ISU HOLSTEIN : TROUVER L'ÉQUILIBRE ENTRE QUANTITÉ ET QUALITÉ
En 2017, l'OS Prim'holstein doit se pencher sur l'évolution de l'indexation de la race. L'enjeu : ajuster le curseur entre la production laitière, la matière utile et les caractères fonctionnels.
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LE PREMIER INDEX DE SYNTHÈSE (ISU) HOLSTEIN, PARU EN 1986, était principalement tourné vers l'amélioration de la production : l'Inel (lait, TB et TP) représentait alors 77 %, la morphologie 15 % et la vitesse de traite 8 %. Après une première révision en 1992, l'année 2001 marque un tournant dans l'orientation de la race à la suite de l'apparition des caractères fonctionnels à hauteur de 37,5 %. La part de l'Inel descend alors à 50 %. Puis en 2012, date de la dernière révision de l'Isu, l'OS(1) a décidé de donner encore davantage de poids aux fonctionnels : Inel 35 %, morphologie 15 %, fertilité 22 %, santé de la mamelle 18 %, longévité 5 %, et sur la vitesse de traite.
Aujourd'hui, la génomique implique davantage de réactivité. Aussi, l'association Prim'holstein France (PHF) demande à l'OS d'entamer, dès l'automne, une réflexion sur les nouvelles orientations à donner à l'Isu. « Il ne s'agit pas d'une remise en cause, mais de faire évoluer les objectifs de sélection pour répondre aux besoins des éleveurs, explique Thierry Chombart, administrateur PHF. Dans ce contexte où le progrès génétique s'accélère, il est nécessaire d'avoir une veille permanente sur l'évolution des index. »
DONNER PLUS DE POIDS AU TB DANS L'INEL
Sur le volet production, PHF ouvre le débat sur l'intérêt de renforcer les taux de matière utile dans l'Inel. En effet, le bilan des IA premières réalisées en France laisse apparaître que le niveau génétique des taureaux utilisés par les éleveurs a tendance à stagner en TP et à baisser en TB. Pourtant, la valeur moyenne des reproducteurs mis en service continue de progresser sur ces index. « L'explication tient au fait que les meilleurs taureaux en termes d'Isu, les plus utilisés, n'offrent pas toujours une amélioration suffisante sur ces deux caractères, observe Eugénie Vannier, conseillère PHF. Or, avec la fin des quotas matière grasse et la baisse du prix du lait, le TB et le TP représentent un enjeu d'amélioration de la paie de lait. »
L'OS devra donc collectivement trouver où situer le curseur pour améliorer les taux sans pénaliser le lait car, au final, c'est bien la quantité de matière utile livrée qui fait le revenu. Mais c'est un principe de vase communicant, l'augmentation de l'un n'allant pas sans la diminution de l'autre. La problématique est exactement la même en ce qui concerne l'augmentation de la production laitière, très fortement corrélée à celle de la taille des vaches.
LIMITER LA TAILLE AU PROFIT DE LA LONGÉVITÉ
Bien que la taille ne soit plus prise en compte dans l'Isu, un constat s'impose : lorsque l'on sélectionne sur le lait, les vaches grandissent. Une situation qui n'est pas sans poser des problèmes dans les bâtiments ou sur les quais de traite. C'est une source d'inconfort qui pénalise l'expression du potentiel. « En outre, il y a une corrélation établie entre la taille et la longévité : plus la vache est grande, plus sa durée de vie est affectée, souligne Bruno Béchet, président de PHF et éleveur dans l'Orne. Or, la nécessité d'évoluer vers des vaches plus rustiques, avec une meilleure longévité, fait aujourd'hui l'unanimité chez les éleveurs. À l'image de certains pays, nous devrons réfléchir à indexer négativement la taille ou peut-être à déterminer une taille optimale entre longévité et production. » PHF rappelle également qu'un haut niveau de production en première lactation a un impact négatif sur la longévité.
Alors que la moyenne de la race se situe à 2,4 lactations, le débat est de savoir s'il faut pousser les primipares ou amortir leur coût d'élevage sur une durée plus longue.
REVALORISER L'ISU DES LIGNÉES ORIGINALES
Fondamentalement, la sélection génétique qui cherche à fixer des caractères d'intérêt particulier pose le problème de la consanguinité. Actuellement, le taux de consanguinité moyen des taureaux mis en service avec la population est de 5 %, c'est-à-dire en deçà du seuil de risque de 6 %. Mais certains champions affichent un niveau de consanguinité très élevé. Cette conséquence du star-system est de la responsabilité des éleveurs, car les packs génomiques mis en service pour atténuer le problème rencontrent peu de succès. « Mais comment les blâmer de choisir le meilleur de la génétique pour leur troupeau », estime Bruno Béchet. Il s'agit donc d'être vigilant car les conséquences de la consanguinité sont insidieuses et difficiles à diagnostiquer. « Au sein de l'OS, la question se pose de revaloriser l'Isu des lignées originales ou de pénaliser l'Isu des taureaux dont le taux de consanguinité avec la population est supérieur à 6 % », explique Denis Biéri, le directeur de PHF.
DES TRAYONS TROP COURTS ET RAPPROCHÉS
À la marge, PHF souhaite aussi aborder la sélection sur la qualité de la mamelle et, en particulier, la taille et l'implantation des trayons. Un ligament très profond, avec des trayons courts implantés vers l'intérieur, devient en effet problématique en traite robotisée : « Les trayons se rapprochent tellement que le robot ne peut plus brancher la vache, explique Bruno Béchet. Sur ma ferme, c'est un motif de réforme. »
Toute cette réflexion pourrait être caduque si, à l'avenir, chaque entreprise d'insémination est reconnue breed society dans le cadre du règlement zootechnique européen. À l'image de l'élevage porcin, chacune aurait alors son propre index de synthèse et aux éleveurs de choisir lequel correspond le mieux au profil de son troupeau. « Avec un risque : le manque de lisibilité et de transparence sur la valeur des index. »
JÉRÔME PEZON
(1) L'OS Prim'holstein regroupe Prim'holstein France (PHF) et France Pie Rouge, France Conseil Élevage, le Cniel, l'EDE, Alice (ex-Unceia), l'Idele et l'Inra.
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