J. Pichouron : « j’ai diminué ma production laitière pour améliorer mon revenu »
Dans les Côtes-d’Armor, Julien Pichouron et sa compagne Françoise ont totalement chamboulé le fonctionnement de leur élevage laitier en 2017. Leur fil directeur : améliorer leurs conditions de travail. Accompagnés par le Cedapa, ils ont réussi leur pari. Avec un système tout herbe, en monotraite et vêlages groupés, la production laitière a certes été divisée par trois. Mais la baisse des charges leur a même permis d'améliorer l'EBE de la structure.
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« Je me suis installé avec un système maïs typiquement breton. Au fil des ans, ce métier qui me faisait rêver enfant devenait de plus en plus compliqué » lance Julien Pichouron, à la tête d’une centaine de vaches laitières ans les Côtes-d’Armor avec son épouse. Un constat qui a amené le couple à reconsidérer drastiquement ses méthodes de production. « Ma femme avait des problèmes de dos, et nos résultats économiques n’étaient pas à la hauteur du travail fourni ».
Au-delà du constat, c’est une visite d’exploitation qui les a amenés à changer de système. « Nous nous sommes reconnus dans le parcours d’un éleveur du Cedapa qui présentait les transformations de sa ferme » explique Julien.
Fini le maïs et les cultures de vente, le couple a décidé d’allouer leurs 125 ha à la production d’herbe. « Lorsqu’on a analysé notre compta, on s’est rendu compte que nos céréales ne rapportaient pas grand-chose une fois la mécanisation déduite » explique Julien. « On a vu qu’en travaillant exclusivement l’herbe, il y avait certes des produits en moins, mais surtout beaucoup beaucoup de charges en moins ». Sans maïs, plus besoin de correcteur azoté, et grâce au pâturage, les frais de mécanisation baissent en flèche.
La production laitière, et les charges, ont été divisées par trois
En 5 ans, la structure a diminué par trois sa production laitière. « Nous sommes passés de 650 000 l au pic de production à 200 000 actuellement, en monotraite » confirme Julien. Mais le résultat économique de l’exploitation s’est maintenu. « Toutes les économies réalisées sur les intrants nous ont permis de passer de 200 à 600 € de marge brute aux 1 000 l » poursuit l’éleveur. En bref, la marge brute a été multipliée par trois, compensant ainsi l’impact économique de la baisse de production.
« Grâce au pâturage, la structure est passée d’un coût alimentaire de 100 €/1 000 l en 2017, à 30 € avec une grosse baisse sur le poste concentré » détaille Maximes Lequest, animateur au sein du Cedapa, qui a accompagné Julien dans sa transition de système. La marge brute de l’atelier est donc restée inchangée entre 2017 et 2023, à 4 000 € près.
Le passage à l’herbe n’impacte pas que les charges opérationnelles. « Si l’on regarde à l’EBE, on se rend compte que le résultat de la ferme a progressé » décrypte le conseiller. En cause, la signature d’une MAE, mais aussi de nombreuses économies réalisées sur les charges de structure. « Avec le pâturage, je suis passé de 12 000 l de GNR consommé à 3 000 » illustre Julien. Moins d’usure du matériel, moindre recours à la mécanisation… La baisse des charges de structure permet aux éleveurs de dégager plus de revenu qu’avant, à marge brute constante.
Le changement ne s’est pas fait pas du jour au lendemain. « Il faut savoir où l’on veut aller, et effectuer des simulations pour être sûr que les charges diminuent bien plus vite que les produits » alerte le conseiller du Cedapa. « Lorsqu’on passe en vêlage groupé, on chamboule un petit peu ses rentrées d’argent. Il faut savoir l’encaisser ».
Chez Julien, la première étape a été la suppression de l’atelier céréales, avec le développement de la culture de l’herbe. S’en est suivi le groupement des vêlages, qui s’est fait en trois campagnes, suivi par la monotraite, mise en place en 2023. « On compte souvent entre 3 et 6 ans pour que les fermes soient en système de croisière », explique Maxime Lequest.
Le temps de travail a été divisé par deux
Au-delà des chiffres, le couple a gagné en qualité de vie. « Aujourd’hui, on a une vie de famille, des vacances, des week-ends… C’est une autre approche du métier » insiste Julien. La monotraite et la baisse globale de production ont diminué le temps d’astreinte sur la ferme. En 5 ans, les éleveurs ont divisé leur temps de travail par deux. « On travaille moins pour gagner plus » souri l’agriculteur.
Aujourd’hui, les éleveurs cherchent à entretenir cette ouverture d’esprit qui leur a permis de changer de modèle. « C’est important de continuer à échanger dans les collectifs pour comparer nos systèmes, voir ce qu’on peut améliorer. Et si ça peut donner envie à d’autres de s’installer, c’est tant mieux ! »
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