« ON TRAIT 120 VACHES/HEURE DANS D'EXCELLENTES CONDITIONS »
LES ASSOCIÉS DU GAEC DU NARD NE REGRETTENT PAS LEUR INVESTISSEMENT, EN 2003, DANS UN ROTO INTÉRIEUR DE 24 PLACES. PRINCIPAL ATOUT DE L'OUTIL À LEURS YEUX : LA RAPIDITÉ DE TRAITE ET UNE JOURNÉE TERMINÉE À 17 H 30.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
LE GAEC DU NARD FAIT PARTIE DE CES EXPLOITATIONS qui croient en l'avenir du lait dans leur région et ont investi en conséquence ces dernières années. Ce Gaec a été créé en 1978 par Jean Rémillon, auquel ont succédé ses deux fils, Christian et André. Cas classique, la salle de traite atteint ses limites quand Dominique, le fils d'André, décide de s'installer en 2003. Les 440 000 l qui accompagnent le jeune agriculteur, ajoutés au quota de 640 000 l produits par les 75 prim'holsteins de l'époque, ne peuvent pas être « digérés » par la 2 x 6 datant de 1978. De plus, elle est totalement obsolète pour cadrer avec le projet des associés à moyen terme. Ils veulent agrandir le troupeau pour parvenir à une production d'environ 1,5 million de litres de lait.
« LA RAPIDITÉ ET LA TRANQUILLITÉ NOUS ONT CONQUIS »
Se pose alors l'inévitable question : robot ou roto ? Dominique, qui a réalisé son stage de six mois dans un élevage équipé d'un robot de traite, a une idée sur la question. « Au début, j'étais séduit par cette solution. Mais au fur et à mesure des mois passés dans l'élevage, je me suis aperçu qu'il ne réduisait pas le travail des éleveurs. Il est simplement réalisé à des moments différents. Ainsi, il faut nettoyer les postes de traite deux fois par jour et surveiller fréquemment les animaux. Au moindre dysfonctionnement, l'alerte du robot est activée, à toute heure du jour ou de la nuit. »
L'approche d'André va dans le même sens : « Nous aurions dû revoir la conception du bâtiment autour du robot et prévoir deux postes pour produire 1 Ml. Économiquement, la charge aurait été lourde à supporter pour le budget de l'exploitation. » Pour alimenter leur réflexion, les trois associés visitent dans les Vosges, un élevage équipé d'un roto. « Quand j'ai vu une personne traire seule 100 vaches en moins d'une heure, j'ai été conquis par le concept de la salle de traite rotative », explique Christian Remillon.
« UNE PRISE DE RISQUES MESURÉE »
La décision d'investir dans un roto intérieur Westfalia de 24 postes est prise collégialement. Pourquoi une traite intérieure et pas extérieure ? La réponse classique est aussi à l'unisson « On l'a privilégiée car elle offre une meilleure visibilité sur les animaux et permet notamment de mieux soigner les vaches atteintes de mammites. » Sans assurances sur l'évolution du prix du lait et l'obtention d'un quota d'1,5 Ml, les associés investissent 412 000 € HT en 2003 dans le projet, dont 180 000 € pour l'équipement composé du roto, d'un Dac avec les colliers associés et d'une porte de tri. Trois silos de 1 000 m3 sont intégrés au projet réalisé dans les bâtiments existants. Pour minimiser les coûts, le groupe effectue les travaux de maçonnerie avec seulement 32 000 € de béton et 30 000 € d'éléments préfabriqués dépensés.
Le choix de ne pas investir dans un nouveau bâtiment, ajouté au prix du lait favorable dans les premières années d'exploitation de la salle de traite, s'avère judicieux. « Cela nous a permis d'anticiper le remboursement du prêt. Nous aurions été très mal lors de la crise laitière de 2009 si nous avions dû le supporter à cette époque », relève Christian. Les coûts de maintenance et de fonctionnement du roto sont estimés par les associés à moins de 5 000 € par an. Faute de compteurs d'eau et d'électricité affectés à la salle de traite, il est difficile d'émettre un bilan plus précis.
