Dans la perspective d’une baisse du prix du lait, la production fromagère fermière suscite un regain d’intérêt en termes de création de valeur ajoutée et d’emplois ; elle peut en effet constituer un moyen d’assurer la viabilité des exploitations. Moyennant des compétences, des investissements et du temps disponible, un atelier fromager peut engendrer une augmentation non négligeable du revenu. Explications
Au sommaire :
Dénomination fromage fermier
Exemples d'investissements
Seuils de viabilité et valorisation
Temps de travaux à réfléchir
Valorisation économique et ses limites
Contrôles de la qualité du lait
Précisions sur les locaux de fromagerie
Précisions sur la commercialisation des fromages
- Conditionnement
- Transport
- Vente
La dénomination fromage fermier
Elle ne s'applique qu'à des produits fabriqués par des techniques traditionnelles par un producteur agricole ne traitant que le lait de sa propre exploitation sur le lieu même de celle-ci.
L'utilisation du terme " fermier " ou " ferme " implique 4 conditions essentielles :
- La qualité du fabricant qui doit être obligatoirement un producteur agricole.
- Le lieu de production qui n'est autre que l'exploitation.
- Seul le lait produit sur l'exploitation peut-être utilisé ; les mélanges ou l'achat de caillé à l'extérieur ne sont pas autorisés.
- Le mode de production qui doit respecter les opérations suivantes : filtration lait, acidification éventuelle, emprésurage, caillage, moulage, égouttage (avec découpage et brassages éventuels), démoulage, salage, séchage, affinage.
Exemples d'investissements
Dans le cas d'une exploitation transformant 800 à 1 000 litres par jour, et ceci 5 à 6 fois par semaine, l'investissement a été de 152 000 € dont 70% de bâtiments et 30% d'équipements spécifiques à la fromagerie. Le lait transformé sur la ferme est ainsi valorisé à 0,93 € le litre.
Pour une plus petite exploitation, la construction d'un local de fabrication, destiné à une transformation bi-hebdomadaire et répondant aux normes sanitaires, nécessite en moyenne un investissement compris entre 21 300 € et 30 500 €. Le prix du matériel neuf oscille quant à lui entre 10 600 € et 23 000 €. Rajoutons à cela environ 5 330 € pour une salle d'affinage et entre 800 et 4 570 € pour un local de vente. Soit un total oscillant entre 38 000 € et 63 400 €.
Seuils de viabilité et valorisation
Il est nécessaire avant toute démarche de diversification, de se faire une idée du volume à transformer et à commercialiser.
Ainsi, on pourra connaître le seuil de production et les différents points de charges sur lesquels on pourra influer, certes, mais avec lesquels il faudra compter, à savoir :
Les charges de main-d'œuvre supplémentaire
Dans les 2 cas il faudra valoriser le temps nécessaire à la fabrication, stock, commercialisation, il est évident qu'il y aura plus de souplesse si la main-d'œuvre supplémentaire est essentiellement familiale.
Les charges de conditionnement, contrôle nécessaire à la commercialisation
Ainsi, si nous reprenons l'exemple cité ci-dessus, nécessitant un investissement de 152 000 € et en prenant les hypothèses suivantes :
Annuités sur 12 ans à 5,5 % |
17 600 € |
|
Entretien annuel |
3 400 € | |
Total |
21 000 € | |
Main-d'œuvre |
2,00 € / kg |
de produit fabriqué et commercialisé |
Conditionnement |
0,50 € / kg | |
Total |
2,50 € |
L'écart de valorisation entre le litre de lait vendu " laiterie " et le litre de lait transformé étant de 0,61 € soit 4,88 € / Kg commercialisé, l'équilibre se trouvera à :
21 000 € / (4,88 € – 2,50 €) = 8 823 Kg commercialisés, correspondant à environ 71 000 litres de lait transformés.
Cet équilibre est fluctuant en fonction de l'évolution de l'ensemble des paramètres et toujours dans cet exemple, sans toucher aux charges liées aux investissements et entretien, les seuils varient de 42 000 à 5 250 Kg en fonction de la variation des autres facteurs (tableau ci-dessous).
Charges M.O. + commercialisation |
Ecart de valorisation | |||
3 € / Kg |
4 € / Kg |
5 € / Kg |
6 € / Kg | |
2,00 € / Kg |
21 000 |
10 500 |
7 000 |
5 250 |
2,50 € / Kg |
42 000 |
14 000 |
8 400 |
6 000 |
3,00 € / Kg |
- |
21 000 |
10 500 |
7 000 |
3,50 € / Kg |
- |
42 000 |
14 000 |
8 400 |
En ce qui concerne les autres produits issus de transformation (yaourt, fromages blancs) on retrouve une valorisation encore plus élevée que pour des fromages ; cependant, ce genre de produits est considéré comme secondaire et est souvent transformé à moindre échelle, ce qui est fort dommage.
Prenons l'exemple d'une exploitation du Doubs vendant le kilo de fromage à 7,62 € (alors qu'un même produit coûte près de 10 €/kg en grande surface) qui parvient à valoriser ainsi son litre de lait à 0,93 €, mais valorisé à 2 € en faisant du fromage blanc et à 2,80 € en faisant du yaourt.
Des temps de travaux à réfléchir
Dans le cas de fromages non affinés, avec deux caillages par jour, le nombre moyen d'heures a été estimé à 1 200 - 1 500 heures pour une production annuelle inférieure de 8 à 10 Tonnes. Les fromages affinés sont encore plus exigeants ; s'ils sont vendus à des grossistes, il faut compter près de 1 700 heures pour 10 tonnes de fromage annuel et 3 200 à 3 600 heures pour une vente au détail.
