LE PÉDILUVE EST D'ABORD UNE SOLUTION PRÉVENTIVE
Le recours au pédiluve est un élément de maîtrise de la Mortellaro. Mais lorsque la pression infectieuse est forte, il faut agir en amont sur tous les facteurs de risque.
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CONFRONTÉS À DES BOITERIES D'ORIGINE INFECTIEUSE, c'est-à-dire provoquées par la dermatite digitée (Mortellaro) ou par le fourchet (érosion du talon), de nombreux éleveurs ont pour premier réflexe de vouloir résoudre le problème avec un pédiluve. Or, si le pédiluve permet d'éviter les nouvelles infections, il ne soigne pas celles qui sont profondément installées. En d'autres termes, il s'agit davantage d'un outil de prévention. À ce titre, son efficacité passe d'abord par le respect de quelques règles de base, à commencer par des dimensions adaptées : une longueur au minimum de 3 m, afin que la vache trempe au moins deux fois chaque pied ; une largeur de 70 à 50 cm, le minimum pour économiser du produit ; une hauteur des bords latéraux de 20 à 25 cm pour éviter les gaspillages. Et au moins 12 cm de produits sont nécessaires pour en avoir 10 cm après le passage de tous les animaux, et ainsi assurer l'immersion complète des pieds.
L'EFFICACITÉ NE DÉPEND PAS QUE DU PRODUIT
Ensuite, le pédiluve sera installé le plus loin possible de la sortie de salle de traite, soit un minimum de 1,85 à 2 m/vache présente sur le quai de traite. En effet, elles marquent toutes un temps d'arrêt devant le pédiluve, ce qui peut créer des embouteillages sur le quai et ralentir la traite. Pour assurer la fluidité du passage des animaux, le sol du pédiluve doit être confortable, c'est-à-dire plat, non glissant et non bruyant. Voir des animaux circuler tête baissée est un bon indicateur de confort (la tête dressée est un signe de stress). Enfin, idéalement, il faut pouvoir faire passer les animaux en préparation au vêlage.
Concernant les solutions à mettre dans les pédiluves, de nombreux produits ont été mis en service : historiquement, des solutions à base de formol et de sulfate de cuivre. Le formol est un cancérigène avéré par inhalation et son emploi est interdit pour un salarié.
LES TRAITEMENTS INDIVIDUELS OBLIGATOIRES
Quant au sulfate de cuivre, il est désormais interdit pour son impact environnemental. Parmi les principaux produits disponibles à l'heure actuelle, on retrouve donc des solutions à base d'acide péracétique, comme le Dragonhyde, pratique grâce à son conditionnement en sachets hydrosolubles, ou le Kovex Foam, formulé pour une utilisation en station mousse. Les minéraux chélatés (Hoof-Fit, Kling-on Blue, Hoofmix) sont des produits moins agressifs et moins douloureux lors des premières utilisations. Citons également le glutaraldéhyde et ammonium quaternaire (Pédiline Pro, MS Hoofprotect) et les poudres à base de chaux (Saniblanc, Farsan), ou une nouvelle poudre à base d'un noyau bactérien (Pododry) pour la mise en place de pédiluves secs. À noter qu'en traite robotisée, il est souvent difficile d'un point de vue pratique d'installer un pédiluve. À l'avenir, le développement de systèmes automatiques de pulvérisation de produits antiseptiques intégrés au robot (Hoof'Boy) constituent une alternative séduisante, au moins aussi efficace que le pédiluve. Ces équipements présentent l'avantage de gaspiller moins de produit.
Mais quel que soit le produit, les différentes études menées en situation expérimentale ne permettent pas de les distinguer clairement. Tous se valent, leur efficacité dépend surtout de la capacité de l'éleveur à mettre en oeuvre un dispositif fonctionnel et économe en temps de travail. La propreté des pieds des vaches à l'entrée et la capacité à laisser sécher les pieds à la sortie du pédiluve sont également des points cruciaux. Les pieds doivent être propres ou lavés à l'entrée et les vaches doivent pouvoir évoluer sur un sol propre pendant une trentaine de minutes après la sortie. La salubrité des pieds et la proportion de vaches atteintes par la dermatite digitée et le fourchet déterminent le rythme d'utilisation hebdomadaire du pédiluve, installé en sortie de salle de traite. Avec des pieds sales et plus de 10 % de vaches atteintes de dermatite, il faudrait programmer un minimum de dix pédiluves, voire 14, c'est-à-dire un après chaque traite (tableau). Cette pratique rencontrée dans les grands troupeaux étrangers n'est pas réaliste en France aujourd'hui, que ce soit pour une question de coût ou de temps de travail. C'est pourquoi au-delà de 10 % de vaches infectées, avec des pieds sales, le problème ne peut pas être géré avec le pédiluve !
Or, dans les troupeaux concernés, la maladie touche en moyenne 25 % des animaux. Le pédiluve n'est donc qu'un élément parmi d'autres de la gestion des boiteries d'origine infectieuse. En aucun cas, il n'autorise l'impasse sur les traitements individuels. Parallèlement, il faut réduire en amont les facteurs favorables au développement de la maladie, en particulier travailler à l'amélioration de la propreté des pieds : parage, ventilation, augmentation du temps de couchage.
L'optimisation de la surface de couchage et du réglage des logettes fait en effet partie de la stratégie anti-boiterie. En revanche, l'augmentation de la fréquence de raclage est rarement une solution avec les gros racleurs sans système de sécurité, qui génèrent une véritable vague de lisier recouvrant les pieds des animaux.
Le bon fonctionnement du protocole mis en place devra être évalué de façon régulière. À ce titre, un diagnostic mensuel des pieds des vaches sera utile pour modifier au bon moment la fréquence d'emploi du pédiluve.
LE MEILLEUR MOYEN : SOULEVER DES PATTES TOUS LES MOIS !
Pour cela, on peut utiliser la dégradation du scoring de locomotion, observer les évolutions des postures anormales des animaux au cornadis, ou les lésions en salle de traite. Grâce à l'application Cow-Notes d'Obione, il est par exemple possible de noter la locomotion d'un troupeau de 70 vaches en vingt minutes et d'obtenir instantanément le résultat. Mais pour être plus précis, le meilleur moyen reste de soulever une dizaine de pattes tous les mois dans la cage de parage pour évaluer la prévalence des maladies, et ainsi prévenir les risques d'une explosion infectieuse au sein du troupeau.
Toutes les vaches marquent un temps d'arrêt devant le pédiluve. Il doit donc être installé à une distance suffisante, pour éviter les embouteillages sur le quai de traite. © CEDRIC FAIMALI / GFA
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