EN IRLANDE : RÉDUIRE LES COÛTS ET PRODUIRE PLUS PAR HECTARE

Shane Fitzgerald gagne de l'argent aujourd'hui avec un lait payé 21 €/100 kg, pour un coût de production à 14 €/100 kg.
Shane Fitzgerald gagne de l'argent aujourd'hui avec un lait payé 21 €/100 kg, pour un coût de production à 14 €/100 kg. (©)

Dans le droit fil de la tendance irlandaise, Shane Fitzgerald veut produire plus de lait pour gagner plus, en optimisant la rentabilité des pâtures.

CE JEUNE ÉLEVEUR IRLANDAIS EST CONFIANT. Le lait, pilier de l'économie de son pays, a de l'avenir. Son système herbager s'avère peu sensible aux fluctuations des prix des intrants. La mise aux normes est faite. Bien sûr, au prix actuel de 21 €/100 kg, il ne gagne plus beaucoup d'argent. Mais en misant sur la maîtrise des coûts, il est persuadé d'avoir fait le bon choix.

Comme la Nouvelle-Zélande, l'Irlande a assis sa filière laitière sur un potentiel herbager exceptionnel. « En 2008, ma saison de pâturage a duré 285 jours », explique Shane Fitz gerald. Cette herbe est bien évidemment pâturée, pour réduire les coûts et le travail. Il dispose de 56 ha accessibles aux vaches et toute la surface est en prairie. La mise à l'herbe a lieu au 1er février. Les vêlages commencent fin janvier pour terminer mi-avril. 86 % des naissances sont groupées sur six semaines.

Pour produire un maximum d'herbe et donc de lait par hectare, Shane implante du ray-grass anglais pur. « Le trèfle a un rendement insuffisant au printemps et en automne. » Rien n'est laissé au hasard dans l'exploitation des prairies. Des mesures de pousse permettent d'évaluer le rendement, et d'adapter le temps de présence des animaux. La recherche irlandaise a beaucoup travaillé sur les techniques permettant d'obtenir un maximum de lait à l'hectare à moindre coût.

Il s'agit de favoriser les pousses feuillues et d'ajuster le chargement au potentiel. Les vaches doivent consommer tout ce qui est disponible sans pénaliser les repousses.

DES VACHES CROISÉES

Des parcelles sont réservées à la fauche afin d'éviter tout gaspillage et de constituer des stocks pour l'hiver. Cette herbe fournit une ration complète de qualité. Les vaches consomment un peu de concentré en mars, pas plus de 3 kg/jour, puis de l'herbe en plat unique.

En hiver, elles reçoivent de l'ensilage d'herbe et de la paille, avec un peu de concentré pour celles qui manquent d'état. Optimiser la valorisation de l'herbe passe aussi par le choix des animaux. Et la saisonnalité de la production ne laisse aucune chance aux vaches qui ne font pas un veau par an. Shane s'est lancé dans le croisement en 2002, considérant que la holstein est mal adaptée à son système. Il alterne la holstein néo-zélandaise, la rouge norvégienne et la jersiaise.

Ce type d'animaux présente l'avantage d'avoir une bonne longévité. Le taux de réforme se limite à 13,7 %, ce qui permet de vendre des génisses ou des vaches en production. Le produit des ventes d'animaux est ainsi très supérieur à la moyenne du réseau européen. Et cette disponibilité en animaux donne une marge pour augmenter assez facilement la production, quand l'opportunité se présente.

UN SYSTÈME PEU GOURMAND EN TRAVAIL

Avec le groupage des vêlages, tous les animaux sont taris en hiver. Les besoins alimentaires, mais aussi les exigences en matière de logement sont réduits au minimum. Depuis deux ans, les épandages de déjections sont interdits durant deux mois en hiver. Shane a construit un parc stabilisé d'hivernage. L'investissement s'élève à 660 €/vache, soit moins que la construction d'un bâtiment. Il peut accueillir 150 vaches. Le bâtiment existant héberge également une partie du troupeau. Pour le reste, l'élevage dispose d'une salle de traite à l'irlandaise, deux quais mais un simple équipement. L'aire d'attente est ouverte sur l'extérieur. Mais puisqu'il n'y a pas de traite en hiver, Shane considère qu'il n'y a pas d'inconfort. L'éleveur emploie un salarié à temps plein. Son père retraité donne un coup de main et compte pour 0,3 unité de main-d'oeuvre.

Le système en place est peu gourmand en main-d'oeuvre. Il y a surtout de la surveillance et de la gestion. Les récoltes sont en partie sous-traitées à une entreprise, ce qui représente une charge de 1,34 €/100 kg de lait. Aujourd'hui, le coût de production de l'élevage se limite à 14 €/100 kg, main-d'oeuvre comprise. Autrement dit, même avec les prix actuels, il reste rentable. Ce système ne manque pas de perspectives, à dimension constante. Car à 17 000 €/ha, Shane n'envisage pas d'agrandir sa surface. L'an dernier, il a acheté 77 000 l de quotas au prix de 32 c/l. Il a gardé des génisses pour passer de 131 à 163 vaches. Le chargement atteint actuellement 2,9 vaches en production par hectare accessible. C'est l'indicateur clé pour Shane. Il sait que ses pâtures peuvent nourrir 3,2 vaches en production par hectare. C'est son objectif. Il devrait lui permettre de ramener le coût de production à 11 €/100 kg.

Dans l'immédiat, il a renoncé à acheter du quota. Même si le prix est tombé à 26 c/l, il estime que c'est un investissement à fonds perdu, alors que leur disparition est programmée.

D'ici là, il espère produire plus que son quota, grâce aux sous réalisations de ses collègues.

Car tous ne se sont pas mis aux normes. Et surtout, tous n'ont pas travaillé la maîtrise des coûts comme lui. La chute actuelle des prix pourrait donc contraindre certains à l'abandon. L'Irlande est en sous-réalisation. Pour la suite, Shane montera à 180 vaches dès que les quotas seront supprimés.

Cette volonté de croissance se justifie d'abord parce qu'il faut couvrir les charges liées au salarié, mais aussi parce que Shane constate une tendance à la hausse du prix des intrants. Bien entendu, il cherche à augmenter son propre profit. « J'ai les compétences et l'envie de produire plus. C'est un challenge qui me tente, à condition de préserver mon système low cost. »

Au-delà de 180 vaches avec la même surface, il devrait revoir son système. Acheter des fourrages et des concentrés ne lui semble pas rentable. Il vise donc l'optimisation de sa productivité par hectare et la disparition des quotas lui permettra d'y parvenir.

PASCALE LE CANN

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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