Urines rouges et baisse de production, quel diagnostic ?
Quatre ou cinq prim’holsteins d’un même troupeau situé dans le Puy-de-Dôme présentent des urines rouges, avec une baisse concomitante de la production laitière.
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Pour en savoir plus sur ces urines rouges intermittentes mais régulières dans le troupeau, deux vaches sont prises en charge par le service de pathologie du bétail de VetAgroSup. À l’admission, les vaches affichent des muqueuses pâles et une hématurie prononcée (sang dans les urines). S’enchaînent alors une série d’examens complémentaires : analyse bactérienne, échographie et endoscopie de la vessie, avec un prélèvement tissulaire (histologie) pour analyse. Les examens révèlent l’absence de bactérie dans les urines, mais surtout une modification importante de la paroi de la vessie et la présence de papillomes urothéliaux bénins (tumeurs bénignes). Une analyse de fourrage permet de détecter de la fougère-aigle (Pteridium aquilinum L.) à hauteur de 4,3 g/kg de foin, soit une dose de 0,7 g/kg de poids vif.
Une « association de malfaiteurs »
Nous sommes donc arrivés à la conclusion d’une hématurie liée à une hémorragie vésicale secondaire due à un fort remodelage de la paroi de la vessie.
Or les vaches du troupeau consomment des fougères- aigles depuis toujours et ce n’est seulement que depuis quelques années que ces urines rouges, intermittentes, sont apparues. L’hypothèse la plus probable est alors une « association de malfaiteurs » entre le ptaquiloside, substance mutagène et cancérigène de la fougère, activé en milieu alcalin (urines alcalines des bovins) par les cellules vésicales, et d’un papillomavirus bovin (BPV). Ce dernier virus a pu être introduit plus récemment dans le troupeau. Des études récentes montrent le lien entre le ptaquiloside, qui agirait comme un initiateur des mutations oncogènes, donnant lieu à de possibles cancers, et les BPV comme promoteur de la prolifération des cellules cancéreuses.
Supprimer les fougères-aigles
Le seul levier d’action était alors de supprimer impérativement les fougères des rations des vaches, ce qui aura aussi pour effet de supprimer le ptaquiloside du lait, molécule à l’origine de cancers digestifs (œsophage et estomac) chez l’homme.
Les intoxications à la fougère-aigle sont souvent plus fortes au printemps, avec des jeunes pousses de fougère plus riches en substances toxiques. Elles se manifestent après plusieurs semaines de consommation dans le cas de forme aiguë, mais peuvent survenir après plusieurs années sous une forme chronique, comme ici avec des doses plus faibles mais régulières. Ainsi, le syndrome hémorragique (forme aiguë) peut être reproduit après trois mois de consommation de 30 à 40 g/kg de plante fraîche par jour. L’hématurie (forme chronique) peut, quant à elle, être reproduite après un an et demi de consommation de 2 à 3 mg/kg de plante sèche par jour, selon ToxLab de VetAgroSup.
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