Biodiversité Des systèmes valorisant la biodiversité domestique
Les races bovines à faible effectif représentent un patrimoine génétique précieux. La Bretonne pie noir est un exemple de préservation possible dans des systèmes économes et autonomes, favorables par ailleurs à la biodiversité sauvage.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
La Bretonne pie noir fait partie de la quinzaine de races bovines laitières à faible effectif dans l’Hexagone. Elle fut l’une des premières à bénéficier d’un programme de conservation dans les années 1970 visant à préserver son patrimoine génétique. Elle jouit d’un regain d’intérêt depuis plusieurs années, en lien avec le développement de projets basés sur les systèmes herbagers, la production bio, la transformation et les circuits courts. « Nous alertons les producteurs sur le fait qu’il n’existe pas de modèle économique en circuit long pour les élevages 100 % Bretonne pie noir », souligne Rim Chaabouni, animatrice de l’organisme de sélection Union Bretonne pie noir (UBPN). Les effectifs de femelles augmentent de 10 à 15 % par an depuis une dizaine d’années, atteignant 3 200 têtes fin 2022, sachant que le seuil à partir duquel la race n’est plus considérée comme menacée se situe à 7 500. Parmi les 90 éleveurs professionnels adhérents, la moitié produit du lait, les autres de la viande. La gestion de la reproduction est très encadrée avec la proposition de plans d’accouplement non basés sur des critères de production, mais visant à minimiser le taux de consanguinité et à maximiser la variabilité génétique.
« La dynamique actuelle en Bretonne pie noir constitue un moyen de pérenniser la biodiversité domestique, indique Rim Chaabouni. De plus, la race est toujours associée à des systèmes extensifs favorisant les prairies permanentes, les haies et les espaces naturels, économes en intrants et à faible empreinte carbone. » C’est le cas à la SCEA Le Gros Chêne à Betton, au nord de Rennes (Ille-et-Vilaine), qui a été créée en 2019 par Philippe Marchand et Émilien Mondher, tous deux en reconversion professionnelle.
Aucune mammite ni boiterie
Leur projet se base sur la location de 32 ha, issus d’une ferme laitière conventionnelle de 55 ha en race prim’holstein. Les deux associés louent aussi le bâtiment et investissent 80 000 euros dans un laboratoire de transformation. Ils achètent 40 génisses Bretonnes pie noir. « Nous voulions une race rustique, capable de vêler seule, adaptée au pâturage et au plein air toute l’année, résume Philippe Marchand. Nous n’avons que deux hectares de mélange céréalier destiné aux veaux et aux quelques cochons valorisant le petit-lait ; le reste est en prairie permanente. Les vaches sortent toute l’année et dorment dans le bâtiment en hiver. »
Le choix de la Bretonne pie noir est motivé aussi par la richesse de son lait en matière grasse et protéines, car le modèle économique du projet repose sur la transformation en produits laitiers. « Nous produisons 70 000 litres de lait, soit environ 2 500 litres par vache, mais ce n’est pas un problème car nous valorisons presque tout via notre laboratoire, et nous vendons en direct, explique Philippe Marchand. La transformation représente le plus gros de notre travail. Côté élevage, la Bretonne est facile à vivre. Elle n’a aucune mammite ni boiterie, est très féconde et a une bonne longévité. Nous faisons deux traites par jour pendant trois ou quatre mois après vêlage, puis nous passons en monotraite. »
Des atouts en contexte difficile
Sur leur site internet (1), les éleveurs affirment leurs engagements : « développer une agriculture autonome », « garder la valeur ajoutée », « respecter l’environnement » et, enfin, « préserver et développer la diversité génétique des races animales ». « Cela nous tient à cœur, confirme Philippe Marchand. Le patrimoine génétique de la Bretonne pie noir lui confère une très bonne capacité d’adaptation. Originaire des terres pauvres des monts d’Arrée (Finistère), elle a peu de besoins et sait valoriser une herbe peu riche stockée sur pied, voire des friches. Elle abîme moins les sols humides car elle est petite et légère. Nous pensons qu’elle a des atouts dans un contexte où les conditions d’élevage deviennent plus difficiles, comme en 2022. Les vaches ont produit un peu moins de lait car il y avait moins d’herbe. Mais nous n’avons pas eu à puiser dans nos stocks. »
Pour accéder à l'ensembles nos offres :