
Mélanger des lots de porcs différents est toujours une opération délicate : en effet, le rassemblement conduit souvent à des interactions sociales ou combats, qui peuvent limiter la croissance des animaux.
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Chez un animal dominant, ces lésions seront localisées à l’avant du corps. Chez un dominé, elles seront situées à l’arrière, traduisant ainsi la soumission de l’individu. Toutefois, ces combats permettent également l’établissement d’une hiérarchie qui viendra favoriser par la suite la stabilité du groupe, au travers de relations neutres ou d’alliance durable entre les animaux.
L’agressivité a une base génétique
Des études ont montré que l’agressivité du porc avait une base génétique et un caractère répétable. « De plus, les deux types de caractères (lésions et agressivité) sont modérément à fortement héritables et sont génétiquement liés », détaillait Laurianne Canario (Inra/Suas) lors des 42e JRP, à Paris, en février dernier. « En revanche, les relations génétiques entre agressivité et vitesse de croissance sont peu documentées », précisait-elle.
Lors des mélanges, les porcs sont plus ou moins agressifs selon la limitation des ressources (espace, nourriture) qui leur est imposée et peut contribuer « à la part de variation héritable d’un autre caractère, tel que la vitesse de croissance », poursuivait Laurianne Canario, précisant que chez le porc, « les interactions sociales expliqueraient deux tiers de la variation génétique de la croissance ».
Définition d’un modèle social
« Le déterminisme génétique de la compétition pour la croissance est associé à de l’agressivité et à des relations de dominance, tandis que la coopération résulte de comportements d’évitement ou d’entraide. » De façon classique, lorsqu’on sélectionne pour un caractère, on considère sa valeur génétique directe, c’est-à-dire que la performance est mesurée directement sur l’animal, explique la spécialiste de l’Inra. « Avec les modèles d’association intra-groupe, on considère un effet génétique direct et un effet génétique association, comprenez social, correspondant à l’influence du porc étudié sur la performance, ici la croissance, des autres porcs qui sont élevés dans le même enclos d’engraissement que lui. »
En 2007, des chercheurs ont conçu une méthode permettant d’estimer les paramètres génétiques, « en définissant un modèle social comprenant un effet génétique direct propre, donc propre au potentiel génétique de l’animal, et un effet génétique associé aux membres du groupe ».
- L’effet génétique direct correspond à l’effet du génotype de l’individu sur sa propre vitesse de croissance ;
- L’effet génétique social correspond à la combinaison des effets des génotypes de ses partenaires de groupe sur la vitesse de croissance de l’individu concerné.
Par suite, un porc donné a une influence sur sa croissance propre et une influence sur la croissance de ses partenaires de groupe.
Evaluer les conséquences génétiques
La question est de savoir s’il est possible d’évaluer les conséquences génétiques de l’utilisation d’un modèle social pour la croissance sur l’agressivité des porcs ? Pour y répondre, une équipe de recherche comprenant l’Inra, le département de génétique animale suédois et le Scottish Agricultural College a mené une étude (lire ici l’étude en détail) sur des porcs tout juste mélangés et après l’établissement de la hiérarchie, entre 2005 et 2007.
« L’importance de la dynamique de groupe, qu’il s’agisse de compétition ou de coopération entre ses membres, a également été prise en compte. » Les résultats mettent en avant deux catégories de porcs favorables à la croissance de leurs partenaires : les porcs qui remportent plus de combat et ceux qui en perdent le plus.
Une sélection d’animaux dominants
Dans un élevage, il est courant d’observer une baisse de la fréquence des combats après le mélange des lots de porcs et lorsque la hiérarchie est établie. Si un éleveur sélectionne directement les porcs montrant un grossissement rapide, il favorisera leur succès au sein du groupe en sélectionnant des animaux destinés à être dominants. Etant dominants, ils vont naturellement être plus agressifs lors d’un mélange et déclencheront plus facilement des combats et autres bousculades. « Si la composante sociale est prise en compte, et qu’ils sont également sélectionnés pour leur aptitude à favoriser la croissance des autres membres du groupe, ils développent une aptitude au défi », précisait Laurianne Canario.
Retard d’établissement de la hiérarchie
Trois semaines après le mélange, la plupart des relations de hiérarchie sont supposées établies. « Nous avons montré que cette situation d’équilibre n’était pas atteinte dans cette population. Ainsi, la sélection pour la croissance favoriserait les porcs qui encore 3 semaines après le mélange, tentent d’échapper, non sans blessures, aux attaques déclenchées par d’autres porcs. Cette sélection favoriserait aussi les animaux qui passent en général moins de temps debout. » Cette agressivité peut également être amplifiée en cas de compétition, lors du mélange. En outre, l’essai montre qu’une sélection sur ce type d’individus retarde le moment d’établissement de la hiérarchie.
Enfin, les scientifiques ont mis en évidence que « les porcs qui ont une aptitude génétique pour la croissance des autres porcs sont davantage persécutés par des porcs dominants. Mais leur réaction serait de ne pas renchérir et de fuir ».
Pour aller plus loin : www.ifip.asso.fr.
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