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Race montbéliarde : Umotest mise sur l’innovation pour sortir de nouveaux index

Umotest enrichit sa gamme d'index, souvent privés, et tirant partie des investissements réalisés pour développer le génotypage, utiliser les parentés génomiques et le système Single Step.

Indexer de nouveaux caractères nécessite de très nombreuses données et impose de rester vigilant sur la variabilité génétique. Pas facile pour une race nationale comme la montbéliarde. Umotest s’est donné les moyens de contourner l’obstacle afin d’enrichir sa gamme d’index exclusifs.

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Bien que souvent peu héritables, les caractères de santé intéressent les entreprises de sélection et les éleveurs qui y voient un moyen d’améliorer la résistance des animaux, mais aussi de répondre aux attentes sociétales (durabilité, bien-être animal).

En race montbéliarde, Umotest, entreprise et organisme de sélection regroupant dix coopératives d’insémination, s’est appuyée sur MO3 pour progresser. Il s’agit d’une plateforme de l’innovation créée autour de la race en 2016. Elle compte sept sociétaires (1) représentant différents métiers impliqués dans la race et travaille avec plusieurs partenaires (Inrae, Idele, Eliance, Synergie Est). L’objectif de cette plateforme est d’innover dans les domaines de la sélection, de la conduite des troupeaux et de la santé. « Deux projets phares ont été conduits », explique Marie Bérodier-Gomes, responsable innovation chez Umotest. Le premier, GENO3.0, vise à développer le génotypage en élevage. Le second, MO3santé, cherche à créer de nouveaux index. Ils ont déjà permis des avancées concrètes pour les éleveurs.

« La moitié des femelles montbéliardes sont génotypées chaque année, ce qui nous donne une très bonne base de sélection », constate Guillaume Fayolle, responsable du programme génétique d’Umotest.

Le génotypage est une mine d’or

De plus, ces femelles se répartissent bien sur la zone, ce qui offre une bonne représentativité des modes d’élevage. Cet engouement pour le génotypage, situation que d’autres races pourraient envier, n’est pas dû au hasard. Umotest a incité financièrement les éleveurs à adopter le triptyque génotypage-sexage-croisement. Ce modèle vertueux vise à identifier les meilleures femelles grâce au génotypage. Elles sont utilisées pour produire les génisses de renouvellement en utilisant des doses sexées. Les autres sont inséminées avec des races à viande ce qui permet une meilleure valorisation des veaux. Cette stratégie est désormais entrée dans les mœurs et les éleveurs ne reviennent pas en arrière.

Désormais, Umotest cible 4 000 femelles pour effectuer des accouplements dans le cadre de son schéma de sélection. Les 3 500 veaux mâles obtenus sont évalués et 146 entrent en station. Une soixantaine est mise en service. Par rapport à l’ancien système du testage, cette méthode est moins onéreuse. Les économies réalisées sont investies pour mettre davantage de poids sur la voie femelle. Cette année, sur les 73 000 femelles génotypées, 146 sont entrées à la station de donneuses. La pression de sélection est donc très élevée. (© Umotest)

L’entreprise de sélection dispose par conséquent d’une ressource importante de femelles pour le schéma de sélection ainsi que d’une large base de données utilisable pour élaborer de nouveaux index. Et ce, d’autant plus qu’Umotest a adopté la méthode d’indexation Single Step et le calcul de la parenté génomique afin de gagner en précision. En clair, toutes les informations disponibles sont valorisées pour calculer les index, qu’elles proviennent de l’ascendance, des mesures de performances ou de la génomique. La parenté génomique, calculée par GenEval, offre la possibilité de connaître les différences de génome, donc d’identifier les meilleurs dans un groupe de pleins frères et sœurs.

Un index santé du pied depuis décembre 2023

Tout cela a permis à Umotest d’avancer dans l’indexation de nouveaux caractères. Ainsi, un index de santé du pied a été publié en décembre 2023, soit quatre mois avant la holstein et la normande. Les travaux de recherche ont été conduits dans le cadre d’un programme multiracial impliquant l’Inrae, l’Idele, Allice et les GDS. Il s’agit d’un index privé qui s’appuie largement sur le travail des pareurs, qui ont été formés afin d’enregistrer leurs observations de manière harmonisée. Trois lésions infectieuses et cinq lésions mécaniques ont été décrites. Elles sont regroupées dans deux sous-index de synthèse (SLI et SLM). Il n’y a pas de corrélation entre les deux. En race montbéliarde, les deux familles de lésions pèsent le même poids, représentant donc 50 % chacune dans l’index de synthèse STPI.

