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« Je sème un maïs très précoce derrière une orge »

Qualité.« Les performances laitières obtenues avec le maïs cultivé en dérobé sont identiques à celles d’un maïs classique, indique Fabrice. La seule différence s’observe au niveau des épis : il y a 12 à 14 rangs de grains sur les premiers, contre 16 à 18 rangs sur les seconds. »j.p.

Pour conforter ses stocks, Fabrice Goy, dans le Rhône, sème du maïs comme culture dérobée estivale. Un fourrage de bonne valeur alimentaire, avec un rendement de 10 à 12 tonnes de MS.

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Dans les monts du Lyonnais, depuis maintenant cinq ans, Fabrice Goy sème un maïs très précoce en culture dérobée entre deux céréales. Ce sont des variétés dotées d’un indice de précocité de 140 à 180, récoltées après seulement cent jours de végétation à partir de mi-octobre. « J’ai réalisé un premier test pour faire du stock complémentaire, à la suite d’une mauvaise levée de mon maïs classique, se souvient l’éleveur. Pour une dérobée estivale, les rendements se sont révélés plus intéressants qu’un sorgho multicoupe, c’est-à-dire 10 à 12 tonnes de MS/ha chaque année d’un fourrage de bonne valeur alimentaire à destination des laitières. » Cette pratique implique deux dates de semis et deux dates de récolte pour le maïs ensilage. Mais, avec le ray-grass d’Italie, elle offre l’opportunité d’intensifier la production par hectare, dans un système zéro-pâturage. Les 4 ha de maïs dérobé semés chaque année sont stockés dans un silo dédié et participent à l’autonomie de l’exploitation sur la base d’un chargement de 1,92 UGB/ha de SFP.

« Chaque jour compte pour permettre au maïs d’arriver à maturité ! »

Concrètement, Fabrice prend en compte le potentiel de ses sols pour adapter les variétés­ de maïs et le choix des indices de précocité. À quelque 400 mètres d’altitude, l’éleveur bénéficie de conditions particulièrement favorables : des terres profondes, limono-argileuses, de bon potentiel agronomique, mais lourdes. Dans ces parcelles, il implante chaque année l’équivalent de 25 ha de maïs d’indice 280 à 300, entre le 25 avril et le 10 mai au plus tard, soit un chantier de récolte programmé début septembre avec des rendements de l’ordre de 15 tMS. « Malgré un potentiel de rendement supérieur, je ne cultive pas de variétés plus tardives pour éviter de récolter en conditions humides dans ces terres lourdes. C’est aussi pour cette raison qu’il est difficile d’envisager la production de maïs grain. »

Les maïs dérobés, eux, sont cultivés dans des parcelles de coteaux bien exposées, de moindre potentiel, mais qui ressuient plus facilement. Ils sont semés fin juin, début juillet, derrière une orge, le plus rapidement possible après la moisson. « Il ne faut pas attendre, prévient l’éleveur. Chaque jour compte pour permettre au maïs d’arriver à maturité et bénéficier de la fraîcheur du sol à l’implantation. » Dans la pratique, il conseille de ne pas dépasser le délai d’une semaine entre la moisson et le semis, ce qui doit laisser le temps de presser la paille, de préparer et de fumer le sol.

Après la récolte mi-octobre, là aussi il ne faut pas attendre : dès le lendemain du chantier d’ensilage, Fabrice prépare le sol en vue d’un nouveau semis d’orge d’hiver à j + 2. Dans le cadre de cet itinéraire technique, Fabrice a utilisé, en 2018, un maïs d’indice 180 et a récolté 120 tonnes brutes sur 4 ha, malgré un déficit hydrique très marqué début juillet. « Pendant la première quinzaine de juillet, les températures sont montées au-delà de 40 °C, sans une goutte d’eau. Le maïs a bien levé, il a poussé, résisté à la canicule puis il a su profiter des orages du mois d’août. »

Prudent, Fabrice souscrit néanmoins une assurance aléas climatiques pour ses cultures, d’abord contre le risque de grêle, mais aussi contre la sécheresse.

Ensilé dans un silo dédié, ce maïs dérobé est utilisé en début d’hiver comme stock de report. En 2018, il affiche une teneur élevée en amidon et une valeur énergétique de bon niveau, suffisante pour la ration de base d’un troupeau holstein à plus de 11 000 litres de lait de moyenne. L’hiver dernier, il a, par exemple, permis de maintenir le niveau d’étable d’un troupeau à 5,5 mois moyens de lactation, à 36 litres de lait par vache et par jour. La ration complète, équilibrée à 35 kg de lait, se composant alors de : 30 à 35 kg bruts de maïs ensilage dérobé, 8 kg d’ensilage de première coupe de ray-grass d’Italie diploïde semé en septembre et récolté avant un maïs, 500 grammes de foin, 1 kg de blé, 2 kg de maïs grain, 1,6 kg de tourteau de soja, 2 kg de tourteau de colza, 1 kg de tourteau tanné et 1 kg de graines de lin.

Ces maïs ne sont pas réservés au sud de la France

Dans la même logique de culture dérobée, ces maïs se développent pour l’alimentation des méthaniseurs, pour des semis tardifs­ derrière une culture légumière ou le retournement d’une prairie. Selon le semencier KWS France, ces variétés dites « ultra-précoces­ » (d’indices 150 à 200) ne sont pas réservées au sud de la France : la variété Autens utilisée par Fabrice a, par exemple, un besoin en somme de températures de 1 200 °C, c’est-à-dire 500 °C de moins qu’une variété demi-tardive.

« Sur nos parcelles d’essais près de Beauvais, dans l’Oise, cette somme de températures est atteinte huit années sur dix entre le 25 juin et le 31 octobre. La moyenne étant de 1 254 °C au cours de cette période, indique Jean-Philippe Cochet, responsable de produit chez KWS. Compte tenu du réchauffement climatique, on peut penser que cette opportunité va se répéter d’année en année. À condition de semer le plus vite possible, le jour même ou le lendemain de la moisson, et de pouvoir bénéficier de 20 mm de précipitations pour la levée. »

Jérôme Pezon

© j.p. - Silo de report. Le maïs est stocké dans un silo dédié de 8 mètres de large.j.p.

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