
Eh oui, moi, le fort en gueule, je sais que je ne sais rien. Tout arrive, me diras-tu.
Ces dernières semaines, nous nous posons plus de questions que nous n’avons de réponses. L’incertitude est de mise. Avant le Covid, des questions émergeaient déjà sur l’avenir de l’agriculture : prix de nos produits, perte de valeurs de nos entreprises, agribashing, contraintes environnementales, départ à la retraite et renouvellement des générations. Au plus fort de la période Covid, sauf à avoir été sévèrement touché par la maladie, notre activité professionnellen’a pas été trop affectée. Mais le « quoi qu’il en coûte » aura des répercussions sur les finances publiques et, par ricochet, sur nos affaires. La désorganisation du commerce mondial engendre des effets insoupçonnés et l’inflation, jugulée depuis de nombreuses années, réapparaît.
Et puis Poutine arrive, avec ses délires expansionnistes et sa nostalgie de la Grande Russie. Le spectre d’un conflit européen, que notre génération n’a pas connu, alimente toutes les discussions. Poutine sait qu’il mène une guerre conventionnelle et provoque une sacrée pagaille dans notre système européen. La machine s’emballe, les prix flambent et personne ne se risque à des conjectures à court et moyen termes. Les coûts du gaz et du pétrole s’envolent. Nous avons été élevés dans un système – y compris agricole – fondé sur les énergies fossiles. Tous nos gains de productivité en dépendent (matériels, engrais, phytos, énergie). Nous savons depuis longtemps que cette période faste aura une fin d’autant plus proche que les rejets de gaz à effet de serre ont un fort impact sur le climat. Les coûts de production explosent, mais le prix de vente de nos produits va-t-il suivre ? Un pétrole cher va nous forcer à trouver des alternatives rapidement. Nos systèmes de culture doivent évoluer pour plus de résilience ; nous allons redécouvrir les bienfaits des associations de cultures ; l’autonomie alimentaire ressurgit avec la flambée des tourteaux. Les méthaniseurs décriés par les écolos et comités de riverains vont-ils soudain retrouver grâce à leurs yeux pour pallier le gaz russe ? Le bois déchiqueté et le bois bûche, qui ne valaient rien, vont prendre de la valeur. Le prix des céréales va avoir un impact significatif sur les élevages hors sol.
Il va falloir arbitrer entre nourrir les populations ou produire des biocarburants sous peine de déclencher des émeutes de la faim dans certains pays et des revendications en France. Il y a fort à parier que des céréales durablement à plus de 300 € et de la carcasse de réforme à 4 € vont accélérer la déprise laitière. Acheter de l’ammonitrate à 800 € pour produire du lait à 400 € ne sera pas tenable très longtemps.
On peut multiplier ainsi les exemples et les conjectures mais gageons que c’est aussi dans les grandes crises qu’il faut trouver des solutions radicales. La cohésion de l’Europe a plus évolué en quelques jours qu’en plusieurs années. Nous sommes prêts à faire des efforts pour sauver nos démocraties, mais pendant combien de temps ? Dans nos fermes, nous sommes habitués à résoudre des problèmes divers. Il va falloir inventer, être réactif, opportuniste, résilient. Plus facile à dire qu’à faire, me rediras-tu.
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