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Comment sont fixés les prix du lait ? Cap sur la Nouvelle-Zélande et les USA

Aux États-Unis comme en Nouvelle-Zélande, le prix du lait payé au producteur est très corrélé aux cours des ingrédients laitiers. Pour autant, il n'est pas fixé de la même façon.

Les modalités de formation du prix du lait sont très variables selon les pays. En Nouvelle-Zélande, le groupe Fonterra mène la danse, en « préfixant » un prix en début de campagne et en l’ajustant au fil des mois en fonction des cours des commodités. Aux États-Unis, un système de péréquation lisse les prix payés chaque mois aux éleveurs d’un même bassin de production.

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En 2024, les prix du lait à la production étaient plutôt orientés à la hausse dans les grands bassins laitiers mondiaux, soutenus par une offre laitière « globalement contrainte ». Une tendance commune qui cache pourtant des mécanismes de formation des prix très différents selon les pays, a expliqué l’agroéconomiste Baptiste Buczinski lors du Grand angle lait organisé par l’Idele début avril.

Il rappelle qu’en France comme ailleurs, il n’existe pas ou peu de marchés spot du lait à la sortie des élevages, avec des prix fluctuant quotidiennement en fonction de l’offre et de la demande, car le lait est « périssable, lourd, avec un coût de transport assez important et des éleveurs le plus souvent captifs de leur collecteur ». Le marché spot est plus répandu entre laiteries pour gérer les excédents ou les besoins, mais reste « plutôt limité, avec des prix et des volumes confidentiels ».

« Le prix du lait est le plus souvent fixé au mois le mois, parfois à la semaine, et plus rarement en début de campagne ». Partout, deux composantes majeures entrent dans le calcul : la qualité sanitaire couplée à la composition (matière grasse et protéines), et la valorisation commerciale des produits laitiers fabriqués.

Il évoque l’exemple de la Nouvelle-Zélande, où la production est « calée sur la pousse de l’herbe » : quasi-pas de collecte au moment de l’hiver austral (juin-juillet), puis cinq mois de pic qui concentrent les deux tiers de la collecte (septembre à janvier).

Fonterra définit le prix et le paye sur deux campagnes

Là-bas, le groupe coopératif Fonterra, qui collecte environ 80 % du lait néo-zélandais, définit le prix et le paye sur deux campagnes. En clair : il établit un prix prévisionnel en début de campagne, au mois de juin. À partir des premières livraisons, les éleveurs sont payés à hauteur de 65 % de ce prix pendant plusieurs mois, le temps d’affiner les niveaux de prix et permettre à Fonterra de gérer la trésorerie. Les niveaux de paiement progressent ensuite et, une fois le calcul final effectué, versés en totalité en octobre de l’année suivante.

Le calcul de ce prix payé aux producteurs, appelé Farmgate Milk Price, repose sur une modélisation : toute la collecte est théoriquement transformée en cinq produits de base de référence (poudre grasse, poudre maigre, beurre, matière grasse anhydre et babeurre en poudre). Et puis ces volumes sont multipliés par des prix issus de la plate-forme Global Dairy Trade, ce qui, après déduction de charges liées à Fonterra, permet de définir un prix de campagne.

Cette méthode conduit à « un prix globalement uniforme, à qualité équivalente, mais très volatil car très lié aux évolutions des cours des commodités laitières ». Ainsi, la flambée des prix du beurre de ces derniers mois a mécaniquement soutenu les prix payés aux producteurs.

Aux États-Unis aussi, le prix du lait est très lié à celui des ingrédients laitiers. Mais il est fixé de façon bien différente : à rebours de son image libérale, le pays dispose d’un système très réglementé et équitable. Tous les producteurs d’un même bassin, bien que dépendants de nombreux opérateurs, perçoivent chaque mois un prix identique à composition et qualité sanitaires similaires, indépendamment des débouchés de leur laiterie. Seul bémol : le transport est à la charge de l’éleveur.

Les Milk Marketing Orders font caisse de péréquation

Cette homogénéité repose sur les Milk Marketing Orders (MMO), des structures auxquelles la plupart des États producteurs a adhéré et qui régulent environ 85 % de la collecte nationale. Les transformateurs vont payer le lait plus ou moins cher selon l’usage final du lait, mais les MMO assurent un prix de base unique aux producteurs en faisant caisse de péréquation.

En tout, l’Idele a analysé les mécanismes de formation des prix du lait dans dix pays : France, Allemagne, Pays-Bas USA, Canada, Nouvelle-Zélande, Australie, Argentine, Chine et Inde. Résultat : « une grande diversité de situations » et « des approches diversifiées selon les pays pour stabiliser et réguler ce marché complexe ».

« Il y a des pays où les marchés sont très protégés, comme au Canada : la fixation du prix payé aux éleveurs dépend directement d’un coût de production calculé par l’administration », note Baptiste Buczinski.

(© Idele)

En France, la formation du prix « demeure toujours réglementée ». Elle dépend de la qualité sanitaire et de la composition du lait ainsi que de sa valorisation commerciale, avec un poids du marché des commodités laitières assez modéré (environ 25 % seulement du mix produit des transformateurs) face à celui des produits de grande consommation écoulés sur le marché national. Sans oublier les indicateurs de coût de production et de prix de revient publiés par le Cniel, « utilisés pour négocier et fixer contractuellement les formules de prix », note l’Idele.

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