Fourrage : bien penser sa chaîne de récolte pour ne pas en perdre une miette
Choix variétaux, détermination du stade de récolte… Les déterminants de la qualité des fourrages sont nombreux. Mais tout ne relève pas uniquement de l’agronomie. Pour limiter les pertes à la récolte et optimiser la qualité des fourrages, il est intéressant de s’interroger sur les choix de matériels de récolte.
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La qualité du fourrage, c’est d’abord une question d’agronomie : choix variétaux, espèces, dates de fauche… Mais encore faut-il que l’itinéraire de récolte permette de conserver ce potentiel.
C’est d’autant plus vrai pour les légumineuses : la fragilité de la liaison entre la tige et la feuille les rend très sensibles aux pertes lors des opérations mécaniques. Et c’est précisément dans les feuilles que se trouve l’essentiel de la valeur alimentaire !
Pour optimiser la qualité de son fourrage, chaque étape de la chaîne de récolte est à analyser. Premièrement, Arvalis propose de se pencher sur le matériel de fauche. « Les pertes sont variables selon le type de faucheuse dont on dispose, et les réglages du conditionneur », rappelle Antoine Buteau à l’occasion d’une conférence au Salon de l’herbe. Compter 1 à 3 % de perte avec une faucheuse classique à plat, contre 2 à 5 % sur des légumineuses avec une conditionneuse à rouleau, et 5 à 11 % avec une conditionneuse à doigt ou fléaux.
Privilégier la faucheuse à plat
D’après la Chambre d’agriculture de la Creuse, une faucheuse classique entraîne une perte de l’ordre de 180 kg de MS/ha sur une prairie multi-espèces avec 20 % de légumineuses. Dans les mêmes conditions, la conditionneuse à doigt laisse environ 250 kg de MS sur le champ.
Si les pertes peuvent sembler maigres, elles sont principalement constituées de feuilles ou se concentre l’essentiel de la valeur alimentaire. Des essais menés par la Chambre d’agriculture du Limousin sur la récolte de luzerne montrent que la fauche classique du fourrage entraîne une perte de 7 à 10 % des feuilles. Une conditionneuse à rouleau laisse 13 à 17 % des feuilles dans le champ, et la conditionneuse à doigt utilisée à forte intensité prive l’éleveur de près de 40 % des feuilles. Des chiffres qui plaident en faveur de la traditionnelle faucheuse à plat.
Attention également à la hauteur de coupe. L’enjeu est faible pour les graminées, « les pertes sont de l’ordre de 60 kg MS/(cm.ha) pour des hauteurs comprises entre 5 et 10 cm pour la luzerne », rappellent les travaux d’Anthony Uijttewaal, mais très impactant sur les mélanges riches en légumineuses. Compter 150 à 300 kg MS/(cm.ha) pour un mélange de fétuque élevée et ray-grass. L’agronome conseille ainsi de viser les 8 cm, pour bénéficier d’un bon compromis entre rendement, valeurs alimentaires et problématique sanitaire.
Un séchage rapide pour conserver la valeur alimentaire
Viennent ensuite le fanage et l’andainage. L’objectif : atteindre rapidement la teneur en matière sèche souhaitée. Tant que le fourrage est humide, il connaît des pertes du fait de la respiration cellulaire et de la protéolyse. Car une fois fauchée, la plante continue de respirer et d’utiliser les sucres qui la constituent jusqu’au séchage. Plus l’opération est rapide, moins le fourrage « se consomme ». « La principale conséquence est la perte de MS, variant de 1 à 7 % de la biomasse récoltée chez la luzerne », note Anthony Uijttewaal.
Tout l’enjeu est donc de savoir quand faucher. Si une coupe d’après midi permet de profiter de l’activité photosynthétique de la matinée, avec un fourrage riche en sucre, tout l’enjeu est de conserver ces sucres durant le séchage. Si le fourrage est encore humide en fin de soirée, il continuera de se consommer durant toute la nuit. Les conseillers proposent alors de favoriser la dessiccation rapide, avec une fauche dans la matinée, après la levée du point de rosée.
Aller vite, et abaisser le régime de prise de force
Pour accélérer le séchage, il est possible d’utiliser des systèmes de conditionnement mécaniques qui écrasent et plient les tiges. Mais la question est complexe. En plus des coupures générées par la fauche, ce sont les stomates qui assurent le séchage de la plante. Responsables de l’évapotranspiration, ces orifices ont tendance à se refermer en cas de stress. Et avec les stomates fermés, la plante met plus de temps à sécher. Tout dépend donc de la sensibilité des fourrages récoltés. Dans le cas de la luzerne, la majorité des stomates se situent sur les feuilles, que l’on cherche justement à préserver… Chez les graminées, les stomates sont répartis de manière plus homogène.
Les dispositifs d’épandage larges sont également un plus. Les gros andains ont l’inconvénient de limiter la circulation d’air, et donc de ralentir le séchage.
Le fanage et l’andainage entraînent également des pertes mécaniques. Plus qu’abîmer le fourrage, il révèle surtout les pertes de la fauche, en laissant tomber les feuilles au sol. « L’abaissement du régime de la prise de force, l’accroissement de la vitesse d’avancement et l’intervention sur un fourrage dont les feuilles sont humidifiées limitent les pertes », conseille Anthony Uijttewaal. Les systèmes d’andaineurs à tapis, bien qu’onéreux, permettent également de préserver les légumineuses.
Mieux vaut également travailler le matin, sur un fourrage encore humide. « Le combo andainage et pré-andainage le matin permet de perdre autour de 315 kg MS, contre 667 kg MS l’après-midi », relève Antoine Buteau. D’autant que cela altère la qualité du fourrage. Compter - 0,4 point de MAT % MS au matin, contre - 1,8 l’après-midi. Les grandes largeurs de faneuses et d’andaineur sont un plus pour travailler dans de bonnes conditions climatiques.
La perte de volume comme de matière a un impact économique. Si l’on prend l’hypothèse d’un soja 48 à 500 €/t, d’un blé à 200 €/t et de paille à 80 €/t, le pré-andainage l’après-midi plutôt que le matin induit une perte sur la ferme de 100 à 110 €/ha par rapport au matin. « Ce sera des concentrés en plus à acheter, ou du moins à apporter », insiste le conseiller.
Peu de pertes lors du pressage
En dernier lieu arrive le pressage, mais l’opération génère globalement peu de pertes. Le type de presse choisi permet toutefois d’optimiser le rendement, avec de meilleures performances sur les presses à balles carrées, ou les presses à balles rondes avec chambre variable.
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