ADAPTER L'HYGIÈNE À LA TRAITE ROBOTISÉE
Le robot bouscule les habitudes et les repères dans la lutte contre les comptages cellulaires et les mammites. Elle exige de la rigueur dans les pratiques d'hygiène et une surveillance régulière.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
JE SUIS TRÈS ATTACHÉ À UNE QUALITÉ DU LAIT TOUJOURS EN SUPER A. Elle est une composante essentielle de mon prix. Il n'est donc pas question que je renonce à douze ans de mesures d'hygiène après la traite, sous prétexte que je désire remplacer ma salle de traite par un robot », s'exclame cet éleveur de Haute-Loire qui réfléchit à investir dans un robot. « Or, si je me fie aux affirmations des constructeurs, en système de robot, empêcher les vaches de se coucher après la traite pour laisser le temps aux sphincters des trayons de se fermer serait une mesure à mettre aux oubliettes. Selon eux, comme les quartiers sont plus souvent vidangés, ils courent moins le risque d'être contaminés. »
Autre point qui inquiète cet éleveur : les produits pulvérisés sur les trayons après la traite ne sont pas à effet barrière. Ce sont des désinfectants.
« L'absence de post-trempage des trayons est une carence de la traite robotisée, confirme Anthony Basle, en charge du secteur robot chez Bretagne Conseil élevage 35. Cela nécessiterait un deuxième scannage de la mamelle, avec une perte de temps de traite à la clé. » Il recommande de choisir les produits pulvérisés les plus épais disponibles sur le marché pour créer un semblant d'effet barrière.
Les constructeurs sont bien conscients de ce problème. Les deux leaders Lely et DeLaval ont travaillé leur viscosité.
DeLaval met deux produits en avant, l'un iodé et l'autre à base de peroxyde d'hydrogène. Lely en a trois mis au point : deux sont iodés et le dernier à base d'acide lactique.
Sphincters. Diriger la vache vers la table d'alimentation
La fermeture des sphincters demande vingt à trente minutes selon les vaches. « En traite robotisée, elles sont sollicitées trois à quatre fois par jour. La fermeture est sûrement moins bonne en fin de lactation », précise Antony Basle. Empêcher la femelle de se coucher durant ce laps de temps est le levier classique utilisé pour respecter cet objectif. En circulation libre, le robot est installé à proximité de la table d'alimentation pour l'encourager à s'y diriger directement. Comme elle ressent le besoin de s'abreuver après la traite, des points d'eau astucieusement positionnés y contribuent. Une autre solution est le système de guidage en sortie de stalle par une porte de tri. L'animal est dirigé vers une partie de la table d'alimentation ou sa totalité. Dans ce dernier cas, cela suppose des logettes dos à dos en deux ou quatre rangées. Une porte dite intelligente assure le retour vers le couchage. Quel que soit le système de circulation des vaches retenu, dans tous les cas, il est indispensable de surveiller tous les mois les comptages cellulaires individuels
Robot. Mise en route avec un troupeau sain
L'obtention d'une qualité de lait super A ne se résume pas au posttrempage des trayons et à la fermeture de leur sphincter. « Un troupeau sain avant la mise en route du robot conserve son statut sanitaire, rassure Anthony Basles. En revanche, la situation s'aggrave si celle de départ n'est pas correcte. Il est donc impératif de se séparer de toutes les vaches leucocytaires. » De même, il faut réformer les femelles qui contractent des mammites à répétition même si entre deux rechutes, elles sont saines. « Cela signifie qu'elles guérissent bien. La consultation du carnet sanitaire permet d'identifier cette catégorie d'animaux. »
Trayons. Favoriser leur propreté et leur bon état
Veiller à ce que les logettes soient propres en les paillant régulièrement, en ôtant manuellement les bouses, en les asséchant et les désinfectant. Si le couchage est une aire paillée, là aussi veiller à un paillage régulier et surveiller la température de la litière pour éviter l'explosion des germes d'environnement. Certains éleveurs curent même une fois par semaine. « Faute d'un nombre de traites journalières suffisant, des pertes de lait peuvent humidifier les logettes et contribuer au développement de mammites. L'éleveur peut y remédier. Il suffit d'adapter le paramétrage d'admission de l'animal au robot à son niveau laitier ou son stade de lactation. » Le vêlage groupé des génisses peut conduire au même phénomène. L'accès ralenti au robot génère des pertes de lait, avec un risque de mammites à la clé. Plus globalement, la conduite en vêlages étalés évite ou limite les risques de « bouchons » devant la stalle.
- Tondre les poils de la mamelle : des bouses s'accrochent aux poils de la mamelle, ce qui peut être une source de contamination. Mieux vaut donc les tondre.
- Contrôler les trayons : en traite classique, l'agression mécanique des trayons, les gerçures provoquées par le froid, les sphincters inversés se repèrent facilement. Cette surveillance ne doit pas être négligée en traite robotisée. Il ne faut pas hésiter à vérifier l'état des trayons lorsque la laitière est dans la stalle.
- Paramétrer le nettoyage : l'éleveur peut s'éloigner du module standard de nettoyage des trayons et opter pour un paramétrage individuel. Pour les animaux plus sales, il peut demander un double lavage ou un brossage plus important.
- Changer les manchons trayeurs : un manchon en silicone est prévu pour 10 000 traites. Les éleveurs ont tendance à retarder son remplacement, ce qui amollit le silicone. Le passage brutal à un manchon beaucoup plus dur agresse le trayon. Il est donc impératif de respecter la norme de renouvellement.
- Régler la pulsation : l'autre source d'agression durant la traite concerne la pulsation de la machine à traire. Un contrôle une fois par an est demandé pour la salle de traite. Cette recommandation tombe à une fois tous les six mois pour le robot.
Mammites. Éviter d'infecter les autres animaux
Le robot amplifie le risque de contamination des animaux.par les griffes si une mammite n'est pas détectée assez rapidement. « Les données et les alertes mises à la disposition de l'éleveur peuvent brouiller les pistes. Par exemple, l'animal peut présenter un pic de conductivité sans déclarer de mammites. À l'inverse, sa conductivité peut être plate mais ses comptages cellulaires élevés. À lui de recouper plusieurs informations pour intervenir rapidement. » Ainsi, le pic de conductivité peut être provoqué par un quartier trait de façon incomplète. Un test manuel de la mamelle ou du quartier vérifiera si une mammite est déclarée. « Il faut contrôler très régulièrement et être rigoureux dans cette surveillance », insiste Anthony Basles.
- Prévoir 10 à 15 % de génisses de renouvellement en plus. La limitation du risque des mammites passe aussi par un taux de réforme un peu plus élevé qu'en système de traite classique. Des trayons mal guéris, une troisième récidive de mammites sont des motifs de réforme. Cela signifie disposer en amont d'un renouvellement suffisant. Si ce n'est pas le cas, l'éleveur a la possibilité de traire trois quartiers. « Attention, si l'un des quartiers arrière est asséché, il risque de se rapprocher de l'autre et semer la confusion dans la détection du trayon. Le branchement sera moins efficace. »
CLAIRE HUE
Pour accéder à l'ensembles nos offres :