
Une mauvaise détection des chaleurs sur des animaux à fort potentiel de production n’est pas sans impacter le résultat économique de l’exploitation. Démonstration.
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La synthèse de l’ensemble des études faites ces dernières années par rapport à la qualité de la détection des chaleurs chez la vache montre que cette détection est soumise à l’influence de nombreux facteurs impliquant la vache, l’éleveur et le système d’élevage.
Par ailleurs, la productivité laitière agit également de façon importante : les chaleurs sont peu exprimées et du fait du déficit énergétique qui lui est associé, le nombre d’ovulations peut être faible.
De fait, les troupeaux à fort niveau de production, notamment en race Holstein, sont plus exposés à une détection imparfaite des ovulations. En effet, ces Holstein fortes productrices expriment mal voire pas du tout leurs chaleurs : « l’absence d’expression de ces signes est plus fréquente et, lorsqu’ils sont exprimés, leurs intensité et fréquence sont diminuées », note Henri Seegers, de l’unité mixte « Gestion de la santé animale » à l’Inra, ayant travaillté sur « l’évaluation, par simulation, des effets technico-économiques de la qualité de la détection des chaleurs en troupeau laitier à forte productivité ».
Etablissement de différents scénarii
Pour permettre cette évaluation, un modèle de simulation bio-économique « initialement conçu pour l’étude des mammites » a été étendu. Objectif : prendre en compte les processus biologiques et intégrer des règles de gestion en matière de reproduction.
Dans ce modèle, plusieurs scénarii sont comparés :
- une référence : 70 % de chaleurs détectables détectées et 1 % d’inséminations hors période d’ovulation ;
- un défaut de sensibilité de la détection en vue de la première IA ;
- un défaut de sensibilité de la détection des retours en chaleurs ;
- un défaut de spécificité de la détection conduisant à plus d’inséminations hors période d’ovulation ;
- le cumul des 3 problèmes.
Ces différents scénarii sont testés sur un troupeau de 45 à 50 vaches produisant un quota de 450.000 litres et où l’achat d’animaux est limité.
Des paramètres poussés à l’extrême
« Nous avons délibérément choisi de pousser à l’extrême certains paramètres, comme le niveau de production est élevé (9.500 kg par vache présente-année), ou le taux d’animaux concernés par les problèmes de reprise ou de maintien de cyclicité en post-partum (50 %). Enfin, nous partons de l’hypothèse que 70 % des ovulations seulement sont accompagnées de signes détectables » détaille Henri Seegers.
L’impact de ces scénarii et de ces hypothèses est traité à la fois au niveau zootechnique.
Intervalle vêlage - 1ère insémination | Intervalle vêlage - insémination fédondante | |
Référence | 85 j | 116 j |
Défaut de la détection en vue de la 1ère IA | 109 j | 137 j |
Défaut de la détection des retours en chaleurs | 85 j | 122 j |
Défaut de la détection conduisant à plus d'inséminations hors période d'ovulation | 83 j | 119 j |
Cumul des trois problèmes | 109 j | 140 j |
Cette première approche montre qu’au plan zootechnique, pour une bonne fertilité intrinsèque, un défaut de 33 % de la détection de la première IA vient pénaliser à la fois l’intervalle vêlage/1ère insémination et l’intervalle vêlage/insémination-fécondante. « L’effet est de l’ordre de +7 jours pour une réduction de 10 %. »
Par contre, un défaut de détection des retours en chaleur semble moins pénalisant,, tout comme « l’effet d’une mauvaise détection conduisant à plus d’inséminations hors période d’ovulation ».
À noter que pour une mauvaise fertilité intrinsèque, un défaut de détection des retours en chaleur semble plus pénalisant.
Bonne fertilité | Mauvaise fertilité | |
Défaut de la détection en vue de la 1ère IA | -37 € /vache présente/année | -30 € /vache présente/année |
Défaut de la détection des retours en chaleurs | -10 € /vache présente/année | -32 € /vache présente/année |
Défaut de la détection conduisant à plus d'inséminations hors période d'ovulation | -4 € /vache présente/année | -14 € /vache présente/année |
Cumul des trois problèmes | -49 € /vache présente/année | -58 € /vache présente/année |
« Nous constatons que les tendances zootechniques se retrouvent au niveau économique, avec un poids d’une mauvaise détection de la première IA, dans le cas d’une bonne fertilité intrinsèque », poursuit Henri Seegers. « Ainsi, l’impact d’une réduction de 10 % de la détection de la première IA sur la marge par vache présente par année est de l’ordre de -15 €. Dans le cas d’une mauvaise fertilité intrinsèque, une mauvaise détection des retours en chaleur possède également un impact important et l’effet des inséminations hors période d’ovulation devient également plus visible. »
Bonne fertilité | Mauvaise fertilité | |
Défaut de la détection en vue de la 1ère IA | -413 €/100.000 l de quota | -314 €/100.000 l de quota |
Défaut de la détection des retours en chaleurs | -104 €/100.000 l de quota | -332 €/100.000 l de quota |
Défaut de la détection conduisant à plus d'inséminations hors période d'ovulation | -40 €/100.000 l de quota | -148 €/100.000 l de quota |
Cumul des trois problèmes | -520 €/100.000 l de quota | -607 €/100.000 l de quota |
Enfin, le cumul des 3 problèmes amène à des niveaux de réduction de marge toujours assez marqués, que ce soit au niveau de l’animal, ou ramené pour 100.000 litres de quotas.
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