
Les ruminants étaient là avant l'essence et le climat s'en portait fort bien.
On veut bien réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) pour freiner le réchauffement climatique. Mais de là à abandonner la voiture pour pédaler, il y a une marge ! Il est beaucoup plus facile d'accuser les vaches, et certains ne s'en privent pas. Après tout, elles produisent des nuages de méthane, gaz à effet de serre vingt-cinq fois plus nocif que le gaz carbonique (CO2). Abandonnons l'élevage et ne touchons pas à notre confort ! N'allons pas trop vite ! Le méthane est issu de la digestion des végétaux par les ruminants mais aussi par les termites. Les marais, les rizières et même la forêt amazonienne en rejettent. Au bout d'une dizaine d'années, le méthane se transforme en CO2 et peut à nouveau être absorbé par les plantes. La boucle est bouclée. Ces mécanismes fonctionnent depuis la nuit des temps. L'exploitation des énergies fossiles est beaucoup plus récente. Et c'est elle qui est à l'origine de l'accroissement actuel des émissions de GES. Le quatrième rapport du Giec est formel. Ce n'est donc pas en supprimant les vaches que l'on résoudra le problème.
Mais les opposants à l'élevage ont d'autres arguments, dont un qui semble imparable en ces temps de famine et d'explosion démographique : il faut sept à dix protéines végétales pour produire une protéine animale. Donc, on oublie la côte de boeuf, on mange des céréales et des légumineuses, et le tour est joué ! Là encore, c'est un peu rapide.
Ce régime végétarien était celui des civilisations premières. En apprenant à cultiver, les chasseurs cueilleurs ont pu faire des réserves et se sédentariser. Les apports nutritionnels s'équilibraient. Sauf que les rendements ont vite plafonné. Avec l'élevage, nos ancêtres ont découvert les bienfaits du compost et du fumier. Car nos chers herbivores n'ont pas que des défauts : eux seuls sont capables de digérer la cellulose. Ils valorisent des surfaces difficiles (landes, prairies permanentes, etc.), et transfèrent les éléments minéraux qu'ils y trouvent vers les surfaces cultivées. Combien faudrait-il d'engrais (dont la production engendre des GES) pour remplacer la fertilisation animale ? Et que ferait-on de toutes ces surfaces non labourables dont seuls les ruminants tirent profit ?
Et puis, comment ne pas revenir aussi sur les agro carburants ? Ceux qui comptent sur eux pour rendre nos voitures propres oublient une chose : pour produire 50 l de bioéthanol, il faut 350 kg de maïs, soit la quantité annuelle consommée par un paysan mexicain. On fait comment pour nourrir tout le monde ?
Des découvertes plus récentes militent pour les prairies permanentes, plat favori de nos ruminants. Elles stockent jusqu'à 65 t de carbone/ha sous forme de matière organique, contre 40 à 45 t/ha de culture. Et ces dernières déstockent le carbone lorsqu'elles suivent une prairie. Les bilans doivent en tenir compte. En favorisant les retournements de prairies, la Pac a contribué à relarguer du CO2. Bien sûr, ce raisonnement ne tient pas avec l'élevage à base de maïs-soja. Surtout quand les tourteaux traversent la planète avant d'arriver à l'auge.
Il est temps de repenser notre alimentation et les modes d'élevage avec la hausse des coûts de transport et la concurrence entre les diverses utilisations des surfaces. Mais parions que l'élevage a encore de beaux jours devant lui. Ma grand-mère a eu cette pensée qui réjouira les pétomanes : « Il vaut mieux péter en compagnie que d'avoir mal au ventre tout seul. ».
PASCAL POMMEREUL
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