La fauche précoce des prairies est payante

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Expérimentations. Des essais réalisés avec différentes prairies et sous différents ­climats montrent clairement l’intérêt d’avancer la date de fauche des premier et deuxième cycles, malgré une perte de rendement.

Entre les contraintes de main-d’œuvre, l’avancée de la pousse et les fenêtres météo, il n’est pas si simple de déterminer la date de première fauche d’une prairie au printemps. Et pourtant, elle conditionne toute la production d’ensilage d’herbe de la saison, en volume comme en qualité. Il est donc intéressant et rentable de définir une stratégie dans ce domaine.

Les travaux conduits sur les fermes expérimentales des chambres d’agriculture et d’Idèle peuvent aider car ils permettent de mieux évaluer l’impact de différentes conduites, aussi bien sur les caractéristiques des fourrages que sur la production laitière ou la marge sur coût alimentaire.

Les essais de Mauron (Morbihan) ont comparé une fauche précoce, soit au stade montaison de la graminée, à une récolte au début de l’épiaison. L’écart de dates se monte ainsi à dix-neuf jours. Ils montrent que la fauche précoce permet d’améliorer la valeur alimentaire grâce à une teneur en MAT plus élevée en moyenne, mais surtout sur le premier cycle.

Les légumineuses sont favorisées sur les cycles suivants

Cela est vrai pour du ray-grass hybride (5,6 points de MAT de plus sur le premier cycle), comme pour des associations de graminées et légumineuses (4,1 points de MAT en plus). Dans ce dernier cas, la qualité du fourrage est plus régulière au fil des récoltes. En effet, la fauche précoce favorise le développement des légumineuses en les exposant davantage à la lumière. Elles sont prédominantes dans le mélange à partir de la deuxième coupe. En moyenne, sur les cycles deux à quatre, le gain en MAT s’élève à un point.

Quand on réalise la première coupe de façon précoce, on effectue généralement une ou deux coupes de plus sur l’année. Mais cette pratique pénalise le rendement annuel moyen (- 0,8 t de MS/ha). Ce rendement est aussi lié aux conditions climatiques et, au final, la production totale de MAT dépend davantage du rendement que de la composition du fourrage. À Mauron par exemple, la production de MAT monte à 2 t/ha sur les prairies d’association en 2014, année très favorable, mais tourne autour de 1 t les autres années. Ces prairies ont produit jusqu’à 12 000 UFL/ha en 2014, contre 6 200 à 8500 UFL/ha les autres années.

Les vaches s’adaptent

Les observations réalisées à Trévarez (Finistère) sur une parcelle de ray-grass hybride-trèfle violet corroborent ces résultats. Si le climat pèse sur les rendements, la fauche précoce a un effet favorable sur la valeur énergétique du fourrage. Elle améliore également la teneur en PDIE et PDIN. Mais l’écart avec la conduite classique se resserre au fil du temps. Deux années sur trois, la fauche précoce permet de récolter plus de MAT et d’UFL par hectare.

Les vaches sentent aussi ces différences et adaptent leur comportement. Le silo composé avec le fourrage de la parcelle fauchée tôt est mieux ingéré deux années sur trois. Les conséquences sur la production laitière ne sont notables qu’une année sur trois avec un gain moyen de 3,2 kg. Les différences sont à l’avantage de la fauche précoce les deux autres années, mais l’écart n’est pas significatif. Le TP est augmenté tous les ans chez les multipares (+ 0,9 g/l), mais le TB n’est pas affecté.

Une hausse de l’ingestion et parfois de la production

Ces observations avec des rations comprenant 40 % d’ensilage d’herbe amènent à s’interroger sur les effets de la fauche précoce quand l’ensilage de maïs n’est pas prédominant.

Un premier travail a été réalisé à Trévarez qui dispose d’un troupeau conduit en bio, avec une ration hivernale où la part d’ensilage d’herbe atteint 65 %. Il révèle une hausse de l’ingestion d’ensilage d’herbe de 3 kg de matière sèche par vache et par jour (10,2 kg contre 7) avec une récolte précoce. La production laitière gagne 3,6 kg/vache avec également des améliorations sur les taux : 0,7 en TB et 1,2 en TP. Ces résultats devront être confirmés sur plusieurs années mais sont encourageants.

Sur le plan économique, la fauche précoce est plus coûteuse car avec un nombre de passages supérieur, elle est plus exigeante en main-d’œuvre. Ramené à l’hectare, il faut compter entre une heure et demie et trois heures de travail supplémentaire, selon les années. L’impact financier va de 18 à 28 €/t de MS selon les années. Il est d’autant plus élevé que l’année fourragère est défavorable.

Au final, les simulations économiques montrent que la fauche précoce améliore la marge sur coût alimentaire seulement si elle provoque une hausse significative de la production laitière couplée à un gain de TP pour les multipares.

En pratique, l’avancement de la date de première récolte est intéressant. Il faut surveiller les graminées pour décider de la première coupe. L’ennemi, c’est l’épi. C’est la graminée qui donne les UFL dans cette première coupe. Une courte fenêtre météo peut suffire. Le rendement étant faible, de 2 t de MS/ha, le fourrage sèche plus vite. La fauche précoce permet d’améliorer l’autonomie en protéine, et donc de réduire les besoins en concentrés azotés. Mais cela implique une hausse de la surface en prairie pour la fauche.

Pascale Le Cann
Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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