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Parlons plutôt de médecine complémentaire qu’alternative 

Thérapeutique. Les médecines complémentaires n’ont pas vocation à se substituer aux traitements allopathiques traditionnels. L‘alternative repose sur l’amélioration constante des pratiques d’élevage, dans l’objectif de traiter moins mais mieux.

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Les médecines dites « alternatives » ont le vent en poupe, autant pour les humains que pour les animaux. En élevage, l’homéopathie, la phytothérapie (plantes) et l’aromathérapie (huiles essentielles) sont les plus fréquemment rencontrées mais l’acupuncture et l’ostéopathie se développent aussi.

Ces thérapeutiques répondent à des attentes sociétales : limiter les risques de résidus dans les aliments, réduire l’usage des antibiotiques, respecter le cahier des charges propre à certaines pratiques, sans oublier une motivation purement financière de réduction du coût des traitements.

Chacune a ses indications et ses limites

Le terme de « médecines complémentaires » semble plus adapté que celui de médecines « alternatives », car ces thérapeutiques ne sont pas de réelles alternatives aux traitements conventionnels. Aucune ne peut prétendre à elle seule résoudre tous les cas cliniques. Elles sont complémentaires et peuvent s’associer avec efficacité aux traitements conventionnels ou les remplacer selon les cas. Chacune a ses indications et ses limites.

L’homéopathie est surtout indiquée dans l’élimination des toxines (drainage homéopathique), la stimulation du système immunitaire, la régulation des systèmes nerveux central et autonome et, dans une moindre mesure, le rétablissement de l’équilibre digestif et la régulation du système hormonal. C’est la seule médecine complémentaire autorisée en automédication en élevage. En effet, il n’y a pas obligation de prouver l’efficacité des médicaments homéopathiques avant qu’ils soient mis sur le marché, mais uniquement leur innocuité. De plus, ils sont considérés comme ne laissant pas de résidus (principe d’infinitésimalité) et n’ont donc pas de délai d’attente.

La phytothérapie est principalement indiquée pour l’élimination des toxines (activation ou soutien des fonctions hépatiques, biliaires et rénales), la régulation des systèmes nerveux autonome et central, la lutte contre le stress oxydant (richesse des plantes en vitamines A, E, C et polyphénols), le rétablissement de l’équilibre digestif (contrôle de la motricité intestinale, régulation gastrique ou pan­créatique) et, dans une moindre mesure, pour la stimulation des systèmes immunitaire et hormonal.

L’aromathérapie est particulièrement intéressante pour le soutien de l’immunité, la régulation de la flore intestinale (propriétés antimicrobiennes de certaines huiles), la régulation des systèmes nerveux autonome et central et, à un niveau moindre, pour la lutte contre le stress oxydant, l’élimination des toxines et la régulation hormonale.

Concernant ces deux dernières, il est essentiel de rappeler quelques règles de base : certaines plantes sont toxiques, voire mortelles, d’où leur utilisation uniquement en homéopathie. Certaines huiles essentielles le sont aussi (selon la dose et/ou la voie d’administration), y compris parmi celles autorisées en vente libre.

Pas de miracle si les prérequis ne sont pas respectés

La dermocausticité et l’hépatotoxicité des huiles essentielles à phénols et à aldéhydes aromatiques, la neurotoxicité et le risque abortif avec les huiles essentielles à cétones sont les effets les plus connus. Sans compter les risques de contamination des matières premières avec des plantes non désirables, des métaux lourds ou des pesticides. D’où l’importance de choisir des circuits d’approvisionnement contrôlés, garantissant la traçabilité et la fiabilité des matières premières végétales utilisées.

Enfin, la législation sur l’usage des plantes ou des huiles essentielles en tant que traitement chez les animaux de production est problématique car beaucoup sont aujourd’hui non répertoriées. Parmi celles qui sont autorisées, aucun délai d’attente officiel n’a été établi, ce qui impose de respecter a minima des délais d’attente de sept jours pour le lait et vingt-huit jours pour la viande. Nous espérons que cette législation évoluera afin de permettre une utilisation sereine de la phytothérapie et de l’aromathérapie, sans crainte de résidus et de toxicité pour le consommateur.

Dans tous les cas, si ces thérapeutiques sont utilisées en tant que traitement en élevage, cela implique l’établissement d’un diagnostic précis et d’une prescription au même titre qu’en médecine conventionnelle. C’est pourquoi de plus en plus de vétérinaires se forment sur ces sujets. Ils trouvent ainsi légitimement leur place dans l’encadrement de ces pratiques afin de garantir leur efficacité. Souvent, on insiste sur le fait que ces médecines sont moins coûteuses. C’est se tromper d’objectif : le but n’est pas de réduire le coût des traitements, mais leur nombre, par l’amélioration des pratiques d’élevage.

Comme en médecine ­conventionnelle, vous serez déçus si des prérequis ne sont pas respectés : la bonne gestion du logement, de l’alimentation, de l’abreuvement et de l’hygiène du troupeau est indispensable à la réussite de la prise en charge des cas individuels comme collectifs, quelle que soit la thérapeutique choisie !

Avant d’utiliser les médecines complémentaires, posons-nous les bonnes questions : souhaitons-nous uniquement traiter à bas coût ou voulons-nous améliorer la santé du troupeau en traitant moins mais mieux ?

Cindy Jouve

- Cindy Jouve est vétérinaire dans le Pas-de-Calais, dans le Groupe vétérinaire d’Artois et d’Opale. Elle est diplômée universitaire en plantes médicinales, phytothérapie et aromathérapie. Elle participe régulièrement à notre rubrique Alerte véto.

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