La valoriation économique et ses limites
La valorisation du lait chez les fromagers est calculée en ramenant le chiffre d'affaires fromages au lait produit. Ce chiffre surprend parfois les éleveurs qui pensent vendre leurs produits plus cher... Entre le prix de vente réel et la valorisation du lait telle que nous la calculons de nombreuses sources d'écart existent.
Avant être emprésuré, le lait produit est en partie destiné aux veaux et à la consommation familiale. En fromagerie, les accidents de caillage, de moulage, de séchage sont vite arrivés, il est donc important de quantifier les fromages jetés. Enfin, à la quantité de fromages vendus il faut retirer les fromages auto-consommés et offerts (dons ou promotions).
Lait produit, lait réellement vendu, les causes d'écart sont nombreuses. Des enregistrements précis chez quelques éleveurs ont montré que si pour certains l'écart était insignifiant, pour d'autres, il pouvait représenter plus de 35 % du volume produit et influer considérablement sur la valorisation du lait.
Contrôle de la qualité du lait
Le lait transformé est soumis à deux types d’analyses. Les premières sont classiques (taux, cellules, germes, butyriques). Comme par le passé, elles sont assurées par la laiterie. Les résultats servent également à la fromagerie.
Les secondes analyses relèvent de la sécurité alimentaire. Dans le cadre de l’autocontrôle, la fromagerie effectue chaque trimestre un prélèvement par famille de produits. Chaque échantillon est analysé sur salmonelle, Escherichia coli et Staphylocoque aureus. Une telle analyse revient à environ 69€. La Direction des Services Vétérinaires effectue un contrôle analogue une à deux fois par an.
Lait destiné à la production de produits " au lait cru " |
Lait destiné à la fabrication de produits à base de lait | |
Teneur en germes par ml à 30°C |
100 000 |
100 000 |
Titres en cellules somatiques par ml |
400 000 |
400 000 |
Staphylocoque aureus : |
|
- - |
Normes applicables à la production de lait cru
La réglementation impose que les établissements de transformation et les produits soient contrôlés de deux façons : par des contrôles officiels et par des auto contrôles.
Les contrôles officiels sont effectués par les services officiels départementaux (D.S.V., D.G.C.C.R.F.). Les autocontrôles réglementaires sont obligatoires et sont effectués par le producteur et à ses frais.
Afin d’adapter la fréquence et le coût des auto contrôles au volume produit, on s’est basé sur des tranches de volume de production :
Transformation journalière |
Contrôles officiels |
Auto-contrôles |
< 200 |
1 par an |
Au mini. 2 par an |
De 200 à 500 |
2 par an |
Au mini. 3 par an |
> 500 |
3 par an |
Au mini. 4 par an |
Quelques précisions sur les locaux de fromagerie
Les locaux de fromagerie doivent être fonctionnels, pour permettre de travailler dans de bonnes conditions, et conformes à la réglementation.
Leur agencement doit non seulement être réfléchi en fonction des types de fromages produits, mais également en fonction de l’environnement, tout en respectant le principe de la " marche en avant " (séparation des étapes de fabrication sans retour sur les étapes précédentes).
Le nombre de pièces, leurs dimensions et les équipements doivent être adaptés aux volumes traités ainsi qu’aux types de fromages produits. Trois pièces sont nécessaires au minimum pour les petits volumes : un sas, une salle de fabrication, et un local de fabrication.
En cas de vente directe à la ferme, un local de vente séparé est nécessaire.
Les démarches administratives à suivre sont les suivantes : Après la réalisation d’un plan soumis aux entreprises et administrations, demander un certificat d’urbanisme en mairie (accès, eau, électricité, …), soumettre le projet aux Services Vétérinaires et demander un permis de construire.
Quelques précisions sur la commercialisation des fromages
Conditionnements
En ce qui concerne le conditionnement, les fromages vendus en libre service doivent être emballés. L’emballage doit présenter des caractéristiques techniques adaptées à chaque type de fromage et à son mode de commercialisation. Un mauvais emballage dégrade la présentation et la qualité des fromages. Outre leurs fonctions de protection et de présentation, les emballages doivent également être commodes pour le distributeur et le consommateur et doit être résistant au déchirement.
Les emballages doivent bien évidemment être de qualité alimentaire (papiers sulfurisés, films en polymères de synthèse, aluminium)
Transport
Les fromages doivent être transportés dans des conditions permettant d’assurer le maintien des qualités sanitaires et organoleptiques des produits jusqu’à la vente au consommateur final. Toute rupture de la chaîne du froid entraîne une dégradation des fromages préjudiciables tant sur le plan bactériologique que gustatif.
Engins isothermes, frigorifiques, réfrigérants, sans isolation thermique (simple protection hygiénique), ou voitures boutique sont agréés pour le transport des fromages.
Pour les petites quantités de fromages à transporter(<250kg), l’utilisation d’engins n’est pas obligatoire ; la protection hygiénique sera assurée par des emballages assurant une protection hygiénique (glacières, …) permettant de respecter une limite maximale de températures à ne pas dépasser (6°C pour les fromages frais, 8°C pour les pâtes molles, 15°C pour les pâtes pressées).
Vente
L’apposition d’une marque de salubrité sur l’étiquette des fromages est nécessaire pour pouvoir vendre, sauf si cette dernière s’effectue sur le lieu de production ou sur des marchés de proximité. Cependant, la vente quelque soit sa forme, doit s’effectuer en respectant des conditions d’hygiène pour l’entreposage, la présentation et le conditionnement des fromages.
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