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FONCTIONNELS DES MARGES DE PROGRÈS RÉELLES VIA LA GÉNÉTIQUE

La sélection sur les index fonctionnels peut améliorer sensiblement la reproduction ou la résistance aux mammites. À chacun de choisir sa stratégie.

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LES INDEX FONCTIONNELS NE SONT INCLUS DANS L'ISU QUE DEPUIS 2001 alors que la sélection sur le lait ou la mamelle a plus de trente ans. Les premiers sont connus depuis 1997 et de nouveaux arrivent encore, tels les index de synthèse en mamelle (STMA) ou en reproduction (Repro). Mais déjà, l'état des troupeaux s'améliore sur ces critères. La fertilité des vaches et des génisses a cessé de se dégrader depuis cinq ans. Ainsi, sur la population de la zone Évolution (ex-Créavia), le taux de non-retour à 75 jours est stabilisé autour de 54 % en race holstein et 63 % en race mixte. L'amélioration génétique joue sans doute un rôle dans ces progrès. La génomique s'est ajoutée à l'indexation des caractères fonctionnels pour permettre aux entreprises de sélection d'élargir fortement la gamme des taureaux très positifs en santé de la mamelle ou en reproduction. C'est particulièrement vrai en race holstein. Rares sont les taureaux mis en service quand ils sont faibles en fonctionnels. Pourtant, bien des éleveurs considèrent encore que les mauvais résultats de reproduction s'apparentent à une fatalité. Ils sont conscients du fait que l'agrandissement des troupeaux pénalise la détection des chaleurs, et donc la réussite à l'insémination. De même, la poursuite de l'élévation du niveau laitier est un autre élément qui pèse sur les performances à la reproduction. Et puis, les caractères fonctionnels étant relativement peu héritables, l'espoir de progrès tangibles est perçu comme limité. À tort, car le lien entre les résultats observés et les index fonctionnels des vaches est fort (voir infographie). Les dérapages de taux cellulaires sont nettement plus fréquents sur les vaches aux index cellules négatifs. L'effet est encore plus spectaculaire sur la reproduction. Entre les vaches indexées à -1 et celles qui sont à +1, la fertilité gagne 15 points, l'intervalle entre les vêlages recule d'un mois, et le nombre d'IA par vache baisse de 0,6.

« L'impact de la génétique sur la fonctionnalité des troupeaux est indéniable », souligne Jean- Michel Philipot qui a travaillé ces chiffres chez Créavia.

La perspective d'améliorer le fonctionnement du troupeau via la génétique est donc bien réelle. Cela suppose que l'éleveur se fixe des objectifs et les tienne dans la durée.

« Il faut six ans pour que les choix génétiques aient un impact sur le troupeau », précise David Girod, responsable commercial chez Gen'France. Sur les taureaux, la génomique a permis d'accélérer le progrès en réduisant les intervalles de génération. Depuis la réforme de l'Isu en 2001, on a cumulé davantage de générations grâce à la génomique qu'on aurait pu le faire avec l'indexation sur descendance.

UNE MEILLEURE COMPRÉHENSION GRÂCE À LA GÉNOMIQUE

De plus, ces index sont calculés immédiatement alors qu'avec l'indexation sur descendance, les taureaux étaient connus tardivement sur les fonctionnels. Les CD sont plus faibles pour les fonctionnels. Mais ils atteignent néanmoins des niveaux intéressants en génomique, d'où l'intérêt d'utiliser ces taureaux sans descendance. Enfin, les progrès scientifiques permettent aussi d'aller beaucoup plus loin dans la compréhension des phénomènes qui déterminent les résultats de reproduction ou de résistance aux mammites.

Jusqu'à l'avènement de la génomique, on se contentait d'observer les performances des animaux. On les reliait ensuite au potentiel génétique en tenant compte des autres effets, tels que le milieu. Aujourd'hui, les travaux de l'Inra partent de l'analyse du génotype pour comprendre le phénotype (expression observée des caractères). Ces recherches se poursuivent et élargiront encore les progrès possibles en élevage. Mais d'ores et déjà, ces évolutions se traduisent concrètement pour les éleveurs qui veulent se les approprier. Pour ce faire, ils doivent d'abord fixer des objectifs de sélection en fonction de leur système de production. La vache idéale n'est pas la même pour tous. Les exigences en termes de performances techniques, mais aussi de fonctionnalité doivent être cohérentes avec le mode de fonctionnement de l'exploitation. Un élevage herbager, par exemple, a moins besoin d'augmenter le potentiel laitier et peut rechercher des améliorations sur d'autres postes.

