Santé des veaux Le colostrum, de l’or à boire
Depuis 2019, Virbac a mis en place un Conseil et Observatoire de la Qualité Colostrale (COQC). Après analyse de plus de 7 000 colostrums issus de 211 élevages, les résultats montrent que c’est la totalité de la vie de l’animal qui est influencée par la qualité de ce premier lait.
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« Le colostrum, conditionne la future carrière du veau ». C’est ainsi que Thibault Devambez, vétérinaire, a résumé les travaux qui ont été réalisés par Virbac au sujet de ce premier lait. Les études montrent en effet que la qualité et la quantité de colostrum bue par le veau nouveau-né conditionnent non seulement sa santé immédiate mais aussi sa future carrière.
« À court terme, la prise d’un colostrum de qualité diminue fortement les pathologies néonatales, grâce au transfert d’immunité de la vache vers le veau », explique Thibault Devambez. Une étude, menée sur des veaux ayant reçu 2 ou 4 l de colostrum dans l’heure suivant leur naissance, montre que ceux qui ont reçu 4 l coûtent moins cher en frais vétérinaires que ceux qui n’ont eu que 2 l : 14,93 € par veau pour les premiers contre 23,94 € par veau pour les seconds. Le GMQ est également plus élevé : 230 grammes de plus pour les veaux ayant reçu 4 l. À long terme, l’effet est encore plus spectaculaire : 955 litres de lait supplémentaires en première lactation et 1 652 litres lors de la deuxième, pour les veaux ayant reçu 4 l.
Même si les échantillons de cette étude (Faber et al, 2005, "Effets de l’ingestion de colostrum sur les performances en lactation"), citée par Virbac, mériteraient d’être étoffés pour être plus robustes, ces observations renforcent ce que l’on savait déjà : l’administration du colostrum, en quantité, en qualité et le plus rapidement possible, est fondamentale.
Thibault Devambez ajoute qu’« un bon colostrum s’obtient dans les trois à cinq semaines qui précèdent la mise bas ». C’est en effet durant cette période de colostrogénèse que la santé de la vache et son alimentation conditionnent la qualité future du colostrum.
De nouvelles références de qualité du colostrum
Dans un objectif de suivi et de prévention de la santé des cheptels, Virbac a créé son propre observatoire du colostrum. Baptisée COQC (Conseil et Observatoire de la Qualité Colostrale), cette initiative, coordonnée par Thibault Devambez, a pour vocation de réaliser des suivis de colostrum en élevage. Entre 2019 et 2023, 7 332 colostrums de 211 élevages ont été prélevés et analysés. Les résultats ont été croisés avec les pratiques de l’éleveur telles que le déparasitage, les vaccinations, la saisonnalité des vêlages, etc.
Originalité de cette démarche : alors que les connaissances sur le sujet sont presque toujours obtenues par des études américaines, Virbac recueille des résultats sur des vaches françaises, qui sont de races différentes et n’ont pas les mêmes conditions de vie que les vaches américaines. Encore mieux, les vétérinaires participant au programme ont étudié des vaches de 15 races différentes et non pas seulement des Prim’holstein. Parmi elles, 56 % sont issues de races allaitantes, qui d’habitude ne sont pas incluses dans les recherches.
Du sélénium, un tarissement long et une administration précoce
Toutes races confondues, trois résultats importants sont issus des analyses. Il est d’une part confirmé que plus on attend après la mise bas, moins il y a d’anticorps dans le colostrum. C’est pourquoi la précocité de la première tétée est essentielle ; dans l’heure suivant le vêlage si possible et pas plus de six heures après. D’autre part, administrer du sélénium pendant le tarissement améliore la qualité du colostrum. Enfin, plus le tarissement est long, meilleur sera ce premier lait.
Les quantités d’immunoglobulines (IG) mesurées dans les échantillons se sont par ailleurs révélées très élevées. Là où les études américaines considèrent que le chiffre est excellent au-dessus de 50g d’immunoglobulines par litre, les vaches de l’échantillon testé produisent des taux d’IG régulièrement au-dessus de 100. Les valeurs qui définissent un bon ou un mauvais colostrum sont ainsi totalement remises en question et des références spécifiques aux allaitantes sont créées.
Témoignage d’éleveur : « gagner sur beaucoup de choses »
Alexis Roudier est éleveur de charolaises dans l’Allier. Installé avec son père, il conduit son troupeau en groupant ses vêlages (270 vêlages entre début septembre à fin novembre). En partenariat avec Pauline Carrié, sa vétérinaire, il a participé à l’étude menée par l’observatoire.
En 2021, des diarrhées néonatales ont provoqué une surcharge de travail dans la ferme et un surcoût sanitaire. Lors de cet épisode, des analyses ont montré la présence d’ E. coli F5 assortie d’une résistance à la gentamicine. À court terme, des traitements et une vaccination ont réglé le problème. Mais pour comprendre ce qui s’était passé à l’échelle du système, une série de prélèvements ont été réalisés : colostrums, sérum des veaux, évaluation de l’efficacité de la ration au tarissement, mesures de glycémie, corps cétoniques, urée et pH urinaires, profil métabolique des vaches en fin de gestation, exploration des carences en oligo-éléments et vitamines. Les résultats ont montré un déficit énergétique en fin de gestation ainsi que des carences en sélénium, en iode, en vitamine A et D3. Ces problèmes, fréquents lors des vêlages d’automne, expliquent un colostrum insuffisant, qui n’a pas offert aux veaux l’immunité dont ils avaient besoin.
En 2022, des mesures préventives ont été mises en œuvre pour améliorer ces chiffres. Résultat : un colostrum de bien meilleure qualité. « On a gagné sur beaucoup de choses », dit Alexis Roudier. Outre l’absence appréciable de diarrhée, il a en effet pu vendre ses broutards plus tôt et plus lourds. Il a aussi, par conséquent, tari ses vaches un peu plus tôt. Il observe aussi que le lien avec son vétérinaire est plus soutenu et qu’une véritable collaboration s’est instaurée. « J’appelle mon vétérinaire pour un suivi et de la prévention, pas seulement pour être urgentiste », explique-t-il.
En conclusion, Thibault Devambez préconise d’être exigeant. Il est certes conseillé, en combinant la teneur en IG du colostrum et la quantité donnée, d’apporter 200 g d’IG par veau. Cela permet une baisse significative de la mortalité. « Mais pourquoi se contenter de cela ? », interroge-t-il. Pour lui, « être vivant ne suffit pas ». Il faut aussi une meilleure santé et une meilleure croissance des veaux. Pour cela, il encourage les éleveurs à apporter au moins 300 g d’IG par veau. Il souligne aussi le fait que « plus les vêlages sont groupés et plus les veaux doivent être compétents sur le plan immunitaire. Et donc, plus le colostrum est important ».
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