Les producteurs de comté s'organisent pour éviter la surchauffe du marché

Voir la production de comté inonder le marché et se banaliser : une hantise pour les fabricants de la première AOC fromagère française, inquiets, en cet automne, des menaces de surproduction.

"Nous sommes passés d'une production de 30.000 tonnes de comté dans les années 80 à 46.000 tonnes aujourd'hui. Même si nos ventes sont en hausse constante depuis plusieurs années, on peut dire qu'il y a aujourd'hui 2.000 à 2.500 tonnes de fromage en trop qui pèsent sur le marché", explique Claude Vermot-Desroches, producteur laitier dans le Doubs et président du Comité interprofessionnel du gruyère de comté (CIGC).

Pas encore de crise de surproduction donc, mais un emballement du marché aux conséquences redoutées : "fournir de grandes quantités de comté, c'est donner la possibilité à la grande distribution de faire pression sur les prix, ce qui nous conduirait, pour produire moins cher, à industrialiser la production à outrance au point de pervertir le goût du fromage", poursuit M. Vermot-Desroches.

Le phénomène est même désigné sous le nom d'"emmentalisation" en référence à l'évolution de l'emmental suisse dont la tradition, pour n'avoir pas su se protéger, a été sacrifiée à la rentabilité, estiment les spécialistes.

Appellation d'origine contrôlée depuis 1952, le comté est, en volume, la première AOC de France et s'appuie en Franche-Comté, principale zone de production, sur 3.200 producteurs de lait, 190 fruitières - ou coopératives - de fabrication et une vingtaine de maisons d'affinage.\n Avec une rémunération du prix du lait nettement plus favorable que pour le reste des produits laitiers, le comté représente une production prisée des producteurs de lait au risque de renforcer la pression sur les quantités.

"Au cours des dernières années, beaucoup de fabricants d'emmental grand cru du Doubs se sont mis à faire du comté, il a fallu gérer leur arrivée sur la zone AOC", témoigne Maxime Brun, salarié des fromageries Brun à Poligny (Jura), la "capitale du comté".

Pas facile dans ce contexte de réguler la production. Le CIGC vient d'appeler les acteurs de la filière à faire preuve de "civisme" et a invité les producteurs de lait à détourner 2% de leur production vers d'autres fabrications en échange de compensations financières.

Gérard Aymonier, président de la Fédération des coopératives laitières (FDPL) du Jura veut croire que le mot d'ordre sera suivi, même si, explique-t-il, "il s'agit d'une contrainte de rentabilité et d'organisation pour les petites coopératives laitières".

"On sait qu'on est tous dans le même bateau et qu'on serait tous touchés par une baisse des prix du comté", estime Pierre-François Bernard, président de la FDPL du Doubs.

Mais la filière comté espère également agir sur les ventes du fromage et a prévu d'investir 1,5 million d'euros pour une prochaine campagne nationale de publicité.

Pour Véronique Rivoire, de la maison d'affinage Rivoire-Jacquemin à Montmorot (Jura), "les discours actuels sur les régimes, la santé, risquent d'effrayer le consommateur qui voit le comté comme un fromage gras, à nous d'en démontrer les vertus!".


Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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