Login

« LE NOMBRE DE DIARRHÉES DIVISÉ PAR QUATRE SANS UTILISER D'ANTIBIOTIQUE »

Nicolas Moulu et son père Gérard, aujourd'hui à la retraite.

Les associés de l'EARL Moulu soignent les diarrhées de leurs veaux à l'aide d'un réhydratant et d'un produit contenant deux protéines naturellement présentes dans le lait. Et pour limiter leur nombre, ils ont mis en place plusieurs mesures préventives.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

DOUBLEMENT DU NOMBRE DE VACHES, NURSERY sous-dimensionnée et mal ventilée, introduction de veaux extérieurs à l'élevage, tel est le cocktail explosif à l'origine d'une flambée de diarrhées à l'EARL Moulu. « Pendant l'hiver 2009- 2010, nous avons atteint un pic de 40 veaux pour un troupeau de 70 vaches », confie Gérard Moulu, ancien associé et aujourd'hui à la retraite. Avec l'aide du vétérinaire, cet élevage a mis en place des mesures préventives et a réussi à diminuer fortement le nombre d'animaux malades, sans utiliser aucun antibiotique.

Au printemps 2010, grâce à un test rapide sur les matières fécales, trois agents pathogènes sont identifiés : rota et coronavirus, ainsi que colibacille K99. Des analyses plus poussées au laboratoire confirment ce diagnostic et excluent la présence d'autres bactéries. Rapidement, toutes les mères sont vaccinées au moment de leur tarissement à l'aide du Rotavec corona*. Un dosage de glycémie dans leur sang indique une bonne prise colostrale des nouveau-nés.

Malgré tout, en attendant d'être immunisés par leurs mères, les veaux reçoivent du Locatim*, un concentré d'immunoglobuline sous forme orale dans les six premières heures de leur vie. « Au-delà de cette période, la capacité de l'intestin à absorber les anticorps régresse de 50 % », ajoute Alexandre Sibille, vétérinaire de l'exploitation.

« NOUS AVONS REMPLACÉ L'ALIMENT LACTÉ »

Quant aux veaux malades, ils sont soignés avec un réhydratant et Orolaze, un traitement alternatif à base de lactoferrines et de lactoperoxydases. Ces protéines, présentes naturellement dans le lait, possèdent un pouvoir bactéricide. De plus, elles ne détruisent pas la flore commensale, qui joue un rôle primordial au bon fonctionnement de l'organisme. « Ce produit s'administre à raison d'un comprimé matin et soir. »

Parallèlement, le vétérinaire demande à ces éleveurs de changer plusieurs de leurs pratiques. Tout d'abord, ne pas cesser la distribution de lait entier en cas de diarrhée. « Il convient d'en conserver un minimum afin de maintenir la présence de la lactase, une enzyme qui aide à la digestion du lactose. » Ensuite, il conseille un réhydratant miscible dans le lait, car l'ancien empêchait la formation du caillé dans la caillette. Enfin, il faut changer l'aliment d'allaitement. « Celui qu'ils utilisaient contenait du lactosérum. Or, cette protéine est inadaptée à des veaux de moins de trois semaines car elle est digérée trop rapidement dans la caillette. » Les associés l'ont donc remplacé par un aliment à base de poudre de lait écrémé.

D'autres moyens préventifs sont mis en place. Les veaux reçoivent un comprimé d'iode et de sélénium à la naissance puis trois jours plus tard. L'iode possède un effet bactéricide et aide l'animal à réguler sa température. Rappelons que l'optimum de confort thermique d'un veau dans sa première semaine de vie se situe entre 10 et 25°C. « En dehors de ces plages, l'animal gaspille de l'énergie pour maintenir sa température corporelle au détriment du bon fonctionnement de son système immunitaire. » Le sélénium aide à une meilleure utilisation de l'iode et à l'absorption du colostrum. Les veaux achetés sont isolés pendant deux mois lors de leur arrivée à la ferme. Ils font l'objet d'un dépistage systématique de la BVD.

« NOUS ALLONS SÉCURISER LA PRISE COLOSTRALE »

Aujourd'hui, ces mesures portent leurs fruits puisque seulement une dizaine de veaux ont contracté une diarrhée la saison passée, soit une division par quatre comparé au pic. L'objectif d'avoir moins de 15 % de morbidité est même atteint. Malgré tout, les associés ne souhaitent pas s'arrêter là. Ils comptent aménager une nursery à côté d'un nouveau bâtiment laitier. « Elle sera plus grande et mieux adaptée à la taille du troupeau », déclare Gérard Moulu. Les associés vont aussi cesser d'acheter des veaux. Grâce à l'augmentation de la taille de leur troupeau, le nombre de mâles nés sur l'élevage est dorénavant suffisant pour alimenter l'atelier de boeufs. « Ces éleveurs pourraient encore aller plus loin en sécurisant la prise colostrale », complète Alexandre Sibille.

Actuellement, les veaux sont laissés sous la mère de la naissance jusqu'à la prochaine traite. L'idéal serait de les séparer rapidement et de leur administrer 4 litres de colostrum dans les deux premières heures de vie, en les faisant boire ou à l'aide d'une sonde. L'utilisation d'un pèse-colostrum est également recommandée pour évaluer la qualité du produit, même si le résultat obtenu est semi-quantitatif. Et la mise en place d'une banque de colostrum permet de disposer, en permanence, d'un colostrum riche en immunoglobuline. « Il est conseillé de congeler celui des laitières en bonne santé, en troisième lactation et plus, et indemnes de BVD », déclare-t-il.

Quant à la vaccination des vaches, elle devrait se poursuivre afin d'enrichir le colostrum et lutter contre les trois agents pathogènes présents dans l'élevage.

NICOLAS LOUIS

* Médicament vétérinaire soumis à prescription

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement