
En quatre ans, le Gaec de la Tuilerie a gagné en autonomie protéique. Comment ? En semant des protéagineux qui sont ensuite toastés chez un négociant local.
Le cahier des charges de l’AOP beurre Charentes-Poitou est en cours d’évolution. L’une des principales modifications concerne l’interdiction pour les producteurs d’employer des OGM dans l’alimentation de leurs laitières. Cette mesure, qui devrait entrer en vigueur d’ici deux à trois ans, remet en cause l’utilisation de tourteaux de soja d’importation comme source de protéines pour les producteurs de l’AOP. Ne voulant pas être trop dépendant de cette matière première au prix fluctuant, Damien Gélineau, agriculteur dans les Deux-Sèvres, a donc décidé depuis quelques années de réduire ses achats de soja. Cet éleveur, installé en Gaec avec ses neveux Thomas et Florian, a semé du lupin pour la première fois en 2016, et a commencé la culture de la féverole deux ans plus tard. « Ces deux protéagineux occupent désormais 10 ha chacun dans l’assolement, explique-t-il. L’implantation se fait au semoir à céréales classique. Nous pratiquons beaucoup les techniques simplifiées sur l’exploitation, mais pour ces deux cultures, j’avoue avoir ressorti la charrue. Les parcelles sont souvent plus propres après un labour et les levées plus régulières, avec notamment moins de problèmes dus à la mouche du semis. » L’éleveur a opté depuis cette année pour des variétés d’hiver, plus productives. Celles de printemps présentent selon lui deux inconvénients : le semis débute en février, alors qu’il n’est pas toujours facile de rentrer dans les champs, et la floraison arrive souvent en période trop chaude. La récolte est réalisée par une ETA qui intervient de préférence le matin, car en pleine chaleur, les gousses s’égrènent facilement. Les rendements en lupin et féverole varient de 20 à 35 q/ha selon les années. Les grains récoltés sont stockés sur une plateforme bétonnée sous un hangar.
Échange de marchandises
Pour être plus facilement assimilées par les vaches, les graines de lupin et de féverole nécessitent un traitement thermique appelé toastage (lire l’encadré). L’opération est réalisée en prestation par Pasquier Végétal, un négociant en céréales basé à une quarantaine de kilomètres de l’exploitation. Toutes les six à huit semaines, un camion livre au Gaec de Damien Gélineau un mélange de lupin et de féverole déjà toasté et aplati. Le chauffeur repart ensuite avec des graines brutes, chargées sur l’exploitation. Cette prestation est facturée à 90 €/t, toastage, laminage et transport compris. L’aliment est stocké dans un silo vertical équipé d’une vis de reprise utilisée tous les jours pour charger la mélangeuse. Il s’agit d’un échange de marchandises puisque le grain distribué aux animaux n’est pas celui produit sur l’exploitation. Cette organisation simple et économique convient bien à Damien Gélineau et à ses associés. Pour les éleveurs qui souhaitent utiliser leur propre production, Pasquier Végétal propose depuis cet été une prestation à la ferme grâce à un toaster mobile monté sur un camion.
Actuellement, la part des protéagineux de l’exploitation atteint 1 kg/j dans la ration des vaches. Cela reste minoritaire comparé aux 2,5 kg de tourteaux de soja et 1,5 kg de tourteaux de colza distribués quotidiennement. « Atteindre une autonomie totale me semble difficile, commente Damien Gélineau. Mais nous pouvons encore faire mieux. La saison prochaine, nous allons implanter du soja. Il existe de nouvelles variétés adaptées aux conditions pédoclimatiques du Grand Ouest. Apparemment, après toastage, cela donne de bons résultats en production laitière. Si les rendements sont corrects, nous augmenterons encore la part de protéines autoproduites. À terme, en achetant davantage de tourteaux de colza, nous parviendrons peut-être ainsi à supprimer totalement le soja d’importation dans la ration. »
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