Le président du Cniel démissionne
À la tête de l’interprofession laitière, et également président de la coopérative Eurial, Pascal Le Brun jette l’éponge face aux divergences persistantes entre les différents collèges. Il a donné sa démission ce jour.
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À l’issue du conseil d’administration extraordinaire du Cniel tenu ce jour, mardi 15 octobre, Pascal Le Brun a présenté sa démission de la présidence de l’interprofession laitière. Il s’est justifié dans un communiqué de presse en date du jour même : « Après 18 mois d’engagement et face à la difficulté de trouver un consensus politique au sein des différents collèges composant l’interprofession j’ai pris la décision de démissionner de mon mandat. Je souhaite vivement que les intérêts collectifs puissent l’emporter sur les divergences apparues afin de poursuivre le travail engagé au service de la filière et son avenir. »
La MG reste un point de blocage
Les points de blocage entre les différents collèges du Cniel sont connus. Tout d’abord, le débat sur le paiement de la matière grasse (MG), toujours au point mort dans les interprofessions régionales, face au refus de la FNIL qui privilégie la négociation avec ses organisations de producteurs (OP) selon les débouchés propres à chaque entreprise. Plutôt que de privilégier l’import de matière grasse, le collège producteurs demande une revalorisation sur le marché intérieur.
La publication de l’indicateur beurre-poudre, applicable dans les formules de prix négociées entre les OP et les industriels, est aussi toujours en négociation. L’issue bloque sur le niveau des charges des transformateurs retenus dans la formule : la FNIL et la FNCL demandent que 100 % de leurs coûts soient pris en compte. Or, selon Eric Richard, membre du bureau de la FNPL : « Les industriels se basent sur une étude interne dont nous n’avons pas vu les chiffres alors que nos coûts sont transparents. » Lors d’une conférence de presse au Sommet de l’élevage, la FNPL rappelait que le coût annoncé par les deux collèges est de 50 €/1000 litres supérieurs à celui des transformateurs allemands.
Rééquilibrer le financement du Cniel
L’accord CVO (cotisation volontaire obligatoire) est un autre point de blocage, avec une obligation de trouver un accord d’ici la fin de l'année. Pour rappel, par leurs cotisations, les producteurs financent la majeure partie (75%) du budget du Cniel d’environ 40 M€ (44,4 M€ en 2024 financés à 82 % par la CVO, 14 % par des subventions et 4 % par des cotisations volontaires). Pascal Le Brun s’était engagé à un rééquilibrage de ce budget, dans un cadre de baisse des co-financements européens. Une proposition refusée par la Fnil, selon le président de la FNPL, qui propose non pas de maintenir le budget avec une hausse de la cotisation des industriels, mais plutôt une baisse officielle du budget du Cniel, pour maintenir la répartition déjà en place. Les producteurs resteraient alors majoritaires dans le financement, justifiant plus facilement d’une possible présidence. « Cela représente une baisse de 3 à 6 M€ que nous refusons », affirmait Yohann Barbe, président de la FNPL le jour même. Joseph Martin, président de la Coordination rurale de Bretagne, confirmait déjà au Space les tensions : « La bataille porte sur l’équilibre des budgets, dans un contexte de baisse des co-financements européens. Il y a une bagarre entre la CVO payée par les industriels et celle des producteurs, plutôt imaginée en baisse », avec une question en arrière-plan : les industriels feront-ils repayer aux producteurs cette CVO au travers du prix du lait ? À l’occasion du Sommet de l’élevage, la FNPL avait rappelé sa volonté de défendre le budget du Cniel au service de la promotion des filières. Sans accord au 1er janvier, cela signifierait un arrêt des prélèvements sur les payes de lait avec un arrêt des missions des salariés de l’interprofession. « Le Cniel a une réelle expertise dans certains dossiers. Nous allons perdre en légitimité et en qualité dans les actions menées », regrette Raphaël Cotty, membre du bureau de la Confédération paysanne, qui dénonce « des décisions qui changent tous les jours depuis des semaines ». Yohann Barbe remet aussi en cause des actions coûteuses de communication et de promotion à l’international, financées par le Cniel, mais dont les résultats ne servent qu’à quelques industriels privés exportateurs comme Lactalis ou Savencia, sans retour dans les prix aux producteurs. La FNIL n'a pas souhaité communiquer à date.
Conformément aux statuts, le remplacement du président est confié au vice-président, Marc Delage, président du collège du commerce et de la restauration.
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