« J’ai dû corriger les performances de reproduction »
D’un manque de génisses rendant difficile la gestion de la qualité du lait, Thomas Petit a réussi aujourd’hui à limiter son renouvellement au plus près de ses besoins.
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Thomas Petit s’est installé hors cadre familial en juillet 2008 dans l’Avesnois. Au cours des premières années, le projet de ce jeune éleveur non issu du milieu agricole s’est rapidement transformé en parcours semé d’embûches.
Dans un troupeau constitué initialement de 38 vaches et 15 génisses, seules 27 femelles se sont révélées pleines et 66 % saines (avec un taux inférieur à 300 000 cellules). « Avec un prix du lait au plus bas, il m’était difficile d’envisager de nouveaux emprunts pour aller rechercher des bêtes saines. Ma préoccupation première était justement de traire du lait pour dégager du chiffre d’affaires et rembourser mes annuités, se souvient Thomas Petit. J’ai donc conservé tous les animaux, distribué aux veaux le lait infecté, séché des quartiers, pour finalement réussir à faire mon quota. » Deux ans plus tard, il est confronté à la fièvre Q. Conséquence : trois vaches pleines sur quarante-cinq ! « J’ai eu peur de ne pas m’en relever », déclare-t-il.
« J’étais confronté à des germes de bâtiment »
L’enjeu qui se présente à Thomas consiste alors à remettre sur de bons rails la mise à la reproduction, afin d’avoir un renouvellement suffisant lui permettant d’assainir son troupeau.
Il prend donc le problème à bras-le-corps et décide de mettre en œuvre un ensemble de mesures correctives : achat d’un taureau pour les rattrapages après deux paillettes sexées, parage et rainurage des bétons pour améliorer l’expression et la détection des chaleurs, achat de colliers de détection de chaleur et réalisation d’échographie entre 35 et 40 jours. Dans le même temps, le protocole de traitement des vaches taries est sécurisé avec l’application d’un antibiotique intramammaire, plus un second par voie générale et un obturateur. « Par la force des choses, les vêlages d’abord programmés de septembre à Noël, se sont progressivement étalés, ce qui n’est pas sans avantages : en pâture, la détection des chaleurs et les vêlages sont facilités. Sur le volet cellules, j’étais confronté à des germes de bâtiments, provoquant notamment l’apparition de mammites colibacillaires en fin de tarissement. L’obturateur et le contrôle de la température de la litière ont réglé ce problème. »
Une préparation au vêlage en deux étapes
Autre difficulté d’un troupeau dont le mois moyen de lactation a varié entre douze et neuf mois pendant les quatre premières années : des animaux trop gras au vêlage, avec des problèmes métaboliques en début de lactation (acétonémie), donc des difficultés de mise à la reproduction. Suivant les recommandations de Sophie Gruener, conseillère d’Avenir Conseil Élevage, Thomas met en place une phase de préparation au vêlage en deux étapes : une première en pâture et une seconde de trois semaines dans un box spécifique en bâtiments, avec 15 kg bruts de maïs ensilage, 1 kg de tourteau de soja, 500 g de colza, 500 g de corn feed, 30 g de sel, 40 g de chlorure de magnésium pour faire baisser la Baca et toujours de la paille à volonté.
« Les bêtes sont plus toniques »
Puis, le troupeau est conduit en deux lots : pendant les cent premiers jours de lactation, la ration complète mélangée comprend 46 kg bruts de maïs, 6 kg d’ensilage d’herbe, 2,5 kg de soja, 2 kg de colza et 2 kg de corn feed. Ce dernier est supprimé pour les vaches en fin de lactation. « Grâce à cette remise à plat des pratiques, les bêtes sont plus toniques, les vêlages se passent mieux et il n’y a plus ni fièvre de lait ni acétonémie. » Parallèlement, le travail sur la conduite des génisses a contribué à réduire significativement le coût alimentaire : de 683 €/UGB génisse en 2012-2013, il est passé à 282 € en 2015-2016. Cela malgré l’arrêt du pâturage pour les génisses de première année, en raison de la forte pression parasitaire.
Jusqu’à 6-7 mois, leur ration se compose de paille à volonté et de corn feed. Le principal changement concerne le rationnement au cours de la période hivernale pour les génisses de 8 mois, jusqu’à la phase de préparation au vêlage : le maïs ensilage, corrigé par du tourteau de colza, a été remplacé par une ration simple composée de 50 % d’ensilage d’herbe, 50 % d’ensilage de maïs et du sel.
La nouvelle gestion des vaches taries et du début de lactation permet aujourd’hui d’afficher un taux de nouvelles infections après tarissement de 5,6 % (objectif : inférieur à 20 %) et le pourcentage de guérison pendant le tarissement est de 87,5 % (objectif : supérieur à 80 %). En lactation, le taux de vaches infectées est de 7 % (objectif : inférieur à 10 %).
Grâce à la reprise en main des problèmes de reproduction, depuis quatre ans, l’intervalle vêlage-IA fécondante est passé de 157 à 110 jours et celui vêlage-vêlage de 471 à 407 jours. Le coût des inséminations est passé de 13,20 € à 4,10 €/1 000 litres.
Avec le recours aux semences sexées, le ratio femelles nées sur l’exploitation atteint 70 %, soit jusqu’à 36 génisses mises à la reproduction en 2015-2016. « Cela m’a permis de réformer efficacement, mais a pénalisé la marge de l’atelier par une augmentation du coût alimentaire consacré aux génisses. Sachant que je suis limité à cinquante places en stabulation, mon objectif est désormais de faire davantage de croisements viande et de limiter mon potentiel de renouvellement à vingt génisses par an, en misant sur des taureaux fonctionnels, pour me concentrer sur la longévité de mes vaches qui n’est actuellement que de 2,2 lactations. »
Jérôme PezonPour accéder à l'ensembles nos offres :