
Depuis 2006, la ferme expérimentale d’AgroParisTech s’attache à réduire sa consommation énergétique et ses émissions de gaz à effet de serre. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que cela fonctionne ! En trois ans, la ferme a réduit de plus de 20 % ses émissions de Ges et de plus de 35 % sa consommation énergétique sur l’atelier laitier. Explications.
|
Son intégration permettrait sans doute de réduire d’autant les émissions réelles du secteur bovin-viande.
Il n’en reste pas moins que les pratiques agricoles sont régulièrement montrées du doigt par la société qui interpelle le monde agricole sur les problèmes de consommation d’énergie et d’émission de gaz à effet de serre (Ges).
Dans le cadre du programme Grignon Energie Positive (www.agroparistech.fr/energiepositive), AgroParisTech et sa ferme expérimentale ont choisi de mettre en pratique les principes de l’agriculture écologiquement intensive.
Simuler les effets et les valider par l’observation in situ
Avant de mettre en place quoi que ce soit sur l’exploitation, les scientifiques ont commencé par faire un bilan de la situation de manière à « inventorier l’ensemble des leviers d’actions permettant de découpler production, consommation d’énergie et émissions de Ges », détaille Thierry Bonaudo, enseignant-chercheur à AgroParisTech travaillant sur les impacts environnementaux des activités et produits d’élevage.
19 % d’émissions de gaz à effet de serre en moins en trois ans Entre 2006 et 2009, les consommations d’énergie et les émissions de Ges par litre de lait produit ont été réduites respectivement de 40 % et de 19 %. En 2009, la production laitière représente 30 % des consommations d’énergie et 35 % des émissions de Ges de la ferme. En 2010, ces réductions se sont encore accentuées comme l’indique le graphique ci-dessous.
La diminution du poste alimentation explique 85 % de la diminution des consommations d’énergie par litre de lait. « Nous avons diminué le coût énergétique des UF consommées de 38 % (2 MJ/UF en 2009) en maintenant dans les rations du maïs ensilage à bon rendement (13 t/ha), et en intégrant du foin de luzerne autoproduit et plus de pâturage », explique Thierry Bonaudo, enseignant-chercheur à AgroParisTech. Autre action menée : l’augmentation de la valeur énergétique de la ration (+7 %), notamment grâce à l’utilisation de tourteau de colza gras. « En plus d’augmenter la productivité par vache (9.600 litres de lait vendus/vache/an), nous essayons de rallonger la carrière des animaux (taux de réforme de 31,8 % en 2009) et de diminuer le nombre de génisses. » Enfin, le potentiel fertilisant des effluents est mieux valorisé, la part d’azote organique sur l’azote total est passée de 20,2 % en 2006 à 25,3 % en 2009. |
Pour valider les simulations, l’équipe a également mesuré in situ les principaux flux de matières et d’énergie de la ferme : consommation de d’eau, de gaz, d’électricité, de fioul « pour chaque type d’outil et opération culturale ».
Dans l’atelier laitier, des mesures complémentaires ont également été faites sur la valeur nutritionnelle et l’ingestion des différentes rations, ainsi que la production de lait. Sans oublier bien évidemment la production de méthane entérique des vaches.
Quant aux productions végétales, elles ont également été intégrées : itinéraires techniques (intrants, travaux), rendements par parcelle, fertilisation… « À l’aide de chambres statiques, nous avons également mesuré les émissions de Ges sur 8 parcelles, l’objectif étant d’avoir un suivi précis des consommations d’énergie et des émissions de Ges directes. »
Tableaux de bord
Les consommations et émissions indirectes ont été estimées pour les intrants et le matériel « grâce aux coefficients de bases de données reconnues ». Seul le stockage du carbone dans les prairies n’a pas été comptabilisé.
Toutes ces données ont été compilées dans un tableau de bord mis à jour mensuellement. Ce tableau a ensuite servi pour établir un diagnostic en routine, « mais également hiérarchiser les postes de consommations d’énergie et d’émissions de Ges et de repérer les anomalies (fuites, surconsommations…) ».
Les scientifiques l’ont également utilisé pour calculer des indicateurs d’efficacité « qui ont été interprétés en fonction de conditions climatiques spécifiques et d’itinéraires techniques ».D’importantes marge de progrès réalisées
La ferme expérimentale d’AgroParisTech La ferme est située au cœur du bassin céréalier parisien à très haut potentiel agronomique dans la commune de Grignon. Pour en savoir plus : www.agroparistech.fr |
En appliquant ainsi les actions identifiées comme permettant de réduire les émissions de Ges, les chercheurs d’AgroParisTech ont réalisé d’importantes marges de progrès. « Mais nous avions sous-estimé le temps nécessaire d’acquisition des connaissances et d’information du tableau de bord, à savoir 3 jours/mois dans notre cas », reconnait le scientifique.
Par ailleurs, « la mise en place de nouvelles pratiques, comme l’augmentation du pâturage, suppose aussi d’accepter des risques supplémentaires – rendements aléatoires des prairies en fonction du climat – et notamment des risques économiques », conclut-il.
Depuis 2009, ce cadre méthodologique est employé dans neuf exploitations engagées dans un réseau de démonstration animé par le Céréopa et Coop de France Ouest.
Pour aller plus loin Institut de l’élevage : www.inst-elevage.asso.fr. |
Retrouvez les palmarès des concours bovins du Space 2025
Dans le Cotentin, « nous vivons avec 30 vaches et 30 hectares chacun »
270 000 vaches dans le désert algérien, est-ce vraiment possible ? Un agronome décrypte
Madison sacrée grande championne Holstein sur le ring du Space 2025
Logiciel, lactosérum, pailleuse… 4 inventions d’éleveurs primées au Space
La FNSEA appelle à « une grande journée d'action » le 26 septembre
« Pas d’agriculture sans rentabilité ! », rappelle la FNSEA
Comment préparer une vache à la césarienne
Face à une perte de compétitivité inédite, accompagner davantage les agriculteurs
Quelles implications environnementales de la proposition de l’UE pour la Pac ?