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« Le pâturage, c’était LA condition d’installation du robot sur la ferme »

La mise en place du robot de traite a permis à Julien Mativet de maintenir un atelier laitier sur l'exploitation.

À Rougnat, dans la Creuse, Julien Mativet s’est installé en 2023 sur l’exploitation où il était salarié. Bâtiment vieillissant, manque de main-d’œuvre : rien ne poussait au maintien du lait sur la ferme. Mais l’association robot et pâturage, couplé au PCAE porté par la région Nouvelle-Aquitaine, a redonné le goût du lait aux exploitants.

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« À mon installation, je devais arrêter le lait », lance Julien Mativet, éleveur de vaches laitières dans la Creuse. Avec Pierre Guilhen, son associé sur la partie chèvrerie, l’éleveur ne voyait pas d’avenir au bâtiment vaches laitières de l’exploitation. « Il n’était vraiment pas fonctionnel. Il fallait commencer la traite pour curer le bâtiment pendant que les vaches étaient dans le parc d’attente… », se remémore l’éleveur. D’autant qu’en s’installant, Julien remplaçait deux associés sur la ferme : « je ne me voyais pas gérer tout ça tout seul » tranche-t-il.

Difficile également d’envisager de gros travaux : « installé hors cadre familial avec la reprise à financer, je ne pouvais pas concevoir un réaménagement des bâtiments. On était tout de suite sur du 8 000 ou 10 000 € la place… Je n’avais pas les moyens », insiste l’agriculteur. L’arrêt du lait était acté, courant 2023, les Prim’Holsteins devaient laisser place aux vaches allaitantes.

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Mais la conjoncture laitière, plutôt porteuse en 2022, donnait quelques remords à Julien. À cela s’est ajoutée la mise en place d’un PCAE (Plan de Compétitivité et d’Adaptation des Exploitations agricoles) porté par la région Nouvelle-Aquitaine. L’objectif : subventionner la modernisation des fermes d’élevage. Si bien que Pierre et Julien ont pu commencer à songer aux travaux nécessaires pour garder le troupeau. Plutôt que de mettre les vaches dehors… ils ont investi pour les garder ! « Grace au PCAE, nous sommes passés d’une salle de traite 2 x 5 au robot de traite ».

Une porte de tri pour le pâturage

Mais pas question pour l’éleveur d’abandonner le pâturage. Avec 40 ha accessibles, la condition d’installation du robot de traite « c’était de faire pâturer », insiste l’agriculteur.

Le pâturage, c’est ce qui nous permet de maîtriser le coût alimentaire sur la ferme. Parce qu’une vache « c’est une barre de coupe à l’avant et un épandeur à l’arrière », aime à rappeler Julien.

Renseignements pris, les associés ont constaté que robot et pâturage ne sont pas incompatibles. « Il y a peu de systèmes du genre dans la région, mais c’est quelque chose qui est en train d’émerger », précise Martine Durant, conseillère bovin lait à la Chambre d’agriculture de la Creuse.

Côté pratique, « une porte de tri qui donne l’autorisation à la vache de sortir ou non selon l’intervalle de traite. Elles sont censées se faire traire toutes les 8 heures, si on est à plus de 85 % de l’intervalle de traite, la sortie est refusée », explique l’éleveur.

Depuis l’installation du robot, les exploitants ont gagné « l’équivalent d’une traite par jour en temps de travail ». Certes, il faut toujours être présent mais « le robot permet d’aménager ses heures ». Bien sûr il faut habituer les génisses à passer au robot et à la porte de tri, mais « ça fait partie du jeu, et puis certaines comprennent toutes seules en suivant le mouvement ».

Des vaches à 10 000 kg de lait

Depuis le passage au robot, la moyenne d’étable est passée de 8 000 kg/VL à 10 000 kg/VL. « Nous n’avions pas de DAC, alors le pilotage précis de l’alimentation au robot, couplé à l’augmentation de la fréquence de traite, nous a fait gagner environ 2 000 kg de lait par vache », estime Julien. Des aménagements ont également été faits sur la stabulation. Les matelas ont remplacé les logettes paillées, et un concentré de production a également été ajouté. « Nous sommes dans un contexte où l’on peut se permettre d’aller chercher quelques kilos de lait en plus », ajoute l’agriculteur.

« Sans distributeur automatique de concentré auparavant, nous étions typiquement sur le type de structure qui pouvait aller chercher des volumes de lait supplémentaires », détaille la conseillère.

Une ration de base à l’auge toute l’année

Côté affouragement, la ration hivernale se compose à 50 % de maïs ensilage et 50 % d’ensilage d’herbe. Une base qui permet d’ajouter 3 kg de tourteau de colza, et 3 kg céréales aplaties (blé, triticale autoproduits) par vache et par jour. La complémentation au robot varie ensuite selon le niveau de production.

Au fur et à mesure que la saison de pâturage avance, la ration à l’auge diminue. « Même au pâturage il y a toujours une base de maïs avec une partie des concentrés mélangés, qui viennent s’ajouter à la supplémentation personnalisée au robot ».

La ration d’été est exclusivement composée de maïs et de concentrés, « on fait diminuer progressivement la part d’ensilage d’herbe en visuel avec ce qu’il reste à l’auge ».

Le défi des 2 Smic/UMO relevé

« Une vache au pâturage produit peut-être moins de lait que si elle était en ration toute l’année mais ça coûte moins cher à produire, confient les associés, et puis le prix du lait permet d’acheter de l’aliment de production ».

Les chiffres parlent pour eux. Les données de l’outil Couprod pour l’année 2023 (avec seulement 6 mois de présence des robots) affichent un volume réalisé de 583 000 l de lait, « sur 2024, nous sommes mêmes à 640 000 l » précise Julien. Les agriculteurs ont pu compter sur une valorisation autour de 637 €/1 000 l toutes primes comprises, pour un coût de production intégrant deux smic par UMO autour de 597 €/1 000 l.

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