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« Surveiller le début de lactation pour agir vite avec des VHP »

Les courbes de production individuelles fournies par le robot de traite constituent un indicateur de santé précieux, dans le cadre du suivi en début de lactation.

À la tête d’un troupeau de vaches hautes productrices, en robot de traite, Vincent Ory n’hésite pas à réaliser un examen clinique complet, dès les premiers signes de décrochage de la production en début de lactation.

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Vincent Ory a le profil de l’éleveur très technique, voire pointilleux. « Je trouve ma motivation dans la recherche d’expression du potentiel de mes animaux », témoignait-il dans L’Éleveur laitier n° 350 du mois de janvier, dédié à l’alimentation de précision. Dans cette logique, le début de lactation d’un troupeau à plus de 13 000 litres de lait de moyenne mobilise une attention particulière. Vincent a souscrit un suivi de reproduction tous les quinze jours avec son cabinet vétérinaire. Entre deux passages du praticien, les courbes de production individuelles fournies par le robot de traite sont un indicateur de santé précoce : la montée en lait doit être régulière jusqu’au pic, vers 45 jours. Une courbe qui décroche ou fait un plateau constitue une alerte qui le conduit à réaliser sans attendre un examen clinique de l’animal concerné. « L’examen ne se limite pas à la mesure des corps cétoniques. Il faut aussi aborder les pathologies pouvant être la cause ou la conséquence de la cétose : mammite, métrite, déplacement de caillette à gauche… C’est grâce à mon vétérinaire, aujourd’hui à la retraite, que j’ai pu développer avec l’expérience un sens clinique à travers la mise en œuvre de ce prédiagnostic. »

Le raisonnement précède toujours le traitement

L’intervention commence toujours par une prise de température, suivie le cas échéant d’un test CMT et d’une observation des bouses, pour ne pas passer à côté d’une mammite aiguë ou d’une diarrhée infectieuse, « une forte diarrhée pouvant aussi être signe d’une caillette baladeuse ». Pour détecter le risque de retournement de caillette, Vincent réalise une auscultation au stéthoscope. Il effectue aussi une prise de sang sous la queue pour mesurer la présence de corps cétoniques et la glycémie, révélateurs précoces de cétose. « Avec des VHP, il faut agir vite et fort. C’est pourquoi, en cas de cétose, je privilégie la perfusion qui est d’ailleurs plus pratique à mettre en œuvre que le drenchage. » (voir l’infographie ci-dessous).

Vétérinaire dans le Pas-de-Calais, spécialiste de la reproduction bovine, Claude Joly valide la pertinence de cette approche. « Il s’agit d’une prise en charge adaptée d’un problème clinique, après un examen général de l’animal, commente-t-il. En effet, avant de passer à la perfusion, il faut d’abord recueillir des informations. Le raisonnement doit toujours précéder le traitement. L’étape suivante est la détection des problèmes subcliniques, à travers le suivi de quelques paramètres. »

Intérêt de l’examen clinique en semaines 1 et 3

Entre deux passages du vétérinaire prévus dans le cadre du suivi de reproduction, le praticien met en avant l’intérêt pour les éleveurs du protocole préventif de suivi post-partum S1 et S3 : c’est-à-dire, chaque semaine, faire un examen clinique des vaches qui ont vêlé au cours des sept derniers jours et de celles qui ont vêlé depuis vingt et un jours. L’enjeu : être plus réactif, pour ne pas intervenir dans l’urgence.

"Avec des VHP, l'enjeu est d'agir vite, même s'il y a parfois un décalage entre la théorie et la réalité du travail sur le terrain", admet Vincent Ory. (© Jérôme Pezon)

Cet examen en S1 et S3 comprend toujours une prise de température : une température supérieure à 39 °C met en alerte sur le risque d’infection dont l’origine peut être diverse, surtout à la suite d’un vêlage difficile (mammite aiguë, métrite, péritonite, diarrhée infectieuse…). C’est pourquoi, la mesure doit être associée à un examen de l’état général de l’animal. Le test CMT est alors un moyen de détection précoce d’une mammite aiguë. L’observation des sels, voire la fouille rectale, permet aussi de détecter l’apparition d’une diarrhée infectieuse, qui devra conduire à contacter son vétérinaire sans attendre. « Mais, si la vache a de l’appétit, que son état général est bon, je continue simplement de suivre l’évolution de sa température. Il peut s’agir d’une hyperthermie momentanée », note l’éleveur. Le dosage des BOH (B-Hydroxybutyrate) sanguins est un révélateur précoce des vaches en situation de cétose subclinique. Pour rappel : en semaine 1, le taux maximal de BOH est de 1,1 mmol/litre ; en semaine 3, de 1,3 mmol/litre (la tolérance est un peu plus élevée à l’approche du pic de lactation). Une teneur supérieure justifie une mesure de la glycémie, pour une prise en charge adaptée selon le protocole défini avec son vétérinaire. « La perfusion n’est pas toujours nécessaire. Un apport curatif d’énergie de type propylène par voie orale à dose thérapeutique, pendant deux à trois jours matin et soir, peut permettre de rétablir le métabolisme, avec une nouvelle analyse après 48 heures pour confirmation. » Enfin, parmi les gestes de l’éleveur infirmier, un examen vaginal permettra d’évaluer l’état de l’involution utérine, en vue d’une mise rapide à la reproduction.

Poser les bases d’une expertise technique

L’examen clinique repose sur des gestes simples qui se perfectionnent auprès de son référent technique. Par exemple, noter les informations recueillies pour chaque animal sur un planning, fait partie d’une démarche de professionnalisation et pose les bases d’un échange avec son praticien pour identifier les facteurs de risques, en fonction des catégories d’animaux : avec plus de 10 % de décrochage en début de lactation lié à la cétose en semaine 1, il faut sans doute revoir la qualité de la préparation au vêlage ou les transitions alimentaires ; en semaine 3, si la courbe de production n’est pas celle attendue, il convient d’évaluer un potentiel problème alimentaire, de boiterie ou d’adaptation sociale pour les primipares.

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