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Edito Demerden Sie sich !

Edito paru dans Terre-net Magazine n°56, mai 2016.

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"La stratégie des volumes est extrêmement sensible aux fluctuations du marché, pour le meilleur comme le pire." (©Terre-net Média)

Demerden Sie sich ! Soit en langage familier "franco-germano-bruxellois", "démerdez-vous tout seul". C’est ce que je comprends du "non-message" envoyé par les politiques européens, incapables de s’accorder pour trouver le moindre instrument de gestion de marché. Les lois de régulation  paraissent bel et bien bloquées par les doctrines néolibérales. À tel point que la course aux prix bas n’a pas de limite. Du lait à moins de 0,20 €/l est même annoncé en Belgique. 

Alors que faire ? Comment tirer un revenu avec des prix qui ne remonteront pas de sitôt ? Je n’ai pas de solution miracle dans ma besace, ni de leçon à donner, mais je voudrais seulement rappeler une équation très simple que tout chef d’entreprise devrait afficher sur la porte de son bureau : Revenu = marges x volumes. Ce, quel que soit le chiffre d’affaires. Beaucoup de transformateurs et de distributeurs ont très bien intégré ce calcul, au détriment des producteurs. 

La stratégie des volumes est extrêmement sensible aux fluctuations du marché, pour le meilleur comme le pire. En multipliant "très peu" par "beaucoup", on obtient "un petit quelque chose" pour rembourser ses investissements. C’est le cas de nombreux éleveurs européens (néerlandais et danois notamment) qui sont contraints de produire le plus possible pour saturer leurs outils de production, maintenant ainsi l’offre excédentaire de lait et la spirale des prix bas. 

La stratégie des marges s’avère pourtant payante. Par exemple, le revenu des producteurs laitiers des zones à comté et fromages de Savoie a battu son record en 2015 avec, en moyenne, 46 200 €/ UMO de résultat avant impôt et cotisations tandis qu’en plaine, celui des éleveurs spécialisés en lait standard a été divisé par deux entre 2014 et 2015 pour terminer à 16 200 €/UMO, un quart des exploitations ayant un revenu négatif. La plupart des consommateurs sont prêts à se faire plaisir, de temps en temps, avec de la bonne viande ou du bon fromage et à soutenir les agriculteurs, mais il ne faut pas rêver, la France ne se nourrira pas uniquement de produits AOP ou biologiques. 

Faute de pouvoir influer sur le prix de vente, c’est sur les coûts de production qu’il faut, encore et toujours, aller gratter et en particulier sur les charges opérationnelles, sur le poste alimentation entre autres. À ce titre, je crois fermement en l’avenir de l’herbe judicieusement pâturée pour les vaches qui ont encore accès aux prairies. Pour les autres, les protéagineux d’hiver (méteil) ensilés au printemps, suivis d’un maïs épis ensilé à l’automne, me semblent être un duo très prometteur. Ces deux fourrages se complètent à merveille sur les plans zootechnique, agronomique et économique. 

Ici ou là, de nouvelles idées émergent. La crise de l’élevage pousse chacun à se creuser les méninges et à sortir de ses habitudes pour être encore là demain. Si ce "demerden Sie sich" concerne les choix individuels des agriculteurs, il vaut également à l’échelle collective, organisations de producteurs et coopératives, qui doivent aussi être capables de retrouver des marges et/ou des volumes. Alors, relevons nos manches, partageons nos réflexions et surtout "démerdons-nous" ensemble !

 

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