Chacun doit donc commencer par déterminer ses objectifs en termes de profils de vaches recherchés. Reste ensuite à trouver les taureaux qui correspondent. « En matière de sélection, mieux vaut chercher à cumuler les index déterminants pour le système de production. Si l'on met des barrières sur tous les critères de crainte de les dégrader, on ne progresse que très lentement sur les critères considérés comme prioritaires », précise David Girod. Le progrès sur les fonctionnels dépendra du niveau des taureaux choisis sur ces postes et de celui du troupeau au départ. En moyenne, l'index fertilité des vaches holsteins s'élève à 0,15 sur la population femelle de la zone Évolution. En les accouplant avec des taureaux indexés à 1 minimum, le niveau s'élèvera progressivement, d'autant plus que ce travail se poursuivra sur plusieurs générations. Encore une fois, il s'agit de fixer des caractères, ce qui demande une persistance dans le temps.

CUMULER LES INDEX POSITIFS

La plupart des entreprises de sélection françaises segmentent leur gamme en fonction des profils des taureaux afin d'aider les éleveurs à choisir ce qui leur convient dans une palette de plus en plus large et qui se renouvelle rapidement. David Girod a repris les profils des taureaux mis en avant dans la gamme Gen'durable du catalogue de Gen'France. Ceci correspond à des mâles indexés en moyenne à 1,2 en fertilité, 1,7 en santé de la mamelle et 1,8 en longévité. En moyenne, les taureaux proposés dans ce segment depuis 2008 sont indexés à 174 points d'Isu, 812 kg de lait, 2,1 en synthèse morphologique et 1,8 en mamelle. Autrement dit, un éleveur qui aurait choisi ces taureaux aurait progressé sensiblement sur les critères fonctionnels, sans perdre sur ces postes jugés importants. De plus, il n'aurait pas rencontré de difficulté supplémentaire sur le plan de la variabilité génétique. Il s'agit d'un point important à surveiller, notamment en race holstein. Car la hausse de la consanguinité est pénalisante pour la rusticité et donc la fonctionnalité des animaux. On sait par exemple que le taureau américain O-Man a marqué la population holstein sur les fonctionnels. L'éleveur doit donc veiller à ne pas cumuler des pedigrees issus de cette souche. Là aussi, l'observation de la gamme de Gen'France depuis 2008 montre que l'offre disponible permet d'y parvenir.

Si l'addition d'index fonctionnels permet de remonter les index moyens des vaches et donc leurs performances moyennes en reproduction et résistance aux mammites, cela ne suffira pas forcément à inverser la tendance là où elle est très dégradée. La conduite de l'élevage doit accompagner ce travail. Le taux de réussite en première IA progressera difficilement si les chaleurs ne sont pas repérées. « Le potentiel génétique s'exprime d'autant mieux que l'animal se trouve en conditions favorables », précise David Girod.

GÉNOTYPER LES FEMELLES POUR ALLER PLUS VITE

Il serait dommage de voir la sélection comme un moyen de corriger un défaut de conduite identifié. Certes, un troupeau bien indexé en fertilité obtiendra de meilleurs résultats de reproduction, même si le suivi n'est pas optimal. Mais pour progresser vraiment, mieux vaut impulser un élan via la génétique, et l'accompagner par une cohérence dans la conduite. De même, le recours à d'autres outils peut accentuer le progrès génétique. Le génotypage des femelles est un bon exemple. Car si pour un index donné, la valeur sur ascendance d'un animal correspond à la moyenne des index de ses parents, la réalité peut être différente avec des animaux qui héritent plus ou moins du caractère à améliorer. Le génotypage permet de repérer les génisses qui ont le mieux profité de l'accouplement. En les conservant en priorité, on accélère le progrès sur les fonctionnels.

PASCALE LE CANN

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