Plus de 66 000 femelles ont ainsi été qualifiées, parmi lesquelles 18 000 ont été génotypées. C’est grâce à cette masse de données que l’indexation a été possible. Désormais, les éleveurs disposent des index de santé du pied de leurs animaux quand ils les génotypent. L’héritabilité est comprise entre 4 et 9 % selon les pathologies. Le STPI n’est que faiblement corrélé à l’index aplomb, il l’est beaucoup plus avec la longévité fonctionnelle et l’Isu. Les éleveurs privilégiant ces deux index ont en fait déjà travaillé indirectement pour améliorer la santé des pieds. «En dix ans, on a gagné un point de STPI grâce à une sélection indirecte », souligne Guillaume Fayolle.

Le progrès va s’accélérer avec les index spécifiques que chacun pourra travailler en fonction de la situation de son élevage. Les éleveurs peuvent simuler des accouplements sur le portail MyUmo et choisir ceux qui leur conviennent le mieux. Pour toutes ces lésions podales, entre des index à -1 et 1, le risque de pathologie baisse d’environ 70 %. Il n’est pas prévu que cet index entre dans l’Isu.

Trois taureaux sans cornes sont disponibles

Parallèlement, Umotest travaille sur le gène sans cornes (P) depuis 2013. « Ce gène n’étant pas naturellement présent dans la race, nous avons procédé par introgression, comme la normande. Il s’agit de repérer des animaux (mâles et femelles) porteurs dans une autre race rouge (simmental ou red holstein) et de les croiser avec des montbéliards », explique Guillaume Fayolle. Il faut ensuite quatre générations pour revenir en race pure. Ce programme a abouti à la mise en service de trois taureaux P en 2023. Deux autres mâles P devraient entrer au catalogue en juillet. Les trois premiers ont été utilisés sur des donneuses d’embryons afin de relever le niveau génétique. Les premières femelles porteuses du gène vont arriver. Elles seront génotypées afin de retenir les meilleures pour accélérer. Les animaux homozygotes viendront dans un deuxième temps.

Réduire le risque de cétose par la génétique

Depuis octobre 2022, un index nommé « acétonémie » est également publié. Il évalue le risque de l’animal vis-à-vis de la cétose. Cette pathologie peut conduire à la mort dans des cas extrêmes mais, avant, elle a des impacts négatifs sur la production, les mammites ou encore les boiteries. Elle survient chez les vaches qui puisent dans leurs réserves corporelles, c’est-à-dire les fortes productrices en début de lactation ou celles qui ont un état d’engraissement excessif au vêlage. Si le risque dépend de la conduite, certaines vaches y sont plus sensibles que d’autres, ce qui rend la sélection possible. Chez les vaches touchées, la concentration sanguine en corps cétoniques augmente et la composition du lait se trouve également modifiée. Or, si la réalisation de prises de sang coûte cher, les analyses de lait par spectrométrie en moyen infrarouge (Mir) constituent une large base de données disponible pour prédire l’acétonémie, ce qui a permis le calcul de cet index. Son héritabilité est équivalente à celle des cellules, 12 %. Le risque moyen de cétose s’établit à 30 % durant les cent premiers jours de lactation. Il est réduit de 23 % chez les vaches indexées à + 1 en acétonémie.

DigeR prédit l’efficience alimentaire

Umotest publie aussi un index d’efficience alimentaire, DigeR, depuis 2021. «Il traduit l’efficacité des animaux pour digérer la ration de base, détaille Marie Bérodier-Gomes, qui a participé à des travaux de recherche sur le sujet. Le profil en acide gras du lait est en partie lié au fonctionnement du rumen. DigeR est le résultat d’un ratio entre groupes d’acides gras. »

Cet indicateur est peu corrélé avec les caractères de production. Il a une héritabilité modérée de 31 % (comme le lait), ce qui permet de progresser assez vite. Les vaches bien indexées sur ce critère sont plus productives et plus fertiles tout en mobilisant moins leurs réserves en début de lactation. Cette meilleure efficacité ne s’obtient pas au détriment des autres fonctions biologiques.

Là aussi, la base de données des analyses de lait par le spectre Mir a été bien utile. Elle a aussi contribué à l’indexation de la fromageabilité du lait (From’Mir) en juin 2022. Il s’agit d’un index privé partagé entre les trois OS de la race. Chacune peut le commander, ou non. D’autres races travaillent sur ce sujet dans le cadre d’un programme commun. Cet index est intéressant notamment pour les éleveurs qui transforment à la ferme ou ceux qui vendent à des coopératives fromagères.

Les travaux se poursuivent à Umotest pour élargir encore la gamme des index disponibles, comme sur les émissions de méthane, bien sûr, dans le cadre d’un projet multiracial. La recherche se penche également sur la résistance au stress thermique, la valorisation des vaches de réforme ou encore la survie des génisses de la naissance au vêlage. L’idée de créer un index synthétique regroupant l’ensemble des caractères de santé est en réflexion.

(1) Les sociétaires de MO3 : Umotest et ses coopératives adhérentes, ECEL 25-90, GenIA’test, FIDOCL, GDS 25, GDS 70, GDS 90.

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