Un kit lait de mélange pour détecter tôt la besnoitiose
Diagnostic. La mise au point d’un kit d’analyse sur le lait est une avancée dans la lutte contre cette maladie. Le nouvel outil permet de la détecter en amont et de la surveiller.
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M aladie émergente parasitaire, la besnoitiose se développe rapidement, du sud vers le nord. En France, une soixantaine de départements sont officiellement touchés (1). Toutes les régions sont concernées par cette maladie, dont la première porte d’entrée dans les élevages est l’achat d’un animal contaminé ; la seconde étant la piqûre d’insecte, stomoxe ou taon, qui la transmet d’un animal à l’autre.
Sur le plan économique, les conséquences de la maladie, variables d’un élevage à l’autre, peuvent être très lourdes : mortalité allant jusqu’à 10 %, réforme précoce des animaux avec moins-value commerciale, frais d’euthanasie, saisie en abattoir, problème de renouvellement et de maintien du niveau génétique. La facture est souvent bien plus salée que ce que l’on imagine au départ. Dans un élevage de 200 bovins (veaux y compris), par exemple, qui a vécu trois ans avec la maladie, le coût a été chiffré à plus de 10 000 €. « Des éleveurs s’habituent à vivre avec deux ou trois bêtes qui meurent chaque année, observe Christian Boulon, directeur des GDS de la Loire et de l’Ardèche, et référent régional besnoitiose. Or, ils n’ont plus les marges économiques pour cela. »
« En Rhône-Alpes, on a pris le taureau par les cornes »
Pour toutes ces raisons, la besnoitiose est devenue, en Rhône-Alpes, l’un des thèmes prioritaires des GDS. « Entre deux stratégies – on ne fait rien et on plombe le territoire, ou bien on prend le taureau par les cornes –,nous avons choisi la seconde, explique Christian Boulon. Même si le classement de la besnoitiose en maladie 3, non réglementée, rend les choses plus difficiles, et que tout est basé sur le volontariat. Il faut veiller à ne pas produire un IBR bis : il avait fallu trente ans pour obtenir l’arrêté d’éradication ! »
Dans cette région du Sud-Est, il n’est plus question d’envisager de vivre avec la maladie. Les responsables sanitaires ont choisi de la combattre en la dépistant en amont. « Si l’on attend le premier cas clinique,il est trop tard : on est déjà à plus de 25-30 % de prévalence », avertit notre interlocuteur.
La besnoitiose est en effet une maladie insidieuse : seule une partie des animaux contaminés présente des signes cliniques, et les premiers symptômes ne sont pas spécifiques. Qui plus est, la transmission a souvent lieu au pré, dans un contexte où les signes sont plus délicats à observer (sur génisses et bovins allaitants, en particulier).
Pas de traitement curatif
Une approche préventive est d’autant plus importante qu’il n’existe pas actuellement de traitement curatif. Les sulfamides, administrés à forte dose pour soulager l’animal malade, ne détruisent pas les kystes, réservoirs de la maladie. Au mieux, l’évolution des symptômes est stoppée. La piste vaccinale n’a pas abouti pour l’instant, faute de trouver un partenaire intéressé pour la développer. La seule solution pour se débarrasser de la besnoitiose est donc d’abattre les animaux séropositifs.
Il existe aujourd’hui des outils de diagnostic valables et efficaces, dont l’analyse en lait de mélange. C’est une avancée importante. « Pour un laitier, réaliser des prises de sang, chaque année, pour détecter la présence éventuelle de la maladie est contraignant et coûteux, note Christian Boulon. A contrario, un système de suivi par lait de mélange ne coûte que 5,50 à 6 € HT par analyse. L’échantillon peut être prélevé dans le cadre du paiement du lait à la qualité. »
Cet outil a été testé sur le terrain avec le laboratoire de Foix (2) dans les élevages laitiers de l’Allier et de l’Ardèche. En Ardèche, où un plan d’assainissement a été mis en place en 2009, tous les cheptels laitiers (260) ont été testés en lait de mélange, avec un taux de prévalence de 5 %, soit 13 troupeaux positifs (dont certains avec un faible taux de prévalence). Neuf élevages ont éliminé les animaux positifs. « Nous espérons avoir stabilisé la maladie, commente le directeur du GDS. Le kit lait de mélange constitue un outil de surveillance qui permet de suivre le troupeau régulièrement, tous les six mois ou tous les ans (voire trois fois par an si l’élevage a déjà eu la besnoitiose). Fiable, l’outil donne une bonne image de la situation. Si le troupeau ressort positif en lait de mélange, il faut vérifier le statut de chaque animal par analyse de sang. Un résultat négatif en lait de mélange ne signifie toutefois pas que le troupeau est négatif. Les vaches taries et les nouvelles génisses ne sont pas testées. »
Assainir les foyers trouvés
Depuis début 2019, le kit d’analyse sur lait de mélange a été déployé dans la Loire (750 élevages) et en Isère (400 élevages). Dans la Loire, où une petite dizaine de cheptels laitiers seulement est touchée par la maladie, le kit lait de mélange a été utilisé dans 750 des 1 300 élevages laitiers du département. L’objectif est de savoir où l’on en est, avec une ferme intention d’assainir si l’on trouve des foyers.
Sur les neuf élevages repérés positifs grâce au test lait de mélange (avec une prévalence dans les cheptels de 1,2 %), huit sont entrés en plan d’assainissement avec des prises de sang individuelles et une élimination des animaux positifs. Un dépistage sanguin est actuellement réalisé dans les cheptels voisins afin de prévenir la diffusion de la maladie. Parallèlement, un travail de sensibilisation des éleveurs et des vétérinaires à cette maladie est mené par le GDS.
Anne Bréhier(1) Tous n’ont pas testé la présence de la maladie.
(2) L’Ariège, berceau historique de la maladie, dispose d’une expertise en la matière.
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