Anti-tout (et n’importe quoi)

La France, qui serait la championne du monde du nombre de piscine par habitant, n’est pas à une contradiction près. En effet, alors que l’eau des piscines provient aussi du réseau d’eau potable, un collectif s’élève contre la construction de retenues collinaires, qui récoltent l’eau de ruissellement en hiver.

L’eau ne fait que passer. Sur 440 milliards de mètres cubes annuels de pluie en France, 64 % s’évaporent. Le reste s’infiltre et recharge les nappes phréatiques, ou ruisselle jusqu’à la mer. Retenir intelligemment une partie de l’eau l’hiver afin d’irriguer l’été ne changera rien à l’étiage des rivières­ en période estivale. Avec le réchauffement climatique et l’incertitude alimentaire, permettre à des zones sèches de conserver des cultures est primordial­. Mais pour ces opposants, qui dit irri­gation, dit grandes cultures, traitements phyto et agro-business. Alors on organise une grande protestation dans les Deux-Sèvres. Sauf que les manifestants se sont trompés de cible et ont détruit les installations d’un irriguant bio. Preuve s’il en fallait que les grandes exploitations conventionnelles ne sont pas les seules à avoir besoin d’eau…

Autre aberration, l’attaque d’un train en Bretagne. On nous rejoue un mauvais western, dans le « Phare Ouest ». Croyant vider un convoi de soja OGM, ces écolos de pacotille ont laissé couler sur les voies des milliers de tonnes de blé. Quand on ne sait pas faire la différence entre les deux, on reste chez soi. Et on se renseigne avant d’agir. De plus, la méthode relève plus du terrorisme que de l’action engagée.

Nous sommes en démocratie, n’en déplaise à beaucoup. Que tous ceux qui prétendent, depuis la Covid, que nous sommes en dictature aillent faire un tour en Russie ou en Chine. Nous élisons régulièrement nos représentants, et les minorités peuvent s’exprimer. Mais la démocratie, c’est d’abord respecter les hommes et les lois. Quelques individus nostalgiques de Notre-Dame-des-Landes veulent pourtant créer une ZAD anti-retenues. Si n’importe quelle minorité s’érige en contre-pouvoir à travers des actions violentes, on dérive vers l’anarchie. Inversement, la pensée unique, c’est la dictature.

Prenons plutôt exemple sur le cratérope écaillé, ce petit passereau qui vit en bande en Israël. Contrairement­ à d’autres espèces, la compétition entre membres d’une colonie tourne autour de… qui manifestera le plus d’altruisme. Ces oiseaux ont résolu le dilemme entre la nécessité de s’élever dans la hiérarchie et celle de coopérer pour la pérennité du groupe. Si tel individu donne, c’est qu’il en a les moyens. S’il défend le groupe contre les prédateurs, c’est qu’il est plus habile et courageux. S’il propose de nouvelles solutions, c’est qu’il est plus curieux et astucieux. Chacun acquiert ainsi de la reconnaissance, tout en élevant le groupe.

Tels le cratérope, collaborons donc, au lieu de nous affronter. Soyons audacieux, et inventons une cohabitation harmonieuse entre ville et campagnes. Relevons les défis de l’alimentation mondiale et de la préservation de notre planète. Pour qui a les yeux en face des trous, la survie de notre espèce en dépend.