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Journée des femmes rurales Laëtitia Rullier, éleveuse : « Il faut savoir tout faire ! »

« Quand on est responsable de son atelier laitier il faut savoir tout faire : détecter à l’œil les petites pathologies de ses animaux, inséminer, faire le parage, les perfusions et les vêlages », explique Laetitia Rullier.

Ancienne manipulatrice en radiothérapie, Laëtitia Rullier s’est installée sur la ferme familiale en 2020, à Lys-Haut-Layon (Maine-et-Loire). C’est elle qui est responsable de l’atelier vaches laitières, un métier parfois physique mais qu’elle assume sans difficulté. Difficile de trouver sa place en agriculture quand on est une femme ? Pas pour elle.

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Ce qui émane d’elle au premier regard, c’est son sourire éclatant. On se dit que Laetitia Rullier doit être épanouie dans son métier d’éleveuse. Ce mardi matin, elle s’est levée à 4h30, c’est une journée comme toutes les autres. Nettoyage des logettes, repaillage, alimentation des vaches, buvée des veaux, alimentation des génisses. À 7h30, retour à la maison pour le petit-déjeuner des cinq enfants, puis direction l’école. La suite sur la ferme, c’est le protocole de génétique, l’écornage, les clôtures, la paperasse, … Laetitia Rullier récupère les enfants à l’école à partir de 16h30, pause goûter, les grands aident les plus petits. Retour au boulot, la journée de travail s’arrête vers 19h s’il n’y a pas de réunion le soir, de vêlage ou de panne de robot.

Les journées sont denses, mais elle s’octroie des petits moments pour elle, comme ce cours de CrossFit, une heure par semaine. Un sport qui mixe fitness et musculation. Ce qu’elle veut, c’est garder la forme. Du haut de son mètre 73, Laetitia Rullier, 40 ans, ne manque pas de puissance. Les travaux d’élevage, ça entretient : « Quand je me suis installée, au départ, soulever mes deux seaux de lait je le faisais, mais quand je devais sortir tous les sacs d’aliment de 25 kg du Berlingo, au début je prenais mon temps, je devais faire des pauses ». Pour être éleveuse, il faut avoir une bonne condition physique, « savoir sauter par-dessus les barrières, courir après les bêtes même si c’est plus rare ».

Ancienne soignante à l’hôpital

Il faut aussi savoir trouver sa place, s’imposer. Au Gaec du Vieux chêne, au Voide (Lys-Haut-Layon, Maine-et-Loire), chacun est chef de son atelier. Son frère est responsable des cultures, sa mère a la charge de l’atelier chèvres. Elle, ce sont les vaches laitières (860 000 litres). Elle a rejoint la ferme en 2020, quand son père est parti en retraite. Lui, aurait préféré qu’elle garde son métier, plus rémunérateur. Car Laetitia Rullier a eu une autre vie professionnelle. Titulaire d’un bac scientifique et d’un DTS Manipulatrice en radiothérapie, elle travaillait depuis treize ans à l’hôpital d’Angers, quand elle est revenue sur l’exploitation familiale, après six ans de réflexion.

L’idée de s’installer germe dans son esprit quand elle attend son troisième enfant, en 2014. Elle suit d’abord une formation de technicien agricole, puis le Plan de professionnalisation personnalisé (PPP).

Être éleveuse seule sur son atelier, c’est apprendre à détecter à l’œil toutes les petites pathologies de ses animaux, les problèmes d’alimentation. C’est aussi se confronter au quotidien, apprendre à réparer une fuite d’eau sur un abreuvoir. « Il faut savoir tout faire ! » Elle insémine ses vaches, elle fait le parage, les piqûres, les perfusions, assure les vêlages. « Le parage, c’est un petit peu physique mais pas plus que cela ». Après tout, la meuleuse est électrique et l’animal est dans une cage de contention. Les vêlages ? « J’ai une vêleuse portative, un accessoire qui permet de sortir le veau sans trop forcer ». Bien sûr, le cardan de l’ancienne pailleuse à brancher sur la prise de force est assez lourd, mais à part ça, « les équipements sont quand même plus facile à manipuler qu’autrefois ».

« Il est là le patron ? »

Ce qui était plus difficile en revanche, c’était le regard des autres, « comme si j’avais baissé d’échelon ». Les amis, les collègues, les parents d’élève s’étonnaient : « Mais pourquoi tu as changé de métier alors que tu avais une belle situation ? ». Et puis les techniciens de passage sur l’exploitation n’étaient pas toujours habiles : « Il n’est pas là le patron ? » le patron c’était elle, et c’est toujours elle. Souvent, elle en rit avec le « groupe femmes » auquel elle participe avec la chambre d’agriculture. Un groupe d’éleveuses qui échange sur des sujets liés au bien-être animal (phytothérapie, ostéopathie) mais aussi sur d’autres thèmes comme la gestion du stress sur l’exploitation.

Elles témoigneront prochainement lors d’une table ronde sur l’installation des femmes en agriculture (1), pour inciter les jeunes à faire ce métier. Laetitia Rullier aimerait bien que l’agriculture soit moins dénigrée, qu’elle soit plus attractive.

Quand on la voit sourire, on se dit qu’elle exerce un métier passionnant.

(1) Soirée « Regards croisés » le 17 octobre à partir de 19h au Domaine de la Jousselinière au Pin-en-Mauges (Beaupréau-en-Mauges, Maine-et-Loire)

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