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Le Gaec des Puits (49) produit 900 000 l de lait avec 62 vaches

Pour augmenter l’ingestion et réduire à néant les refus, Alain Piet a opté pour le compact feeding, un fourrage finement coupé, homogène et humidifié. Cela augmente l’efficacité alimentaire.

Au Gaec des Puits à Cholet dans le Maine-et-Loire, les 62 vaches produisent 900 000 litres, 46 kg de lait corrigé par animal. Depuis 35 ans qu’il est installé, Alain Piet a fait grimper les performances de son troupeau pas à pas en élevant le niveau génétique et en suivant un protocole d’alimentation rigoureux… Mais « l’œil de l’éleveur » y est aussi pour beaucoup.

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Il est « maniaque à tous niveaux », c’est lui qui le dit. Alain Piet, éleveur laitier de 58 ans, est surtout très appliqué et obéit à la lettre aux conseils du nutritionniste qui l’accompagne depuis 20 ans. « L'éleveur a une approche très rationnelle, il mesure toujours avec des éléments chiffrés les conséquences de ses choix », témoigne son vétérinaire Emmanuel Pichon.

Cela fait 35 ans qu’Alain Piet œuvre à faire progresser la génétique de son troupeau, et depuis six ans, un protocole rigoureux d’alimentation de ses vaches lui a permis de faire bondir sa production. Avec 980 kg de matière utile, Alain Piet affiche des performances 45 % supérieures à la moyenne des élevages français en Prim’Holstein (680 kg). Il produit 46 kg en lait corrigé, soit 42,5 kg en lait brut avec 43 de TB et 33 de TP. C’est une progression de 21 % en six ans. Et le revenu suit, il parvient à se prélever deux Smic par mois.

Dans son troupeau, il y a « des vaches à 10 000, des vaches à 13 000 et même des vaches à 18 000 ». Depuis 35 ans qu’il travaille à faire progresser le niveau, il choisit sur la production, la morphologie et le fonctionnel. Ses animaux sont en bâtiment toute l’année, alors il recherche « des vaches à logettes avec de bonnes pattes, qui circulent bien et qui vieillissent bien ». Il mise sur le fonctionnel, des vaches avec un index supérieur à 1 en vitesse de traite et supérieur à 2 en cellules. Aujourd’hui, ses vaches font une carrière de 2,7 lactations.

Alain Piet, éleveur d'une soixantaine de laitières en Maine-et-Loire : « Dès qu’il y a une innovation, je plonge dedans ». (© Antoine Humeau)

Une marge sur coût alimentaire en hausse de 35 %

En 2015, il construit un nouveau bâtiment, troque sa salle de traite contre un robot et sa désileuse contre une mélangeuse. De quoi assouplir le travail et surtout augmenter de 10 % la production. « Tous ceux qui passent en robot voient leur production augmenter, moi je suis passé de 11 000 à 13 000 litres. Acheter une mélangeuse m’a permis de distribuer un aliment régulier toute la journée et ne plus avoir de tri, de refus ».

Arrive ensuite le Juno, ce robot repousse-fourrage qui permet à la fois de réduire le travail de l’éleveur et d’augmenter l’ingestion. « Dès qu’il y a une innovation, je plonge dedans », convient Alain Piet. Et c’est pareil pour la nutrition. À partir de 2018, son conseiller met en place un protocole alimentaire en plusieurs étapes pour faire progresser encore la production laitière. En six ans, le coût de la ration va augmenter de 57 %, mais sa marge sur coût alimentaire va passer de 8,5 à 11,5 €. Autrement dit, aujourd’hui, il dégage quotidiennement une marge de 3 € de plus par vache qu’il y a six ans.

Un protocole alimentaire rigoureux

Ce programme d’amélioration de l’alimentation lancé en 2018 commence par le fourrage. Récolte d’herbe précoce, 15 à 18 t MS de maïs récolté par an avec une bonne valeur d’amidon. Le maïs constitue les trois quarts de la ration ici. Ensuite, il faut soigner la présentation de la ration. Pour les vaches en lactation, du fourrage coupé très fin, parfaitement mélangé et humidifié, cela s’appelle le compact feeding. Objectif : une meilleure ingestion, moins de refus et donc une amélioration de l’efficacité alimentaire.

Pour les vaches taries, c’est de la paille coupée le plus finement possible mélangée à du maïs ensilage. Une ration pauvre en énergie, boostée en protéines à laquelle est ajouté du sel anionique pour acidifier les pH urinaires, descendre à 5,8 ou 6 environ pendant un mois. L’acidification de la ration permet de préparer les vaches à monter très haut et s’y tenir pour ainsi réduire les problèmes de caillettes et fièvres de lait.

L’étape suivante dans le protocole d’alimentation consiste à ajouter de l’énergie (matière grasse) pendant la lactation et d’adapter l’apport d’amidon selon la qualité du fourrage. Pour faire progresser les taux, il distribue des acides aminés. La méthionine est incorporée à l’aliment au robot, la lysine distribuée sur un boîtier rajouté sur le robot. Enfin, des « protéines by-pass » sont incorporées, histoire de gagner quelques points supplémentaires. Ces correcteurs azotés présentent la particularité d’être dégradés au niveau de l’intestin et non au niveau du rumen, ce qui permet de donner plus de protéines (sans les gaspiller) et donc de produire plus de lait. Cela remet aussi en forme la vache et rehausse un peu les taux.

« Toutes ces étapes doivent absolument être conduites dans cet ordre, commencer par le fourrage, sinon le programme ne fonctionne pas », met en garde Mickaël Lelaure, nutritionniste de la coopérative Terrena qui suit l’élevage. Tout cela a permis de réduire significativement la mortalité et les frais vétérinaires. « Avant, les vaches n’étaient pas alimentées en fonction de leur production, et il y avait une mauvaise préparation au vêlage », glisse le conseiller nutrition.

L’œil de l’éleveur

Les performances s’expliquent aussi par l’attention qu’Alain Piet porte à son troupeau. « Il mesure les corps cétoniques, les pH urinaires, il ausculte ses animaux et quand il a un petit doute, il pose des questions, c’est quelqu’un d’excessivement curieux », raconte Emmanuel Pichon son vétérinaire.

Avant de sortir son thermomètre, il sait si sa vache a 40° de fièvre. Sa capacité à détecter les moindres pathologies surprennent son véto et son nutritionniste. « Si une vache fait un peu d'acétonémie, il le détecte avant le robot et se trompe rarement », rapporte Mickaël Lelaure, le nutritionniste qui suit l’élevage. Il repère les chaleurs avant le détecteur, ce qui est bien pratique pour progresser sur l’âge au 1er vêlage ou l’IVV. Actuellement, ses génisses vêlent à 24 mois. « On pourrait progresser un peu sur le poids des génisses, songe Mickaël Lelaure, parce que plus elles sont lourdes, plus elles pourront faire du lait ensuite ».

Difficile aujourd'hui pour Alain Piet d’améliorer encore sa production laitière, le robot est saturé, et pas question d’en acheter un deuxième. À quelques années de la retraite et de l’installation de son fils, ce qu’il veut désormais c’est « maintenir le cap ». Avoir toujours des fourrages de qualité, continuer à suivre le rigoureux protocole d’alimentation. Et progresser encore en génétique « parce qu’on peut toujours progresser ».

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