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« Nous avons choisi la litière de miscanthus malaxé »

Ce type de couchage avec peu de recharge et de curage réclame un bâtiment avec une ventilation très performante. Ici, avec une orientation inhabituelle, aucun bardage ni brise-vent, tout fonctionne parfaitement, pour les vaches comme pour les éleveurs.

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À leur installation en 2019, les trois associés du Gaec Gabioval ont hérité d’un bâtiment vieillissant et trop étroit pour loger leurs 100 vaches. De plus, il est enclavé dans le hameau, éloigné des pâtures et proche des gîtes ruraux développés par le Gaec. L’option de construire un bâtiment neuf au centre de 70 hectares de prairies s’est vite imposée. L’ancien servira au stockage du fourrage qui faisait aussi défaut.

« Notre cahier des charges visait un bâtiment pas trop cher, non chronophage, qui préserve la santé de nos vaches et bien ventilé, notamment pour l’été », expliquent les jeunes éleveurs. L’expérience des logettes, chez eux ou lors de stages, les avait quelque peu échaudés. « Entretenir 100 logettes, c’est une heure par jour et dans ce type de bâtiment, nous avons souvent vu des vaches avec des gros jarrets, des boiteries, bref le confort n’est pas idéal », justifient Thibaud et Romain. L’aire paillée alors ? « Le paillage quotidien et un curage tous les 8 à 10 jours, nécessaires pour prévenir les infections mammaires, nous faisaient douter. »

Un recul aujourd’huirassurant sur le plan sanitaire

Dans leur département, les éleveurs ont rencontré le Gaec de l’Enclos, l’un des pionniers du couchage sur litière malaxée, à base de miscanthus, matériau très absorbant. Elle n’est curée que deux ou trois fois par an. « Nous avons un recul de trois hivers sur ce concept de couchage qui nous rassure aujourd’hui sur le volet sanitaire », précise Jérôme Mary, conseiller bâtiments à la chambre d’agriculture. L’aire de couchage, à base de miscanthus malaxé, sera donc le choix du Gaec Gabioval. « Nous avons l’avantage d’avoir un système très pâturant. Les vaches sortent de mars à décembre et nous fermons l’aire de couchage en même temps que le silo de maïs, de début avril à début juillet, voire plus selon la météo. Le reste de la saison de pâturage, elles ne sont dans le bâtiment que la nuit. »

L’autre originalité de ce bâtiment est son orientation : sud-est pour l’aire de couchage, nord-ouest pour la table d’alimentation. « Ce n’était pas idéal pour le photovoltaïque prévu sur le toit bi-pente mais nous souhaitions privilégier le confort des animaux. » L’objectif est d’avoir un bâtiment très ouvert sans que la pluie entre sur le couchage. Ainsi, le bâtiment, en forme de L, est protégé du vent dominant du sud-ouest par le bloc de traite. Au nord-ouest, la table d’alimentation et l’aire d’exercice assurent un espace couvert de 10 mètres bien suffisant. Côté sud-est, un auvent de 4 m protège l’aire de couchage. Il sert aussi d’abri aux niches à veaux. « Avec une telle orientation, le soleil rasant de l’hiver entre dans l’aire de couchage et participe à assécher la litière. Nous avons fait le pari de n’avoir aucun rideau brise-vent. Cela semble bien fonctionner et c’est une belle économie », assurent les éleveurs. L’aire de couchage a été dimensionnée pour un peu plus de 8 m2 par vache, dans la moyenne haute d’une aire paillée classique. Son sol est constitué d’un mélange de sable argileux (présent sur l’exploitation) et de chaux, arrosé et tassé pour former une dalle solide. Le pourtour du bâtiment a été drainé pour éviter les remontées d’humidité. Le bloc traite accueille une TPA 2 x 8 choisie de manière à pouvoir traire seul les 100 vaches du troupeau. L’aire d’attente est équipée d’une barrière poussante qui, au retour, assure le raclage. Une solution qui libère d’une astreinte biquotidienne. Les animaux sont entrés dans le bâtiment le 5 novembre dernier, accueillis sur une litière de 30 cm de miscanthus broyé (environ 30 tonnes à 128 €/t livrée).

