AVENIR : PROFITER DE LA CRISE POUR CONSTRUIRE

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Il y aura une vie après la crise. Le secteur laitier a des atouts qu'il est bon de rappeler. Nul doute qu'il saura rebondir.

LES MÉDIAS NE PARLENT QUE DE ÇA : la crise économique mondiale et ses effets désastreux. Le monde laitier n'est pas épargné et les manifestations ont fait la une en mai. Pourtant, il existe de bonnes raisons de croire en l'avenir de cette filière. Sans tomber dans un optimisme béat, sans annoncer de miracle imminent, il est intéressant de s'y pencher. Car elles sont nombreuses et solides.

UNE DEMANDE SOUTENUE

En quelques mots, les difficultés actuelles ont plusieurs origines. Il y a le retournement des marchés avec une offre supérieure à la demande : en cause, la fin de la sécheresse en Océanie, la mélamine en Chine, la baisse du prix du pétrole, la crise financière et économique mondiale… Bref, tout le contraire de ce qui a produit l'euphorie en 2007. Il y a aussi la quasi-disparition des outils de régulation des marchés européens, alors que la contrainte des quotas demeure. Enfin, la désorganisation de la filière française depuis que l'administration lui a interdit de fixer une recommandation nationale pour le prix du lait n'arrange rien.

Des facteurs conjoncturels et structurels, donc, qui poussent tous dans la même direction.

Ces derniers sont les plus lourds pour la filière qui se voit contrainte d'adopter les règles du libéralisme. Une véritable rupture qui engendre des craintes légitimes. La crise laitière est une crise d'adaptation. Mais l'Histoire est riche de bouleversements qui ont d'abord fait peur, avant de se révéler porteurs de dynamisme et de progrès. Même si le cap est difficile à passer, il n'y a aucune raison de croire que la filière ne rebondira pas.

Car elle a la chance de s'appuyer sur un marché fondamentalement dynamique. Soutenue par l'explosion démographique, la demande mondiale progresse et continuera de le faire pendant encore longtemps. La conjoncture le masque aujourd'hui, mais les besoins en lait croissent en moyenne de 12 milliards de litres par an sur la planète. C'est plus de la moitié du quota français. Les États-Unis se préparent pour alimenter ces marchés que l'Océanie ne captera pas seule. Dans l'Union aussi, et malgré la crise, la consommation de produits laitiers tient bien. Même si elle s'oriente davantage vers les premiers prix.

De plus, le retour de la croissance économique est espéré en 2010. Les gouvernements de tous les pays industrialisés en font une priorité. Et cette reprise relancera la demande pour le lait. Car quand le niveau de vie d'un pays progresse, sa consommation de produits laitiers suit toujours.

Par ailleurs, dans un contexte d'élections européennes, on pourrait espérer un recul du libéralisme bruxellois, et une moindre exposition des marchés laitiers aux fluctuations des cours. La crise financière montre bien tous les dangers de la dérégulation totale. Et puis, le Parlement européen pourrait voir son pouvoir renforcé si le traité de Lisbonne était adopté. Malgré tout, cet espoir reste limité. La campagne électorale ne donne lieu à aucun débat sur le sujet en France. Il semble donc peu réaliste d'envisager un retour à la régulation des marchés. Sur le plan structurel aussi, la filière bénéfice de quelques atouts. Cette industrie lourde n'est pas facilement dé localisable. La France dispose d'avantages spécifiques, notamment en raison de son savoir-faire dans la fabrication des PGC. Trois entreprises de l'Hexagone ont une dimension internationale. Elles sont capables de conquérir les marchés qui repartent. Au niveau de la production, la France possède des avantages compétitifs du fait de son contexte pédoclimatique, de la densité de sa production et du dynamisme de ses éleveurs. Le bond des livraisons en 2008 a eu au moins le mérite de démontrer de façon éclatante, la réactivité des éleveurs à un appel à produire. Soulignons aussi la forte motivation, voire la passion, qui anime une majorité d'entre eux. Les éleveurs aiment leur métier et s'y accrochent. On est loin du découragement qui plombe la filière britannique depuis des années.

Reste à créer le contexte favorable pour que la France puisse bénéficier de la croissance lorsqu'elle repartira. Elle doit aussi se préparer à la sortie des quotas. Car même si la décision définitive ne sera prise qu'en 2014, il est difficile de croire à leur maintien. Déjà, les décisions de Michel Barnier dans le rééquilibrage des aides sont plutôt positives pour l'élevage. L'interprofession travaille aussi pour se donner un nouveau cadre de fonctionnement adapté au nouveau contexte.

LA FILIÈRE DOIT RÉAGIR

Certes, le débat est actuellement pollué par la conjoncture. Mais il y a des idées, à commencer par la contractualisation. « Il ne faut pas en avoir peur. Il s'agit d'établir un relationnel normal entre deux intervenants. Si on part du volume, on redonne de la valeur à la production », positive Henri Brichart. Les coopératives proposent un système de double prix. Certaines régions réfléchissent à un regroupement de l'offre pour gérer les excédents en commun. L'essentiel est que le débat ait lieu. Il en sortira un système de fonctionnement en phase avec le nouveau contexte. Et la filière s'adaptera et découvrira peut-être des avantages que la peur du changement masque aujourd'hui. Car, on ne le dira jamais assez, les laiteries et les producteurs ont et auront toujours besoin les uns des autres.

PASCALE LE CANN

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

« L’IA ne remplace pas notre métier, elle le facilite »

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