficaces et rentables. Or, actuellement, seule la moitié des méthaniseurs installés dans la région, comme sur le plan national, fonctionnent correctement. Leur conduite est aléatoire, les rendements méthanogènes faibles et la ­rentabilité incertaine. Les dysfonctionnements les plus fréquents concernent les méthanisateurs garages.

« Des erreurs d’approche ont été commises, analyse Bertrand Aucordonnier. On a voulu faire en solide ce que l’on faisait en liquide. Or, la méthanisation solide doit être considérée comme une technologie à part où de nombreux facteurs interagissent : le type de fumier, la température, la structure du tas (qui rend l’écoulement des jus plus ou moins facile), les pressions, lesmélanges de gaz. Alors qu’en voie liquide, avec une ration non perturbante et un système de chauffage adapté, on peut assez bien prédire la production que l’on va obtenir, en voie sèche, on n’en est pas encore là. Le risque de voir chuter fortement la production en cas de dysfonctionnement d’un paramètre est élevé. Aujourd’hui, les installations fonctionnent, en moyenne, à 80 % de leur potentiel énergétique avec des fluctuations de 60 à 100 % selon les périodes de l’année. »

En attendant les premiers résultats des études des travaux de Méthanov, qui porteront sur le prétraitement de la matière et les procédés d’agitation (voir encadré page précédente), l’Ademe entend valoriser les conclusions de l’expertise menée sur sept installations, des garages principalement, avec le bureau d’études Biogaz ingénierie. « Les conclusions de cette étude sont rassurantes pour les installations futures, note Bertrand Aucordonnier. Les défauts de construction sur les murs sont résolvables. On sait désormais ce qu’il faut faire et ne pas faire. Par exemple, quels sont les types de portes et de préportes qui ­fonctionnent. On commence à mieux appréhender les clés de réussite. »

Une bonne connaissance et une préparation des mélanges de substrats entrants sont ainsi indispensables. Pour cela, il faut disposer d’une aire suffisamment grande, ce qui n’est pas le cas de la plupart des exploitations. Les matières ligneuses gagnent à être précompostées en amont.

De la paille broyée de préférence

Contrairement à l’Italie ou l’Allemagne où les agriculteurs utilisent des pailles broyées courtes, les exploitations françaises partent en effet avec un fumier longue paille (30-50 cm), ce qui génère des difficultés techniques et des problèmes biologiques (dégradation de la cellulose plus lente et démarrage des fermentations dans le digesteur plus difficile). Avec des brins broyés, on peut gagner 20 à 30 % de production supplémentaire.

Avoir un tas chaud à entrer dans le méthaniseur, même si on perd un peu de matière, est essentiel. Il en est de même du réchauffage des percolats, ces jus récupérés au fond du digesteur et renvoyés en aspersion sur les tas de fumier.

Un guide de bonnes pratiques, qui sera édité en octobre, reprendra précisément chacun de ces points. La mise en place des solutions susceptibles d’améliorer le fonctionnement des installations a un coût en matière d’investissement et de travail. Le risque de rentabilité dégradée rendra nécessaire donc le maintien des aides à l’investissement.

Anne Bréhier

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

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