L'oeil semble stoïque et le mouvement calculé : à Avoudrey (Doubs) la vache montbéliarde, blanche tachetée de brun, réagit à peine quand le vétérinaire la pique contre la fièvre charbonneuse qui sévit dans une vingtaine d'élevages du département.
A ses côtés, les clochettes d'une douzaine de bovins, ruminant avec entrain, résonnent en cadence. Rien ne saurait détourner les vaches du foin qui leur est présenté. L'heure est pourtant à la mobilisation. Depuis la fin du mois de juin, 21 élevages, sur un périmètre de dix kilomètres carrés ont été contaminés, l'un après l'autre, par ce bacille. Une quarantaine d'animaux ont été tués. Les agriculteurs sont sur les dents. "La maladie s'étend.
C'est à n'y rien comprendre", peste Daniel Prieur, président de la Chambre de l'agriculture du Doubs. "On a fait un cordon sanitaire et pourtant elle est passée au-dessus. Elle a même franchi un col de 1.100 mètres d'altitude", s'étonne-t-il.
« Le bacille peut vivre 100 ans dans la terre »
Maladie ancienne, le "charbon" était bien connu des vieux paysans, explique M. Prieur. "De temps à autre, il y a 40 ou 50 ans, il touchait un élevage. Mais il s'était éteint" en Franche-Comté, souligne le vétérinaire Patrice Perrin tout en vaccinant le cheptel, un pistolet-seringue à la main. La maladie avait toutefois été diagnostiquée dans d'autres régions françaises, comme Rhône-Alpes, où un "semblant d'épidémie" avait touché plusieurs fermes de Haute-Savoie il y a quelques années, remarque-t-il. Mais sa réapparition dans le Haut-Doubs est inexplicable. L'origine de l'épidémie est "probablement un charnier, où des animaux morts du charbon avaient été enterrés", suggère le vétérinaire. "Le bacille peut vivre 100 ans dans la terre. Si on retourne le terrain, il redevient actif", ajoute-t-il. Aucun charnier contaminant n'a pourtant été retrouvé. Pas plus que les vecteurs de transmission - insectes, gibier, vent, humain ... - n'ont été mis au jour.
Patrice Mercier, éleveur d'une trentaine d'années, a perdu en juillet quatre de ses bovins. "Pendant deux semaines, le temps que le vaccin fasse son effet sur les autres bêtes, on a vécu dans l'angoisse. C'était très lourd psychologiquement", raconte-t-il. D'autant que la maladie se transmet à l'homme. "Seulement aux personnes en contact avec des cadavres des vaches mortes", concède Patrice Perrin, "et les séquelles sont uniquement cutanées". Les éleveurs veulent donc réagir au plus vite, afin de préserver la filière laitière et fromagère doubienne. Ils ne manquent pas d'arguments pour rassurer les consommateurs. "80% des animaux touchés sont des génisses qui ne produisent pas de lait", affirme M. Prieur. Le bacille ne résiste en outre ni à la température de conservation du lait (4°C) dans les étables ni à celle de cuisson du fromage (53°C). "On a analysé nos produits. On n'a jamais rien trouvé dedans", se réjouit-t-il.
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