En 2008, le Gaec voit l'arrivée d'un cinquième associé, Julien Simonin, le gendre de Christian. Avec cette installation, le quota passe aux 1,5 Ml visés. Pas de problème pour le roto, le lait est facilement collecté avec deux tours de plus. Au rythme d'environ 120 vaches à l'heure, il faut 1 h 30 aux deux trayeurs, temps de lavage compris, pour passer les 170 vaches laitières actuellement dans le troupeau.
C'est un chien électrique qui les pousse sur le parc d'attente. La technique de traite est simple et efficace. À leur arrivée sur le tourniquet, un trayeur prépare la mamelle et effectue les branchements. En fin de chaîne, le second trayeur assure manuellement le trempage des trayons. Les animaux sont ensuite dirigés par une porte de tri dans leur lot respectif. Julien, dernier arrivé au Gaec, ne regrette pas le choix de ses prédécesseurs « J'ai besoin d'un contact avec les animaux, de les toucher, les traire… De nature stressée, je ne supporterais pas de travailler avec un robot et d'avoir un “bip” dans la poche me prévenant d'un incident. Je me lève à 5 h 10 tous les matins, mais à 17 h 30, ma journée est terminée, sauf en période de moisson où je ne compte pas les heures ! » Il est vrai que pendant ces périodes chargées, les associés sont occupés à l'extérieur et une seule personne conduit la traite du soir.
Christian n'a pas relevé d'évolution ou de dégradation de la qualité du lait lors de la mise en place du roto. « Nous rencontrons les mêmes incidents que tous les troupeaux de grande taille dans lesquels les problèmes sanitaires sont amplifiés, notamment en cas de difficultés pour réaliser le quota. Ainsi, l'an dernier, il manquait 85 000 l et nous avons conservé des vaches qui auraient dû être éliminées. Dans le cas présent, la dégradation des résultats cellulaires n'est pas le fait de la salle de traite. »
« IL EST NÉCESSAIRE D'AVOIR DES ANIMAUX CALMES »
Il apprécie la tranquillité de la traite. Cependant, il met en garde sur la nécessité d'avoir des animaux calmes. « Comme dans toutes les salles de traite, les génisses sont légèrement stressées au départ, mais l'adaptation est rapide. Quant aux vaches, elles s'habituent vite au roto. Il est indispensable de disposer de bêtes calmes et d'orienter la sélection dans ce sens. En effet, une porte de tri en sortie de salle permet d'alloter les animaux selon un programme défini. Si les bêtes sont nerveuses, elles risquent de rester coincées dans la porte. Malgré nos précautions, cela occasionne annuellement la perte d'une à deux bêtes. »
À la question portant sur les inconvénients du système de traite, seul Dominique réagit. « Nous ne sommes pas à l'abri d'une panne qui aurait pour conséquence de voir 24 vaches immobilisées dans le tourniquet. En neuf ans, ce n'est arrivé qu'une fois, lorsque le dispositif d'entraînement n'a plus fonctionné, bloquant l'ensemble du système. Heureusement, nous avons réussi à réparer provisoirement avec les moyens du bord, ce qui a permis de maintenir l'outil opérationnel jusqu'à l'arrivée du technicien. »
Tous les associés reconnaissent que la participation à la traite permet à chacun de bien connaître les vaches, alors que dans les élevages équipés d'un robot, c'est généralement celui qui gère informatiquement les événements du troupeau qui connaît les animaux. La salle de traite rotative s'adresse davantage à des « éleveurs » qu'à des « producteurs de lait ». Mais cela nécessite de partager des valeurs communes entre associés, notamment celles de la proximité avec les animaux et la passion de la traite au quotidien faisant de celle-ci non plus une contrainte mais la pierre angulaire du métier… un point sur lequel tout le monde s'accorde au Gaec du Nard.
DENIS SCHANG
A la pulvérisation automatique d'un produit de trempage en fin de traite, les associés lui préfèrent la technique classique plus économe en produit.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :