AUTOUR DU VÊLAGE, GARE AUX PETITES ERREURS LOURDES D'IMPACT
La maîtrise de la période autour du vêlage est essentielle dans la gestion d'un troupeau. Pour éviter toutes répercussions sanitaires et économiques futures, il suffit tout simplement de ne pas négliger les bonnes pratiques.
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PAR HABITUDE OU INCONSCIEMMENT, des éleveurs négligent certains points critiques de leur élevage, entraînant régulièrement les mêmes pathologies. Dans la période autour du vêlage en particulier, de petites erreurs peuvent avoir d'énormes répercussions sanitaires et économiques.
Maîtriser la préparation de la future laitière
• L'hygiène. Trop souvent, les vaches taries déclenchent des mammites aiguës et parfois mortelles lors des tarissements d'hiver. Les causes majeures sont directement liées aux conditions de logement négligées : paillage insuffisant, box surchargés, stress alimentaire dû au changement trop drastique de ration, pertes de lait pendant le tarissement sur des hautes productrices.
Les mécanismes de défense de la vache sont dépassés et la mamelle, qui n'est plus vidée lors des traites, devient un milieu très favorable à la multiplication des colibacilles, Klebsiella et autres bactéries très pathogènes. L'hygiène du logement est la première précaution à prendre lors des tarissements à la mauvaise saison (paillage, ventilation, chargement limité). L'injection de tubes intra mammaires au moment du tarissement doit être très hygiénique avec une désinfection préalable des sphincters, suivis d'un post-trempage. Toute mammite déclarée doit être cliniquement guérie au moment de la dernière traite avant tarissement. L'obturateur de trayon est la meilleure arme pour ce type de problème, avec le double avantage de diminuer l'incidence des mammites en début de lactation et de réduire la consommation systématique d'antibiotiques.
• L'introduction dans le troupeau. Des vaches taries ou primipares incorporées sans préparation avec les vaches en lactation peuvent souffrir des trop grandes modifications des conditions d'élevage et déclencher toute la panoplie des maladies du post-partum : acidose, cétose, déplacement de caillette, puis boiterie, infécondité… Le couchage dans des logettes peu confortables ou mal entretenues, le changement brutal de ration, les antagonismes sociaux envers des génisses timides sont des facteurs de diminution de l'activité et de l'appétit. Ils entraînent immédiatement une carence énergétique préjudiciable à la production dans un premier temps, puis à la mise à la reproduction plus tard. Le passage dans le troupeau en production doit se faire en limitant l'accumulation des différents stress. La transition alimentaire peut déjà se faire dans le lot de préparation au vêlage, les génisses peuvent être élevées dans des logettes dès la mise en reproduction.
Ces logettes seront par ailleurs adaptées à la taille des vaches et bien paillées, la place non limitée à la table d'alimentation et les abreuvoirs accessibles.
• L'alimentation. La ration des taries laisse souvent à désirer, tant au niveau minéral que dans l'équilibre azote-énergie fibres. Trop peu de fourrages grossiers et un excès d'ensilage entraînent des situations favorables aux déplacements de caillettes, à des engraissements excessifs, et sont souvent à l'origine de cétoses. Un excès de calcium peut également entraîner des fièvres vitulaires. Tandis qu'une quantité trop importante d'azote soluble ou de potassium favorise les oedèmes mammaires.
En distribuant un tiers de la ration des vaches en lactation, puis en l'associant à un fourrage fibreux et à peu de calcium, l'éleveur limite les dégâts lors de la période de préparation au vêlage.
Appréhender la mise bas de manière sereine
• Le vêlage. Trop souvent, les éleveurs ont une attitude impulsive sans se rendre compte de l'enjeu du moment : la vie et la valeur de la vache et celle du veau sont mises en jeu en quelques minutes. On considère que la traction d'une personne sur chaque patte du veau doit permettre d'extérioriser les boulets du veau et de voir apparaître le museau. La vêleuse ne doit être qu'une aide à l'extraction à l'étape suivante, mais en aucun cas elle ne doit servir à engager un veau. La force qu'elle exerce entraîne un risque de déchirures vaginales ou utérines graves, d'hémorragies, de péritonite, de mort du veau ou de la vache… On conseille de prendre le temps de dilater le col, la vulve et de ne pas engager à la main le veau lorsque la vache est couchée ainsi que savoir s'arrêter si « ça force ».