Passage du cultivateur à dents deux fois par jour pour malaxer la litière

« Nous aurions peut-être dû en mettre un peu plus. Nous avons rechargé de 10 tonnes le 1er janvier, puis à nouveau fin janvier car cela collait un peu aux vaches. L’objectif serait de ne plus rajouter de miscanthus et de n’avoir à faire qu’un seul curage à l’automne, mais c’est une conduite à vue en fonction de l’humidité de la litière. » Deux fois par jour, le passage d’un cultivateur à dents permet de bien malaxer la litière pour placer les déjections dans la couche inférieure, cela ne prend que quelques minutes. Outre le fait que ce bâtiment est très bien ventilé, ce mode de couchage fonctionne aussi grâce à une barrière poussante qui déloge les vaches du couchage plusieurs fois en vingt-quatre heures de façon à les faire bouser sur l’aire de raclage. « La barrière est déclenchée à 7 h 30 pour la traite. Elle est reculée à 10 h puis elle revient à 11h mais comme nous alimentons après la traite, les vaches restent en général aux cornadis jusqu’à 11 h. On les fait se relever à 16 h puis à minuit. L’objectif est de ne pas trop perturber leur cycle, nous avons une caméra dans le bâtiment pour valider cela et bien caler les passages de la barrière. » Cette barrière poussante est électrifiée mais une alarme sonore précédant son déplacement fait que toutes les vaches ont compris qu’elles doivent évacuer les lieux pour ne pas la toucher.

De 170 000  à 100 000 cellules, immédiatement

Dans l’aire d’exercice, le racleur passe 4 fois par jour et de façon coordonnée avec la barrière poussante. Début février, après trois mois de présence dans le bâtiment, le bilan sanitaire du troupeau est excellent. « De 170 000 cellules dans l’ancien bâtiment, nous sommes passés immédiatement à 100 000 cellules. Les vaches sont propres à la traite. Nous ne voyons plus de boiteries ni de signes de dermatite. Le fait que les vaches ne puissent plus se coucher après la traite, quand l’aire de couchage est condamnée, est un élémentimportant pour la santé mammaire. » Par rapport au bâtiment logettes précédent, l’amélioration du confort des animaux est une évidence, mais de celui des éleveurs aussi.

Une heure et demie d’astreinte gagnée en hiver

« Avec 20 vaches supplémentaires, nous estimons avoir gagné une heure et demie de travail d’astreinte en hiver. Notre point faible reste l’alimentation avec quatre allers-retours du télescopique et du godet dessileur. Mais ce bâtiment est conçu pour pouvoir travailler seul, notamment le week-end où il faut deux heures et demie pour tout faire, soins des veaux compris. » Il n’y a pas ici de nurserie, les cases à veaux individuelles et collectives sont abritées par l’auvent du bâtiment au sud-est, ce qui répond au cahier des charges bio. Les veaux sont nourris avec un taxi-lait. Les taries et les génisses occupent un ancien bâtiment avec aire paillée. La préparation au vêlage s’effectue dans une parcelle toute proche du bâtiment. Jusqu’alors, les vaches ont vêlé dehors. « Nous avons deux box d’infirmerie ou de vêlage à l’extrémité du bâtiment qui n’ont pas encore servi. » Enfin, aucun translucide n’a été posé sur la toiture du bâtiment pour éviter les effets de serre. L’été, pendant les fortes chaleurs, le bâtiment peut avoir fonction de parasol. Sur le pan de toiture sud-est, des panneaux photovoltaïques ont été installés. Montant du projet : 100 000 € pour 100 kWc. « Cela devrait dégager entre 1500 € et 2 000 €/an le temps des douze ans de crédit, puis 10 000 € ensuite », estiment les éleveurs.

Dominique grémy

© Gaec Garlais - Le Gaec Gabovial. Marion, Romain et Thibaud, les trois associés et Olivier (deuxième à gauche), le salarié. Gaec Garlais

© d.g. - Vue d’ensemble,du côté sud-est. Avec cette orientation, le bloc de traite protège le couchage du vent dominant de sud-ouest ; on aperçoit les niches à veaux, collectives et individuelles, abritées par l’auvent. Sur le toit, les 530 m2 de panneaux photovoltaïques. d.g.

© d.g. - La litière. Dans un bâtiment entièrement ouvert, elle est malaxée tous les jours avec un cultivateur à dents. L’objectif des éleveurs est de curer une fois par an et de recharger en miscanthus quand les vaches commencent à se salir (deux ou trois fois dans l’hiver). À droite, la barrière poussante. On distingue la charpente bois et le toit sans aucun translucide. d.g.

© d.g. - La barrière poussante. Elle se déclenche cinq fois par vingt-quatre heures pour inciter les vaches à bouser dans l’aire raclée. Un signal sonore avertit les vaches de sa mise en marche : elles se lèvent alors toutes avant d’être touchées par le courant électrique.d.g.

© d.g. - L’aire d’alimentation. Elle est orientée nord-ouest, avec un auvent de 5 mètres, mais sans filet brise-vent. Les éleveurs disposent de 125 places aux cornadis. d.g.

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