« L’élevage du taurillon sera complètement lié au marché et à son intérêt par rapport aux cultures »

Avec la réforme de la Pac, la production de viande bovine s’ouvrira à une régulation par les marchés. Comment engager une réflexion sur la pérennité de son atelier ? Quelles questions se poser ? Quels critères prendre en compte ? Conseillers et éleveur : des professionnels témoignent.

 James Gillon,chargé de mission à la Chambre d'agriculture du Morbihan,  résume la situation : « A partir de 2006, avec le découplage, il n’y aura plus d’aides spécifiques  pour les jeunes bovins. L’élevage du taurillon sera complètement lié au marché et à son intérêt par rapport aux cultures ». Ainsi deux questions se dégagent dans la réflexion sur l’avenir des ateliers naisseurs-engraisseurs de taurillons : le maintien de l’atelier et la taille du cheptel.

 

Carte d’identité : Serge Logodin, éleveur à Saint-Dolé (56)

2 UTH : Serge Logodin et son épouse

Un troupeau charolais inscrit au contrôle de performance :
- 75 vêlages/an, 25 à 30 taurillons engraissés/an, vente de reproducteurs
- 92 PMTVA

SAU : 85 ha
- 5 ha de maïs, 2 ha de betteraves, 12 ha de blé
- 66 ha de prairies temporaires

Un atelier porcin
- 448 places en engraissement, 230 places en post-sevrage

Le réseau d’élevage Bretagne Pays de Loire Deux Sèvres a travaillé sur le sujet et établi une matrice de correspondance de prix entre le gras et le maigre pour un équilibre de revenu entre l’engraissement et les cultures de ventes. « Par rapport à un prix du broutard à 800 € et un  prix de vente du kilo de carcasse du jeune bovin à 2,90 €, on obtient le même revenu qu’une culture de vente avec un maïs à 11,5 tonnes de matière sèche ou une céréale à 65 quintaux ».    


Matrice de correspondance entre le prix du maigre et du gras pour un équilibre de revenu entre l'engraissement et les cultures de vente (© Les réseaaux d'élevages bovins viande de Bretagne, Pays de la Loire et Deux-Sèvres)

Le revenu n’est pas le seul critère à entrer en ligne de compte. « Le taurillon transforme du maïs ensilage. Il nécessite un peu de trésorerie et du temps de travail. Si l’agriculteur n’a ni l’un ni l’autre, il choisira du maïs grain plutôt que la valorisation par des taurillons » explique James Gillon.

Adapter la productivité du troupeau à la productivité des surfaces

La suppression de la prime  à l’extensification va jouer un rôle dans la réflexion sur la taille du cheptel : la nouvelle référence deviendra les 170 unités d’azote. Explications d’Alain Guillaume, ingénieur EDE pôle herbivore, à la station de Mauron (56) : « Je reste persuadé qu’on peut progresser sur la valorisation des fourrages et plus particulièrement de l’herbe. Avec la suppression du complément extensif, un certain nombre d’éleveurs  auront intérêt à adapter la productivité du troupeau à la productivité des surfaces, donc peut-être à réinstensifier un peu. Ce n’est pas si évident que çà de désintensifier. Mais il y aura toujours un chargement limite à cause des 170 unités d’azote. » Serge Logodin, éleveur allaitant  à Saint-Dolé (56) confirme : « La suppression du chargement, c’est moins de contraintes. Nous pourrons être plus intensifs, mais nous seront bloqués à cause des 170 unités d’azote, puisque nous sommes déjà autour de 160 unités. »

La réflexion sur la taille du cheptel ne s’arrête pas là : « Le chargement est un critère qui n’existera plus : cela représente moins de frein à l’agrandissement. Cependant la production de viande bovine est très liée au sol, et une augmentation de cheptel sans foncier restera limitée » précise James Gillon. Il faut également considérer les contraintes des bâtiments : « Est-ce qu’il est besoin d’investir dans un bâtiment pour un éleveur qui a choisi la stratégie du prix de revient minimal ? » se questionne le chargé de mission. C’est le problème auquel se retrouve confronté Serge Logodin : « Nous avons le bâtiment pour engraisser, il est amorti. Nous avons les capacités de produire, nous allons sûrement augmenter un peu le cheptel. Cependant, nous seront peut-être limités  par les bâtiments, car si l’on augmente le cheptel, il faudra augmenter la capacité des bâtiments pour l’hiver. C'est aussi une charge de travail supplémentaire. Il faut voir jusqu'où on peut le faire nous ou partir sur un atelier plus gros et embaucher »

Investir dans un bâtiment ?

D’après Alain Guillaume, « jusqu’à aujourd’hui, les éleveurs n’ont pas remis en cause leur système ». Serge Logodin abonde dans le même sens : « Nous sommes dans le flou total. Pour l’instant nous avons le temps de réagir. On ne peut pas bouleverser toute une production du jour au lendemain ». Toutes les études réalisées jusqu’à présent ne sont que des hypothèses. Pour James Gillon, on peut tout de même dégager 2 grandes stratégies : « La stratégie pour la production standard, c’est des coûts de production les plus bas possibles. Ensuite, il y a ceux qui joueront le plus sur le prix de vente ; c’est-à-dire produire de la viande de qualité pour un marché de niches. Le prix de vente, sera le premier élément. ». 

L'important est de rester prêt à s'adapter : « Ce n’est pas parce qu’on a fait un choix en 2005 qu’il sera bon en 2006. Chaque exploitation est unique. Ce sont de plus en plus des choix liés à la problématique de l’exploitation ». Il poursuit sur son rôle vis-à-vis des éleveurs : « C’est de l’accompagnement de réflexion. Nous devons préparer des outils de veille. La gestion de l’entreprise au sens très large est un élément prépondérant. »

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,14 €/kg net +0,04
Vaches, charolaises, R= France 6,99 €/kg net +0,05
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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