Il est toujours temps de faire une épisiotomie ou une césarienne, deux interventions beaucoup moins invalidantes que toutes les lésions précédentes et avec plus de chances de fécondité ultérieure.
• La prise colostrale. On a l'habitude de dire que le vêlage n'est pas fini tant que le veau n'a pas bu son colostrum. Malheureusement, bien souvent, il attend le lendemain matin pour avoir sa première buvée, ce qui est très préjudiciable pour sa santé future : diarrhées néonatales, infections ombilicales et respiratoires sont alors plus fréquentes et sévères.
Deux litres de colostrum trois fois sur les vingt-quatre premières heures sont à administrer au veau. Et si la mère n'en produit pas assez, l'éleveur utilisera celui qu'il a pris soin de conserver au congélateur.
• Les fièvres vitulaires. Certains éleveurs soignent eux-mêmes les fièvres de lait de façon plus ou moins rigoureuse. Avant tout, il est indispensable de s'assurer qu'il s'agit réellement de cette maladie, et non pas d'une mammite aiguë ou d'une paraplégie à la suite d'un vêlage difficile. La perfusion de calcium se fait préférentiellement dans la veine jugulaire avec une aiguille à usage unique. Elles sont d'un prix modique et permettent une injection plus facile et hygiénique. Le soluté doit être tiédi et perfusé sur dix minutes au minimum.
Une surveillance cardiaque doit être réalisée pour repérer une accélération du pouls de l'animal lorsque des doses toxiques de calcium sont atteintes. Pour cela, il suffit de poser la paume de la main derrière le coude gauche durant toute la perfusion et arrêter celle-ci lorsque la fréquence dépasse quatre-vingts battements par minute. Lors de rechute ou de non-guérison dans les six heures, il est judicieux d'en faire part à un vétérinaire. Seule une analyse sanguine permet alors d'orienter la suite du traitement.
Veiller aux premiers jours de lactation
• Les non-délivrances. La même erreur revient souvent : les éleveurs s'alertent lorsque la vache baisse en production avec des pertes vulvaires nauséabondes. À ce stade, les pertes en lait et le risque de péritonite sont déjà importants mais pas irréversibles. Inversement, certains s'acharnent inutilement à vouloir décrocher une délivrance qui ne vient pas. Deux solutions se présentent : prendre la température chaque jour et administrer un traitement antibiotique adapté si elle monte au-delà de 39,5°C. L'autre solution consiste à injecter préventivement un antibiotique à longue action dès le lendemain d'une non-délivrance constatée. De ce fait, le délai d'attente pour le lait ne dépasse généralement pas les sept jours obligatoires.
• L'alimentation lactée. Fréquemment, les éleveurs imaginent que la poudre de lait médicamenteux est un bon moyen de prévenir les diarrhées néonatales. En réalité, la bonne santé des veaux provient de la poudre de lait elle-même, qu'elle contienne ou non des antibiotiques.
Celle de bonne qualité est plus digeste que celle provenant de lait entier. En effet, la qualité de ce dernier est variable d'un jour à l'autre, parce qu'il provient souvent de vaches différentes à chaque traite, et qu'il est distribué à une température trop froide. Dans un contexte sociétal incitant à la maîtrise des consommations d'antibiotiques, la réduction peut déjà commencer par là ! D'autant plus qu'en général, la colistine est utilisée de manière systématique alors que cette molécule est la seule à ne pas connaître de bactéries qui y résistent ! Pour combien de temps encore ? Mieux vaut préférer une poudre de lait de bonne qualité sans supplémentation médicamenteuse.
• Les soins. Tenter des traitements au hasard en début de lactation coûte très cher en soins, en capacité à redresser une chute de production laitière mais aussi en perte d'état d'engraissement, qui entraîne une nette diminution des performances de reproduction ultérieure. C'est pourquoi en dehors de cas classiques que l'éleveur a l'habitude de traiter lui-même, l'intervention du vétérinaire est très rentable. Il choisira le traitement le plus adapté en fonction de l'animal à soigner et en tenant compte des délais d'attente. Dans certains cas trop avancés, il peut faire économiser des traitements inutiles ou illusoires.
GILLES HOERNER, VÉTÉRINAIRE DANS LA MOSELLE
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