Accoupler plus finement en utilisant 100 % de la génomique
Révolution. Le génotypage ne se résume pas à l’indexation génomique. Il permet de lever le voile sur le statut des gènes d’intérêt et sur la variabilité allélique. La prise en compte de ces deux informations ouvre la voie à des accouplements plus judicieux.
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La façon de raisonner les accouplements va faire un bond de géant. Jusqu’alors, choisir le meilleur mâle pour une femelle, génotypée ou pas, se faisait sur les seuls index génétiques… Et généralement en s’interdisant des accouplements trop apparentés. Mais ils ne sont qu’un élément, essentiel certes, du génotypage. En génotypant et donc en lisant l’ADN des animaux, on lève aussi le voile sur le statut des gènes dits d’intérêt et sur la variabilité allélique. Cette dernière permet d’estimer la consanguinité du veau à naître. Ce sont ces deux informations, traduites en points d’Isu, qui vont permettre de gagner en efficacité lors d’un accouplement génomique. Le gain attendu est énorme : jusqu’à 26 % d’efficacité économique supplémentaire, - 1,4 point de consanguinité (soit environ dix ans au rythme actuel de l’élévation de la consanguinité en lien avec la sélection laitière), réduction par sept du risque d’anomalies génétiques comparé à des accouplements classiques. C’est le résultat d’une simulation à partir de 160 élevages montbéliards réels (voir infographie ci-contre).
Cette petite révolution est le fruit d’un travail de recherche de la plate-forme d’innovation MO3 (1), de l’OS montbéliarde Umotest, avec l’Inra, et en partenariat avec Geneval.
« Tout n’est pas additif dans le génome »
Lancé en 2017 dans le cadre d’une thèse, l’objet de ce travail était de voir comment il était possible, via toutes ces informations du génotypage, d’améliorer le conseil en élevages. « On sait que tout n’est pas additif dans le génome », explique Mickaël Brochard, responsable opérationnel de MO3. Par additif, comprenez que le potentiel génétique du descendant est égal à la moyenne des potentiels de son père et de sa mère… Ce que l’on fait quand on raisonne sur les seuls index génomiques. « L’exemple le plus parlant de non-additivité de certaines parties du génome est celui du gène dominant sans cornes. Si l’on accouple un taureau homozygote sans cornes avec une mère née avec cornes, le veau sera sans cornes. Et pas avec des cornes mi-longues », illustre-t-il. Dans d’autres cas, on est face à des gènes d’intérêt récessifs, comme ceux liés à un certain nombre d’anomalies génétiques.
D’où l’idée d’intégrer, pour raisonner l’accouplement, les gènes d’intérêt ayant un impact économique positif ou négatif… Impact traduit par des points d’Isu. On connaît quatre gènes d’intérêt liés à des anomalies génétiques (SHGC, MH1 et MH2, MTCP) en montbéliarde… Douze en holstein.
La parenté vraie estimée
On sait aussi les limites du coefficient de parenté estimé à partir des pedigrees. Traduction de la parenté d’un taureau à la femelle à accoupler, il dépend de la profondeur et de l’exactitude de ces pedigrees. Mais il ne signe pas leur vraie parenté. C’est-à-dire les allèles communs de chaque individu, ce que l’on est capable de déterminer grâce au génotypage de l’ADN de chaque individu.
Au-delà de la traduction en points d’Isu positifs ou négatifs de cette dépression ou bonus de la consanguinité pour choisir plus finement un taureau, la prise en compte de la parenté vraie rebat une partie des cartes. Certains accouplements déconseillés sur parenté pedigree se révèlent en réalité moins apparentés qu’estimé à partir des pedigrees et seront donc possibles, et vice versa. L’algorithme de l’accouplement génomique permet aussi de favoriser les combinaisons les moins apparentées qui vont engendrer le moins de pertes par dépression de consanguinité chez les descendantes. « Le fait est qu’en raisonnant individuellement, un taureau à 7 en parenté, très peu original au niveau de la population de femelles à accoupler, peut se révéler en réalité très original pour une femelle donnée. A contrario, un géniteur à 4,5 de parenté, très original sur le papier, peut se révéler très consanguin au niveau allélique d’une femelle particulière », note Mickaël Brochard.
Si cette méthode d’accouplement est particulièrement efficace pour les femelles génotypées (25 % de femelles sur la zone Umotest), elle a été adaptée pour s’utiliser sur les non génotypées. Pour cela, la composante consanguinité s’apprécie avec le coefficient de parenté sur pedigree, traduit en points d’Isu, et le statut des gènes d’intérêt de ces femelles est prédit à partir de leurs ascendants voire descendants génotypés. Une nouveauté en soi.
Jean-Michel Vocoret(1) Umotest, Conseil Élevage 25-90, Conseil Élevage 70, Fidocl, GDS du Doubs, de Haute-Saône et du Territoire de Belfort.
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