Le futur de l’élevage se dessine à Derval
Recherche. Le numérique a déjà beaucoup apporté à l’élevage. Et ce n’est pas fini. La station expérimentale de Derval teste des nouveautés qui serviront entre autres à mieux gérer le pâturage.
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Le réseau F@rm XP rassemble les fermes expérimentales du Grand Ouest afin de coordonner leurs travaux et de stocker les données. Derval (Loire-Atlantique) fait partie des quatre fermes laitières de ce réseau (1). Chacune a ses spécificités et est engagée dans des thèmes de recherche transversaux. Derval travaille ainsi sur le numérique et sur l’autonomie énergétique. Toutes les études sont conduites en partenariat avec l’Institut de l’élevage. La ferme de Derval est pilotée par la chambre d’agriculture de Loire-Atlantique. Elle est équipée d’un robot de traite depuis 2008. Elle est également connue pour ses recherches sur la traite, la production de fourrages et l’environnement.
Estimer la biomasse à partir d’images satellites
Parmi les projets en cours, l’un touche à sa fin, Herdect. Il s’agit d’estimer la biomasse d’herbe des prairies à partir d’imageries aériennes, afin de mieux gérer le pâturage. Ce projet, conduit avec l’Inra et Agro Campus Ouest, s’est appuyé sur des images transmises par des drones ou les satellites. « Nous avons davantage travaillé avec les images satellites à Derval car c’est plus simple et gratuit », précise Marc Fougere, responsable de la station.
Des mesures de hauteur d’herbe à l’herbomètre ont été réalisées régulièrement. Les rendements ont été enregistrés. Ce projet s’est intéressé à plusieurs parcelles de la station mais aussi à quelques-unes chez des éleveurs. Les données ont été comparées aux images des satellites afin de mettre au point le modèle qui les marie le mieux. La corrélation se situe entre 0,7 et 0,8, ce qui est satisfaisant. En clair, cela signifie qu’il est possible de prédire la quantité d’herbe disponible sur une surface à partir des images satellites.
Ce travail a pris fin en juin 2020, et nous reviendrons sur les conclusions dans un prochain numéro. Une limite apparaît cependant à leur intérêt : les images satellites ne sont disponibles que par temps clair.
Un autre projet concerne les clôtures virtuelles : le système No Fence. Les vaches sont équipées d’un collier lorsqu’elles vont au pâturage, ce qui permet de les géolocaliser. La clôture virtuelle est tracée sur ordinateur. Lorsque l’animal s’approche de cette clôture invisible, un avertissement sonore retentit, qui doit le dissuader d’aller plus loin. Des tests de ce type sont également conduits avec des vaches allaitantes à la ferme des Établières (Vendée). L’objectif est d’analyser le comportement des animaux et l’efficacité de la clôture. Le matériel sera aussi étudié. Il s’agit notamment de s’assurer que la batterie placée dans le collier ne se décharge pas trop vite. La piste d’une recharge par panneaux solaires est envisagée. À Derval, le projet a pris du retard en raison du Covid-19. Le matériel, fabriqué en Italie, est arrivé à la fin du printemps alors qu’il n’y avait plus d’herbe. L’essai est repoussé à l’automne.
« En combinant ces deux innovations, on pourrait ajuster la surface accessible pour les vaches chaque jour en fonction de l’herbe disponible, et sans aller déplacer les fils », remarque Marc Fougere. Il faudra probablement plusieurs années avant que le système ne soit disponible dans les fermes.
Des prairies pour réduire le réchauffement climatique
Un troisième projet devait démarrer ce printemps mais il est lui aussi victime du Covid-19. Un albédomètre doit être installé sur des prairies. L’albédo se définit comme le facteur de réflexion énergétique d’une surface soumise au rayonnement solaire. Il est proche de 1 quand la surface est claire, et diminue pour les couleurs sombres. L’idée est de connaître le pouvoir réfléchissant d’une parcelle en herbe, pour vérifier si les prairies pourraient constituer un levier de réduction du réchauffement climatique. A priori, elles réfléchissent moins d’énergie que les sols nus. Les chercheurs vont s’appuyer sur les images satellites afin de trouver un modèle pour définir la relation entre le type de couverture du sol et la part d’énergie solaire réfléchie.
Sur le thème de l’autonomie énergétique, Derval participe à un projet européen (Europ Life RUR) dont l’objectif est de mettre en place des laboratoires vivants (living lab) à l’échelle locale. « Nous constituons un groupe afin de trouver ensemble des solutions pour devenir plus autonomes en énergie », explique Marc Fougere. Il rassemblera des agriculteurs, des chefs d’entreprise mais aussi des citoyens. Ils devront chercher des complémentarités entre leurs activités et leurs besoins. Dans ce cadre, Derval va organiser des portes ouvertes pour faire découvrir au grand public la méthanisation. Déjà, la chaleur produite par le digesteur sert à chauffer la piscine de la commune et l’école d’agriculture.
D’autres idées sont explorées. Dont celle de produire de l’hydrogène à partir de l’énergie des panneaux photovoltaïques, pour alimenter des tracteurs ou le méthaniseur.
Pascale Le Cann(1) Les autres fermes sont celles de Trévarez (Finistère), Trinottières (Maine-et-Loire) et Blanche Maison (Manche).
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