Une ferme cogérée par des étudiants à UniLaSalle
Avec plus de 2 000 étudiants sur son site de Beauvais, l’institut supérieur UniLaSalle comporte deux exploitations agricoles, dont une directement sur le campus. Sa particularité : être cogérée par la direction de l’école et les étudiants eux-mêmes. Explications.
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Autrefois connu sous le nom d’Isab et reconnu pour sa formation d’ingénieur en agriculture, l’institut polytechnique UniLaSalle couvre aujourd’hui de nombreux domaines, bien que l’agriculture soit le cycle le plus suivi. Et sa ferme historique sur le campus de Beauvais (Oise) profite aux étudiants…
Un directeur et des salariés pour deux exploitations agricoles
Une exploitation agricole dans une école : ce n’est plus aussi commun qu’avant, mais la direction d’UniLaSalle y tient. Et ce n’est pas une, mais deux fermes qu’elle possède :
- La ferme du Bois à Beauvais (60) : 170 ha de SAU (maïs, blé, orge, colza, lin, prairies, luzerne), 70 vaches laitières, 750 000 litres, et tout récemment un atelier de transformation laitière ;
- La ferme de Maurepas à Bézu-la-forêt (27) : 150 ha de SAU (blé, orge, colza, betteraves, prairies), 35 mères Charolaises, système naisseur.
C’est Grégoire Forzy le directeur des exploitations depuis 4 ans. Il manage 6 ETP à Beauvais et 2 en Normandie. Les deux structures ne tournent qu’avec de la main d’oeuvre salariée et des étudiants en contrat pour les week-ends. Il faut donc une gestion simple et efficace, il explique : « On fait un assolement commun sur les deux fermes pour rationaliser le matériel. On cultive des betteraves et du lin sur un seul site, par exemple. » Pour l’alimentation des vaches aussi c’est au plus simple : « Ici on a qu’un seul silo dans lequel on met maïs, ensilage d’herbe et luzerne. Comme ça pour distribuer, on a qu’un godet désileur et c’est la même ration toute l’année. »
Agroteam : l’association parfaite en vue d’une installation
L’objectif premier des exploitations d’UniLaSalle, et surtout celle de la ferme du Bois sur le campus, c’est d’être un support pédagogique. Et pour aller plus loin, les étudiants peuvent même prendre part à sa gestion, notamment via l’association Agroteam. Grégoire Forzy explique : « C’est une association qui a vu le jour il y a 5 ans, le but étant que les étudiants participent aux décisions stratégiques. »
Ils forment donc un trio : le directeur de la ferme, les étudiants de l’association Agroteam, et la direction de l’école à qui il faut rendre des comptes. Sébastien Loisel et Augustin Philippe sont étudiants en 4e année de cycle ingénieur et coprésidents de l’association Agroteam. Ils expliquent : « Notre rôle c’est de proposer et mener des projets sur la ferme de Beauvais. On fait également la transition entre la partie éducative et la ferme. »
C’est concret et professionnalisant pour notre installation future !
« On s’occupe de projets qui vont être amenés par les étudiants eux-mêmes, ou bien soumis par la direction pour lesquels on réalise l’étude et la mise en place. C’est de l’analyse de données, des études économiques, de faisabilité, la prise de contact avec des professionnels ou des personnes du territoire… » Une sacrée expérience professionnelle pour la vingtaine d’étudiants de l’association ! « Sur les élèves qui sortent d’UniLaSalle, environ 30 % s’installeront en agriculture derrière. Autant s’imprégner d’une ferme et de son fonctionnement le plus tôt possible », expliquent les deux jeunes, motivés eux aussi par l’installation. Et parce que cela prend du temps, l’école s’adapte : elle a mis en place des contrats d’étude qui dispensent ces étudiants de certains cours car elle considère que les compétences sont acquises via l’association (comme la gestion de projet par exemple).
L’association Agroteam planche actuellement sur les bilans carbone de l’exploitation et sur la création d’un verger. Avant cela, elle a œuvré sur la plantation de vignes et l’aboutissement du projet de transformation laitière et vente directe. Et la ferme de Maurepas malgré son éloignement n’est pas en reste : « On réfléchit à ramener quelques Charolaises sur le site de Beauvais pour que les étudiants de la filière véto puissent travailler sur les laitières comme les allaitantes au même endroit. » Car l’école a mis les moyens : salles de classe ou de TP sur l’exploitation, tout y est pour associer pédagogie et concret de la ferme.
« Les jeunes nous font réfléchir »
Bien sûr, les étudiants ne sont pas seuls décisionnaires, mais ils sont consultés et leur avis compte. Ils ont aussi un rôle à jouer auprès de leurs enseignants pour que l’exploitation soit davantage utilisée en support de cours. « Moi je suis la courroie de transmission entre la direction de l’école et les étudiants », s’amuse Grégoire Forzy qui rencontre les étudiants d’Agroteam tous les 15 jours pour faire le point sur l’avancée des travaux en cours. La seule difficulté pour l’association : assurer une continuité dans le temps car les jeunes sont ici pour 5 ans maximum mais la ferme continuera à tourner après leur départ. « C’est pour ça qu’on recrute dès les premières et deuxièmes années, pour qu’il y ait toujours des anciens avec des nouveaux dans l’association », expliquent Augustin et Sébastien.
Quant au directeur des fermes, il est lui-même agriculteur à côté et il apprécie ce fonctionnement ici : « Certes, ça prend du temps de discuter tous ensemble, mais ça oblige à se remettre en question et ça c’est hyper intéressant. Ça fait évoluer nos réflexions, par rapport à quelqu’un seul sur sa structure. Et ça fait aussi gagner du temps parfois car ils s’emparent de certains sujets ce qui les fait avancer plus vite. »
Un atelier de transformation laitière tout juste inauguré
La ferme du Bois vient tout juste d’inaugurer son atelier de transformation laitière. Un projet initié à la demande des étudiants et coordonné par l’association Agroteam. Yaourts, fromage frais, fromage blanc, mozzarella et par la suite fromage affiné : le but est de valoriser le lait produit et de vendre les produits en circuit court.
Un laboratoire accolé au tank à lait, avec vue sur le robot de traite, de quoi faire travailler les étudiants en filière agriculture et agroalimentaire, deux chaires qui pèsent à UniLaSalle. Alors, les moyens ont été colossaux : 500 000 € d’investissement dans du matériel semi-industriel. Et si à peine 30 000 litres sont transformés à ce jour, la barre est fixée à 150 000 litres dans les années à venir.
La pédagogie et l’image avant la rentabilité économique
En ce qui concerne les résultats économiques, Grégoire Forzy n’a pas donné de chiffres mais il avoue : « On n’est pas rentables aujourd’hui. D’une part car la masse salariale est très élevée, mais aussi parce qu’on a fait de gros investissements comme le laboratoire de transformation. » Il n’est pas sans rappeler également que « le contexte agricole est compliqué : on a fait de mauvaises récoltes de céréales et les prix de vente ne sont pas au rendez-vous ».
Pour autant, c’est assumé : « Le premier objectif de nos fermes, c’est la pédagogie, viennent ensuite l’image et la visibilité pour l’école. Le pilier économique n’arrive qu’en troisième position. On n’a pas vocation à gagner de l’argent, mais on cherche à atteindre un équilibre économique. L’idée c’est que notre technicité se traduise aussi dans les résultats. »
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