Innoval, l’union fait la farce

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L’Enfer est pavé de bonnes intentions. Mieux vaut regarder où l’on met les pieds, donc.

Un courtier me dit un jour : « Vous, les agriculteurs, ne jurez que par le Crédit Agricole, Groupama, et CERFrance. » Étant lui-même vendeur de placements, assurances et conseils, mais dans une organisation concurrente, il ne comprenait pas cet attachement. Je lui explique alors l’origine de la Banque Verte. La IIIe République, afin de soutenir la petite exploitation familiale – et s’attacher le vote paysan –, permet la constitution de caisses locales de Crédit Agricole. Ces réserves, alimentées par le monde agricole, permettent le développement d’une agriculture moderne. Lors de la privatisation de la maison mère en 1988, les caisses régionales rachètent 90 % de ses actions. Pour ce faire, elles puisent dans les parts sociales déposées par les agriculteurs, pour racheter un outil… qui appartient déjà aux adhérents. En 2001, Crédit Agricole SA entre en Bourse, et s’associe avec des fonds de pension anglo-saxons. Si quelqu’un peut m’expliquer ce que deviennent les parts sociales de départ, je suis preneur. En attendant, certains administrateurs nationaux engrangent des indemnités annuelles avoisinant les 100 000 €.

Groupama, lui, est issu de caisses locales constituées à l’origine par les mutuelles chevalines. Dans les années 1980, les caisses locales sont gérées par un agriculteur par commune. 1986 : création de Groupama ; la région récupère les fonds de caisse locaux. 1998 : achat de GAN, 4e groupe d’assurance en France. 2001 : création de Groupama Banque, puis développement à l’international. Qu’est-ce que cela rapporte au sociétaire ? Pas même un tarif préférentiel­. Là encore, les administrateurs nationaux engrangent des indemnités bien supérieures au revenu de leur exploitation. Quant aux centres d’économie rurale (CER), les premiers sont créés en 1957, à l’initiative du monde agricole. CERFrance constitue le premier réseau français d’expertise comptable. Initialement dévolu au monde agricole (encore plus de la moitié des adhérents), le réseau s’est diversifié et ouvert à toutes les catégories de TPE et PME. Un réseau qui va nous échapper, si l’on se fie aux spots TV…

J’ai assez râlé sur le fait que nos organisations professionnelles étaient nombreuses, dispersées et concur­rentes pour ne pas applaudir à la création d’Innoval. 30 000 adhérents, sur 25 départements, vont avoir accès aux services de cette coopérative regroupant le contrôle laitier, Copavenir (conseil), Évolution (IA, génétique) et GDS Bretagne (sanitaire). J’en ai reçu le catalogue (258 pages), qui propose tout, sauf de faire le café. Cette entreprise va accéder à une foule de données (les tiennes), qu’elle va s’empresser de compiler et de te revendre sous forme de conseil. Évolution va s’associer avec les Allemands et les Scandinaves au sein d’Arcowin ; cette partie commerciale et libérale ne sera pas intégrée dans Innoval­. La mission du GDS d’organisme à vocation sanitaire agréé par l’État sera indépendante, mais assurée par des salariés Innoval, avec un devoir d’impartialité. Tu n’y comprends plus rien ? Normal­, c’est le début de l’usine à gaz.

Bonne chance aux administrateurs pour diriger ce mastodonte et éviter les conflits d’intérêts.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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