Intérêt des micro-algues : des résultats encore mitigés

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Recherche. Le profil du lait en acides gras oméga 3 peut être amélioré par l’apport de micro-algues. Mais la production et la matière grasse sont pénalisées. Les expérimentations se poursuivent néanmoins pour tenter de lever ce frein majeur.

L’introduction d’acides gras, intéressants pour la santé humaine, dans l’alimentation des vaches laitières est un moyen d’améliorer la qualité nutritionnelle du lait. Cela se pratique depuis au moins vingt ans avec l’apport de graines de lin extrudées. « Ce marché se développe doucement, admet Guillaume Chesneau, directeur recherche et innovation chez Valorex. Nos ventes représentent aujourd’hui environ 60 000 tonnes, dont la moitié à destination des ruminants. »

Des essais menés à l’Inra de Rennes ont montré une augmentation de 0,3 % de l’acide alpha-linolénique dans le lait, chez les vaches dont l’alimentation est enrichie en graines de lin extrudées. Pour tenter d’améliorer l’efficacité du transfert de ces acides gras, ces essais ont également consisté à tester des graines de lin extrudées riches ou pauvres en fibres, et/ou des micro-algues riches en DHA.

Fermentations ruminales très perturbées

Le DHA est un acide gras essentiel de la famille des oméga 3 utilisé en alimentation humaine. Il est issu de l’acide alpha-linolénique qui n’est synthétisé que par des végétaux et des algues.

L’apport de graines de lin riches ou pauvres en fibres ne montre pas d’effet significativement différent de l’apport de graines de lin classiques. Elles sont bien valorisées par les vaches laitières ; le lait est enrichi en acide alpha-linolénique ; il a de bonnes aptitudes à la transformation beurrière et fromagère ; les produits obtenus ont de bonnes propriétés sensorielles.

« Il y a un potentiel de variation des teneurs en fibres dans les graines que l’on peut accentuer à l’aide des procédés technologiques. Nous allons proposer prochainement de ­nouveaux produits plus ciblés selon les espèces animales », ­confie Guillaume Chesneau.

De leur côté, les lots ayant reçu des micro-algues riches en DHA montrent bien un enrichissement du lait en acide gras DHA. En revanche, ils subissentune forte diminution de la production laitière et de la teneur en matières grasses du lait : jusqu’à 6 kg de lait en moins par jour et 18 g/kg de taux butyreux. Dans ces deux lots, la taille des globules gras a été significativement réduite, tandis que la quantité d’acides gras libres initiaux et la lipolyse spontanée ont été augmentées. Résultat : la fabrication de beurre n’a pas été possible. La fabrication de fromages (de type pâte pressée cuite) a pu être réalisée, mais ceux-ci ont été jugés moins colorés, plus ouverts, moins fermes, plus élastiques, plus granuleux et plus piquants. Les micro-algues ont probablement perturbé les fermentations ruminales avec un effet négatif sur la production laitière et sur la synthèse de la matière grasse.

Le projet Studima

« Nous souhaitons aller plus loin dans les expérimentations avec les micro-algues, annonce néanmoins Catherine Hurtaud, chercheuse à l’Inra de Rennes. En adaptant le dosage, il est peut-être possible d’augmenter la teneur du lait en DHA, sans effet négatif. » Une autre voie évoquée par la scientifique est l’utilisation de résidus de micro-algues issus de leur raffinage.

La société Greensea, basée sur la côte méditerranéenne, est spécialisée dans la culture des micro-algues pour les marchés de l’aquaculture, la cosmétique et des compléments alimentaires. Elle est chef de file du projet Studima (1) qui vient de démarrer pour trois ans avec l’Inra de Tours. Son objectif est de développer l’utilisation des micro-algues en tant qu’additifs à destination de l’élevage (porcs, volailles et vaches laitières).

La santé plus que la nutrition

« Les applications concerneront davantage la nutrition-santé que la nutrition seule, estime le directeur Jean-Paul Cadoret. Parce que  les algues ont des mécanismes de défense énormes et que l’utilisation en nutrition serait trop ­coûteuse. Cependant, on peut imaginer une valorisation complémentaire des coproduits en alimentation du bétail. »

Partenaire de Studima, la société bretonne Olmix commercialise déjà des produits à base d’algues pour la santé du troupeau bovin : prévention des troubles métaboliques chez les vaches laitières et des troubles digestifs chez les veaux, gestion du risque mycotoxine, amélioration de l’immunité. « Nous n’avons travaillé que sur les macro-algues. Celles-ci sont beaucoup moins riches que les micro-algues en acides gras oméga 3, explique Danièle Marzin, directrice marketing. Dans le cadre de Studima, les effets des micro-algues sur les acides gras du lait font partie des pistes que nous étudierons. »

Nathalie Tiers

(1) Stimulation des défenses biologiques par les micro-algues.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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