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La pesée pour mieux cibler les traitements anticoccidiens

Parasitisme. Un essai d’un an, mené au lycée de Radinghem, montre l’intérêt d’un suivi régulier de la croissance des veaux pour s’affranchir des traitements systématiques.

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Àl’exploitation du lycée de Radinghem (Pas-de-Calais), des problèmes récurrents de coccidioses chez les veaux ont conduit à utiliser de façon systématique un concentré enrichi en décoquinate, une molécule aux propriétés coccidiostatiques, c’est-à-dire qui bloque le cycle des coccidies en vue de prévenir les cas cliniques. Distribué aux génisses de 0 à 6 mois, ce concentré permettait de faire l’impasse sur un, voire deux traitements individuels anticoccidiens, mais sans traiter la cause du problème. Cette habitude a perduré jusqu’à l’arrivée du nouveau directeur d’exploitation. Dans une logique pédagogique, Aurélien Jeanlebœuf a alors remis en question l’usage de cet aliment médicamenteux.

Son remplacement par un aliment comportant des additifs végétaux (phytothérapie) ou des huiles essentielles (aromathérapie) était d’abord envisagé. Mais sur les conseils des vétérinaires Cindy Jouve et Claude Joly, le problème a été abordé sous un autre angle.

Ne pas traiter autrement mais moins

« Avant d’utiliser les médecines complémentaires, il s’agissait de vérifier la pertinence d’un traitement systématique quel qu’il soit, explique Cindy Jouve, praticienne référente en phytothérapie et aromathérapie. Pour répondre à cette question, nous avons décidé de comparer des lots de génisses nourries avec l’aliment médicamenteux et des lots témoins nourris avec le même aliment, mais sans supplémentation en décoquinate. »

En 2017, six lots de trois à cinq femelles de 0 à 6 mois seront donc conduits alternativement avec et sans aliment médicamenteux. Les génisses seront pesées tous les quinze jours et une coproscopie sera réalisée sur chacune d’elles : une lors de la constitution des lots, une autre après le sevrage, mais aussi lors de suspicion de cas cliniques (diarrhées légères à hémorragiques et/ou perte d’état avérée). « L’intérêt de ce travail est d’avoir pu comparer les deux conduites, sur des animaux élevés par ailleurs dans les mêmes conditions. »

Cette procédure sera mise en place sans modifier les pratiques d’élevage : tous les veaux naissent dans un box de vêlage, où la prise colostrale n’est pas toujours respectée (minimum 2 litres, dans un délai de six heures).

Du diclazuril pour trois génisses sur vingt-cinq

La première buvée se fait parfois directement au pis. Les veaux sont ensuite mis en case individuelle dans une nurserie à ventilation dynamique contrôlée. Ils reçoivent deux buvées de 2 litres/jour de lait entier, distribuées au seau sans tétine. Du lait des sept premières traites de la mère ou de vaches fraîches vêlées. Le sevrage a lieu entre huit et douze semaines (90 et 100 kg), de façon progressive, en passant à un repas par jour les deux dernières semaines. Les cases sont sorties et lavées au nettoyeur à haute pression après chaque veau. Après le sevrage, les génisses sont élevées en case collective, dans la stabulation.

Sur un total de vingt-cinq génisses suivies pendant un an, seules trois seront traitées au diclazuril (Vecoxan) après le sevrage, chacune à la suite de l’apparition de diarrhées, confirmées par une coproscopie positive et une chute de GMQ (gain moyen quotidien)  ; deux étaient pourtant issues d’un lot avec aliment médicamenteux. « Les trois sont des cas de coccidiose clinique tardive survenue entre 3,5 et 5 mois, indique Cindy Jouve. Notre interprétation est que la distribution d’un coccidiostatique dès le premier âge ne permet pas aux veaux de développer une bonne immunité. Lorsqu’un stress important comme celui du sevrage survient, les plus fragiles ne sont pas en capacité de se défendre. »

La recherche d’une gestion parasitaire mieux raisonnée

Parallèlement, deux génisses issues d’un lot avec aliment médicamenteux et trois sans ont également eu des coproscopies positives, mais en l’absence de signes cliniques et de répercussions observées sur les courbes de GMQ, il a été décidé de ne pas les traiter. « Leur bon état corporel et le maintien d’une bonne croissance ont conduit à ne pas intervenir, explique Aurélien Jeanlebœuf. Ce n’est pas tant le gain économique qui était visé (+ 30 €/t pour l’aliment médicamenteux), mais la recherche d’une gestion parasitaire mieux raisonnée. »

Sur ce principe, l’essai permet en effet d’envisager un traitement au cas par cas. « En présence de diarrhées légères, une coproscopie positive et un GMQ qui ralentit justifient le traitement. En revanche, si le GMQ se maintient, il n’est pas nécessaire de traiter, même si la coproscopie est positive ou si l’on observe une diarrhée légère », rappelle Cindy Jouve.

Jérôme Pezon

© j.p. - Le transfert d’immunitéa été testé à l’aide de prises de sang et d’un réfractomètre : deux veaux ayant eu une coccidiose clinique avaient un taux trop faible d’immunoglobulines dans le sang. j.p.

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