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LOUER DES VACHES LAITIÈRES : COMMENT ÇA MARCHE ?

© CLAUDIUS THIRIET

Gestel fournit aux éleveurs des génisses prêtes à vêler ou propose de racheter une partie du troupeau dans un élevage.

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COMPARÉ À LA LOCATION DE TERRE, louer une partie de son cheptel pour produire du lait est une pratique encore peu répandue. Pourtant, depuis près de quarante ans, Gestel propose ce service. Même si, dans le passé, d'autres entreprises ont tenté de se lancer dans cette activité, cette société est aujourd'hui la seule en France sur ce marché. Elle répond ainsi à la demande de certains éleveurs. Les raisons qui peuvent les pousser à louer des vaches sont multiples. Il y a ceux qui ont besoin d'avoir rapidement à leur disposition des animaux prêts à produire du lait pour faire face à une augmentation de leur référence laitière, ou pour se reconstituer un cheptel après un accident sanitaire. Un deuxième profil concerne des agriculteurs qui souhaitent vendre une partie de leur troupeau à Gestel mais le maintenir en place en le louant. Le but est alors de soulager leur trésorerie pour la réserver à d'autres investissements (foncier, bâtiments…). « Des agriculteurs en fin de carrière nous contactent aussi pour faciliter leur succession. La location leur permet une reprise plus simple, moins onéreuse, et intéressante pour les deux parties. Le cheptel restant sur place est repris par le successeur sans droits ni impôts sur les plus-values », explique Pierre Marguerit, président de Gestel.

Une dernière catégorie concerne des agriculteurs qui souhaitent avoir des vaches pour remplir leur quota mais qui en profitent, dans le même temps, pour vendre une partie de leur troupeau, et ainsi posséder plus de liquidités sur leur compte en banque.

835 EXPLOITATIONS LOUENT DES ANIMAUX

Ce dernier profil d'éleveurs est le plus fréquent. On rencontre des jeunes agriculteurs déjà fortement endettés lors de leur installation et qui doivent faire face à une rallonge de quotas. Ils préfèrent alors ne pas immobiliser des capitaux trop importants dans leur cheptel. Au total, 835 exploitations louent une partie de leur cheptel à Gestel. Cela représente 18 500 vaches réparties un peu partout en France. « Un chiffre stable depuis des années. Sur un effectif de quatre millions de vaches laitières, j'estime le potentiel de location à un million. »

Avant de signer un contrat de location, la société analyse la situation du futur loueur. Trois domaines sont étudiés. Gestel réclame plusieurs documents techniques tels que les résultats du contrôle laitier et le bilan génétique. Elle fait également le point sur la situation économique de l'exploitation et déchiffre la comptabilité des deux derniers exercices. Le niveau d'endettement est évalué ainsi que la capacité à assumer tous les frais de location. Un diagnostic de la situation sanitaire est établi. Le comité de direction de l'entreprise donne son accord, ou pas, pour louer des vaches. « Au final, un délai de quatre à cinq mois est nécessaire entre le premier contact et l'arrivée des vaches sur l'exploitation. Un éleveur qui nous contacte en février pour avoir dix vaches pour réaliser son quota ne peut pas être servi. »

LIBERTÉ DANS LE CHOIX DES ACCOUPLEMENTS

Le contrat est conclu pour une durée de dix ans avec l'obligation de louer quinze vaches au minimum. Différentes races sont proposées. Les holsteins représentent 70 % du cheptel en place. Les demandeurs ont aussi le choix entre des normandes, des montbéliardes, des simmentals ou des jersiaises. À la signature, le locataire doit verser un dépôt de garantie équivalent à 10 % de la valeur du cheptel. En ce moment, les génisses pleines de 7 à 8 mois valent 1 350 E.

Des droits d'enregistrement d'une centaine d'euros sont à acquitter. Quant aux frais de transport, ils sont aussi à la charge du locataire. Celui-ci a l'obligation de souscrire une assurance pour son troupeau. Gestel propose un contrat par l'intermédiaire de Groupama Rhône-Alpes. « 80 % des loueurs choisissent cette formule. Il s'agit d'une assurance coup dur à un tarif très avantageux de 0,56 % du capital à assurer Une franchise est appliquée à chaque événement. Elle est de 5 % du préjudice subi avec un minimum d'une vache et un maximum de deux. »

Une fois les animaux en place, l'éleveur conserve le produit des ventes du lait, des vaches de réforme et des veaux. La location est facturée de deux façons différentes. D'une part, sous la forme de frais de fonctionnement d'un montant de 43,50  par vache louée et par an. D'autre part, en nature, sous la forme de génisses pleines à rendre à Gestel à raison d'une pour dix vaches sous contrat. Selon la durée d'élevage de la génisse, cette rétribution est décalée de deux à trois ans après le début du contrat. L'éleveur peut aussi, s'il le souhaite, conserver ces animaux et les régler en espèces. L'autre partie des génisses sert à maintenir le troupeau au même effectif après les ventes de réforme et le solde devient la propriété de l'agriculteur. Celui- ci est totalement libre dans le choix de ses accouplements (lait, taux, morphologie…). Il a aussi la priorité pour sélectionner les génisses qu'il souhaite conserver pour renouveler son troupeau. « La seule condition est qu'il nous rende une bête d'une qualité équivalente à celle que nous lui avons livrée. Nous louons des animaux standards pour faire du lait. Notre objectif n'est pas de fournir des animaux d'élite pour faire des concours. » En clair, ces génisses doivent être issues de taureaux indexés favorablement. Elles doivent aussi avoir été élevées dans de bonnes conditions et avec une belle croissance. Enfin, la production laitière de leur mère doit se situer dans la moyenne du troupeau.

DES PÉNALITÉS EN CAS DE RUPTURE DU CONTRAT

Cette formule de location de vaches est relativement souple car l'éleveur a la possibilité de recapitaliser à tout moment son troupeau. Par exemple, s'il loue vingt animaux, il doi théoriquement en redonner deux chaque année à Gestel. Mais il peut aussi choisir d'en rendre trois une année et ainsi ne plus louer que dix-neuf vaches. Seule contrainte : en cas de rupture du contrat avant la période de dix ans, des pénalités sont à verser. Elles sont de 10 % de la valeur du troupeau les cinq premières années puis dégressives les années suivantes. Le locataire doit par ailleurs avertir Gestel un an à l'avance par lettre recommandée.

Le suivi des animaux en place est assuré par un technicien qui se rend tous les trois à quatre mois dans les élevages. Son rôle est d'assurer un travail administratif en vérifiant la présence des animaux dans les fermes. Il est aussi chargé d'apporter des conseils dans la conduite d'élevage (alimentation, reproduction, santé…) : « Nous avons intérêt à ce que ces exploitations soient bien gérées techniquement pour que chaque locataire puisse nous payer l'ensemble des frais de location. »

NICOLAS LOUIS

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